Énergies
Vraignes-en-Vermandois : Sanamethan inaugure son unité de méthanisation
L’unité de méthanisation de Vraignes-en-Vermandois, portée par 18 agriculteurs, produit du biométhane injecté dans le réseau de transport GRTgaz et valoriser une partie du dioxyde de carbone produit. Un projet innovant.
Ce 23 mai, Aurélien Desrousseaux et Rémi Chombart respectivement président et directeur de Sanamethan et Pierre Chombart, directeur du site, ont inauguré, à Vraignes-en-Vermandois, une unité de méthanisation. Un événement de taille au regard de la dimension innovante de ce projet porté par 18 agriculteurs regroupés au sein de la société Sanamethan. En effet, ceux-ci se sont associés avec la SICAE de la Somme et du Cambrésis, la SEM Somme Énergies et la SEM Énergies Hauts-de-France pour faire naître un pôle de production de gaz vert combinant la production de biométhane et de dioxyde de carbone pur. Une première en Hauts-de-France pour un investissement de 12 millions d’euros. « Nous avions tous envie de faire bouger les lignes, de montrer que les agriculteurs pouvaient être visionnaires », se remémore Aurélien Desrousseaux.
Un projet ambitieux
Ce projet, dont la réflexion a été lancé en 2007, a été suivi avec intérêt par Xavier Bertrand, président de la Région Hauts-de-France, étant donné la politique énergétique régionale. « Nous avons soutenu cette initiative à travers des fonds européens à hauteur de 2,8 millions d’euros et nous répondrons encore une fois présent si votre développement vous amène à vous intéresser à l’hydrogène », promet-il, rappelant au passage que la Région a soutenu 40 unités de méthanisation depuis 2016.
« Nous devons accélérer, casser certaines idées reçues comme celles qui voudraient que l’on utilise des cultures dédiées pour la méthanisation : ici, on utilise uniquement des sous-produits pour produire du gaz ! Les cultures sont dédiées à l’alimentation et rien d’autre », pointe Xavier Bertrand. En effet, l’unité de méthanisation est alimentée par des déchets de légumes du site Bonduelle, de pommes de terre de l’usine Mousseline, de pulpes de betteraves de Tereos ou encore de biodéchets provenant de Veolia. « Bientôt nous aurons aussi de la fiente de poule », confie Pierre Chombart, directeur du site de Vraignes-en-Vermandois.
Valoriser toute la production
Concrètement, ces déchets sont versés dans des cuves d’incorporation où la matière est broyée. Celle-ci est ensuite envoyée dans quatre digesteurs où elle fermente pendant 60 jours, produisant ainsi un gaz composé de méthane, de dioxyde de carbone et potentiellement de soufre. « Nous injectons un peu d’oxygène pour réguler le soufre », explique Pierre Chombart.
Si 320 m3 de biométhane sont injectés par mois dans le réseau de transport GRTgaz, une majorité du dioxyde de carbone produit est, lui, revendu à Carbonord pour être transformé en glace carbonique. « La production équivaut à 4 000 tonnes par an. Carbonord en prend environ 2 500 à 3 000 tonnes, nous étudions d’autres débouchés possibles », complète le directeur du site avant d’aborder la question du digestat. « Un séparateur de phase nous permet d’obtenir du digestat liquide et solide. Cette matière est ensuite utilisée par les agriculteurs partenaires comme fertilisant », détaille-t-il.
Pour autant, Sanamethan pense déjà à l’avenir. « Nous avons plusieurs idées , confirme Aurélien Desrousseaux, avant de poursuivre : Nous pensons installer des panneaux photovoltaïques sur le site, nous regardons aussi l’hygiénisation [ndlr, la valorisation des sous-produits animaux et de la soupe de biodéchets], la production d’hydrogène vert ou encore la mise en place d’une station GNV accessible à tous », conclut-il.
Un parcours du combattant
« Enfin ! », lance visiblement ému Rémi Chombart, directeur de Sanamethan. « Voilà 17 ans que nous nous sommes intéressés à la méthanisation. Le président de la Chambre d’agriculture de l’époque nous avait dit que ce serait simple », plaisante-t-il avant de rappeler que deux projets avaient été abandonnés avant cette initiative. « En 2018, grâce à la baisse des coûts liés aux raccordements, notre projet devenait enfin viable ! », se souvient-il. Pendant quatre ans, les 18 associés se sont heurtés à des problèmes administratifs et règlementaires presque insolubles. En cause leur modèle précurseur qui associait biométhane et dioxyde de carbone. « Nous avons pu compter sur le soutien des élus locaux et de la Région mais aussi sur la bonne volonté de quelques-uns. Mais nous avons perdu beaucoup de temps et nous devons faire face à présent à la concurrence belge où la règlementation est plus souple », observe-t-il.