Villeneuve d’Ascq : Moulins d’Ascq mise sur une bière bio moins énergivore

Le 10 septembre dernier, Moulins d’Ascq a inauguré à Villeneuve d’Ascq sa nouvelle brasserie, qui lui permettra de multiplier par deux ses capacités de production, tout en diminuant sa facture énergétique. Un manière de concilier développement économique et respect environnemental. Rencontre avec les brasseurs cogérants, le fondateur Mathieu Lepoutre et Alban Decoster.

"Depuis vingt ans, nous sommes farouchement indépendants !" soulignent Alban Decoster et Mathieu Lepoutre, cogérants de la brasserie Moulins d'Ascq.
"Depuis vingt ans, nous sommes farouchement indépendants !" soulignent Alban Decoster et Mathieu Lepoutre, cogérants de la brasserie Moulins d'Ascq.

La Gazette : Vous espérez doubler votre activité. Peut-on encore parler de bière artisanale ?

Oui, bien sûr. Il faut savoir que la micro-brasserie, c’est en-dessous de 1 000 hectolitres et la brasserie artisanale, c’est jusque 200 000 hectolitres*. Aujourd’hui, sont brassés chez nous 10 000 hectolitres et nous pourrons monter jusque 18 000. On a encore quelques années devant nous pour être encore considéré comme une brasserie artisanale.

Quels sont vos nouveaux objectifs ?

C’est d’augmenter, au niveau de la région, du marché national et européen, nos ventes sur le réseau bio, sur lequel nous sommes déjà assez présents. C’est surtout de travailler de nouvelles marques pour capter la clientèle des cavistes qui recherchent des produits plus spécifiques comme les craft beers, des recettes atypiques plus techniques qui sortent des sentiers battus.

Pourquoi ce choix d’investir dans une brasserie HQE (haute qualité environnementale) ?

Il y a quatre ans, au moment de réfléchir à ce projet, nous avons voulu tendre vers l’exemplarité écologique. C’est un bâtiment béton, conçu avec une inertie très forte en matière de consommation d’énergie, offrant un confort de travail aussi bien en été qu’en hiver. Nous avons tout fait pour consommer le moins d’énergie possible.

Où en est le projet d’installer une houblonnière expérimentale ?

On en a fait une sur la brasserie même, qui a une vocation pédagogique auprès des visiteurs. En septembre, ils pourront admirer les fleurs de houblon et les écraser entre leurs doigts pour sentir les arômes. En mars prochain, seront plantés 800 m2 de houblon avec un partenaire agricole. Une manière de s’intégrer de plus en plus.

Par rapport à la Ferme du Sens que vous avez quittée, que pourra-t-on trouver de plus sur le nouveau site ?

Un lieu de vie ! Cela nous manquait terriblement de ne pas pouvoir accueillir nos clients pour leur montrer ce que l’on fait. Aujourd’hui, nous avons un bar de 200 m2, intégré dans la brasserie, qui jouxte la salle de production qui restera visible grâce à des parois vitrées. On pourra prendre sa bière tout en visualisant les cuves de brassage, de fermentation, la ligne d’embouteillage. L’emplacement du site dans une zone marchande est aussi un point fort. C’est un bel endroit pour faire venir le client et dégager une image attractive.

Comment s’est portée l’activité durant la crise sanitaire ?

En juin 2021, notre équipe de 13 personnes a dégagé sur l’ancien site un chiffre d’affaires de 3,250 M€ contre 3 M€ en 2020. Vu l’investissement réalisé, nous espérons doubler nos ventes en quatre ans. Cela supposera de recruter des commerciaux et du personnel en production. Nous souhaitons profiter de ce marché en croissance, même s’il y a énormément de petits acteurs qui arrivent sur le secteur. Mais si on compare avec les USA où 15% du marché sont tenus par des brasseurs artisanaux, ici on est à 7 ou 8%. Il y donc encore du potentiel, nous permettant de proposer des bières plus travaillées que les industrielles.

Mathieu Lepoutre devant une des nouvelles cuves de brassage
Mathieu Lepoutre devant une des nouvelles cuves de brassage.


* L'abus d'alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.

Modernisation de l’outil industriel

La nouvelle brasserie Moulins d’Ascq occupe une surface de 1 650 m2, sur un terrain de 6 500 m2. L’outil industriel s’est étoffé : quatre cuves de brassage contre deux avant ; quinze cuves de fermentation contre dix avant ; deux brassins en 12 heures contre 18 heures avant ; récupération des calories du groupe de froid qui refroidit les cuves de fermentation, pour chauffer la salle de fermentation en bouteilles ; recyclage de la drêche (les résidus de brassage) en alimentation du bétail ; aucune chaudière grâce à une isolation performante... La conception du bâtiment a été confiée au cabinet Pierre Coppe à Tourcoing. Montant de l’investissement : 2,7 M€. Ce bâtiment industriel écologique, situé en ville, a certes coûté deux fois plus cher qu’une brasserie classique en zone industrielle. Mais le site a bénéficié d’aides européennes Feder pour la chaîne d’embouteillage et de celles de l’Agence de l’eau, pour traiter les effluents de la brasserie avant leur rejet.