Vers une évolution du statut des sportifs de haut niveau
Les sportifs de haut niveau devraient bénéficier, d’ici la fin de l’année, d’un nouveau statut adapté visant, notamment, à sécuriser leur situation juridique et sociale. La proposition de loi du 15 avril 2015, en ce sens, sera examinée par le Sénat courant septembre.
Loin de l’image médiatique d’une minorité, les sportifs de haut niveau seraient deux tiers environ à vivre sous le seuil de pauvreté (environ 980 euros mensuels). Cette précarité est en grande partie liée au fait qu’ils ne bénéficient, en dépit de leur talent et de leur engagement, d’aucun contrat de travail. C’est le constat établi par le rapport du juriste Jean-Pierre Karaquillo, remis en février dernier au Secrétaire d’État aux Sports, Thierry Braillard, concluant, en conséquence, à la nécessité d’une réforme. C’est dans ce contexte qu’a été déposée en avril une proposition de loi (proposition de loi n° 27-34 du 15 avril 2015) visant à protéger les sportifs de haut niveau ainsi que les professionnels et à sécuriser leur situation juridique et sociale, portée par la députée du Pas-de-Calais, Brigitte Bourguignon (PS).Il s’agit, notamment, de remédier au défaut de couverture sociale des sportifs de haut niveau, lié à l’absence de contrat de travail. En effet, en cas d’accident sportif (lors d’une compétition ou d’un entraînement), accident du travail ou maladie professionnelle, ces sportifs ne sont pas éligibles «au régime de réparation extensive (prestations en nature, frais médicaux, réadaptation fonctionnelle et professionnelle) et de revenus (rente ou capital) de la Sécurité Sociale». L’objectif est donc de permettre aux sportifs de haut niveau d’accéder à une protection minimale, comme cela a été réalisé en matière de retraite par la loi de Financement de la sécurité sociale pour 2012 (Loi de financement de la sécurité sociale n°2011-1906 du 21 décembre 2011). En outre, la proposition de loi obligerait les Fédérations délégataires, auprès desquelles sont licenciés les sportifs de haut niveau concernés, à prendre en charge une couverture privée complémentaire.
CDD spécifique
Par ailleurs, afin de compléter le dispositif, serait créé un statut spécifique des sportifs et entraineurs professionnels salariés, sous la forme d’un contrat de travail à durée déterminée spécifique. Les revenus versés aux sportifs de haut niveau seraient ainsi officialisés et ce contrat leur permettrait de bénéficier de la protection sociale offerte par le régime général de la Sécurité Sociale. Le législateur validerait, ce faisant, les décisions récentes rendues par la Cour de Cassation (voir notamment Cour de Cassation – Chambre sociale – 17/12/2014) remettant en cause le contrat de travail à durée déterminée dit d’usage, au sein du sport professionnel, qui dominait jusqu’alors. La Haute juridiction refuse, en effet, depuis plusieurs années, son caractère impératif prévu par voie conventionnelle et rejette les éléments justificatifs de «l’aléa sportif et du résultat des compétitions», jusqu’alors avancés pour sécuriser le contrat d’usage. Dépourvu de toute faculté de recourir à un contrat à durée déterminée spécifique, il devenait urgent pour le monde sportif de se doter d’un contrat adapté. La proposition de loi a d’ores et déjà été adoptée à l’unanimité au début du mois de juin par les députés, elle sera examinée ce mois-ci au Sénat, dans la perspective d’une entrée en vigueur avant la fin de l’année 2015.
viviane.gelles.avocat au barreau de Lille