Défaillances d’entreprises : une situation sensiblement dégradée ces derniers mois
Envolée du nombre d’entreprises en difficulté et ralentissement des créations d’entreprises : le tissus entrepreneurial français a souffert au cours du premier semestre 2023, confirme le dernier baromètre du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce.
Le baromètre national des entreprises élaboré par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (CNGT) et l’institut d’études économiques Xerfi Spécific témoigne, pour le premier semestre 2023, d’un net essoufflement. Même si ces données issues de l’analyse des informations enregistrées au Registre du commerce et des sociétés ont pu être affectées par les dysfonctionnements du Guichet unique, surtout sur le volet créations, elles traduisent une nette dégradation de la situation globale des entreprises en France. Les premiers signes de remontée des défaillances observés en 2022 se sont confirmés et amplifiés ces derniers mois.
Ralentissement du nombre des créations d’entreprises
Avec un peu plus de 276 000 entreprises créées entre janvier et juin 2023, le dynamisme entrepreneurial français semble commencer à s’essouffler : un chiffre qui témoigne d’une baisse de 9 % comparé au premier semestre 2022. « Le rythme des créations se situe bien en dessous du niveau de l’an dernier et se rapproche de ses standards d’avant pandémie », précise le Conseil national dans la restitution du baromètre. Les nouvelles entreprises individuelles, qui ont fortement contribué à l’augmentation des créations depuis trois ans, ont reculé dans les mêmes proportions (- 8 %), au premier semestre.
Envolée du nombre d’entreprises en difficulté
Avec 25 000 ouvertures de procédure collective enregistrées au cours des six premiers mois de 2023, le nombre total d’entreprises en difficulté a bondi de 39 % par rapport au premier semestre 2022 et de 8 % comparé à la même période de 2019 (avant la crise sanitaire). « Dans un contexte de stagflation rampante, la résistance du tissu entrepreneurial face aux crises semble définitivement entamée », estiment les greffiers des tribunaux de commerce. Et « au vu des prévisions macroéconomiques assez pessimistes, il est à craindre que la sinistralité globale ne s’accentue en seconde partie d’année, surtout dans les secteurs les plus exposés à la baisse de la demande des particuliers,
et dont la trésorerie a été la plus fragilisée par l’inflation des derniers mois ».
L’hébergement-restauration, l’immobilier et le commerce à la peine
Le nombre de procédures collectives ouvertes au premier semestre 2023 a augmenté de 56 % dans l’hébergement-restauration (secteurs qui avaient bénéficié de nombreuses aides publiques durant la crise sanitaire), de 54 % dans l’information-communication (du fait de la disparition de nombreuses microentreprises créées pendant la pandémie), de 42 % pour l’industrie extractive et manufacturière (hausse du coût des intrants et pression des clients sur les tarifs) et de 38% dans la construction (impact du retournement des marchés immobiliers et du recul des permis de construire).
En parallèle, le nombre de liquidations judiciaires ouvertes au premier semestre a enregistré une hausse de 36% à un an d’intervalle. Les secteurs qui ont le plus souffert sont l’immobilier (+92 % de liquidations d’agences immobilières) et le commerce (+70% de liquidations pour la restauration rapide, +65% pour le commerce de détail d’habillement et +47% pour la boulangerie-pâtisserie). A noter : si les liquidations judiciaires représentent plus des trois quarts des jugements de procédures collectives, le nombre de redressements judiciaires et de procédures de sauvegarde ont respectivement augmenté de 54% et 51%, par rapport à la même période de l’an passé.
Une tendance générale avec des disparités régionales
Aucun territoire n’échappe à cette dégradation de la situation des entreprises ces derniers mois. Mais certaines régions ont été moins durement affectées que d’autres par la hausse des ouvertures de procédures collectives depuis le début de l’année. C’est le cas, des Hauts-de-France et du Grand Est (+25% chacune, hors Alsace et Moselle), de la Bourgogne Franche-Comté et de la Provence-Alpes-Côte-D’azur (+32,4 %). L’augmentation du nombre d’entreprises en difficulté a en revanche été plus forte : dans le Centre-Val de Loire et l’Île-de-France (plus de 40%), la Nouvelle Aquitaine, l’Occitanie et la Normandie (plus de 45 %).
L’âge moyen des entreprises en difficulté continue globalement de diminuer
L’âge moyen des entreprises soumises à une ouverture de procédure collective ce premier semestre est de 8,4 ans, soit cinq mois de moins qu’au cours de la même période de 2022. Cette tendance n’est toutefois pas homogène : si l’âge moyen des entreprises en difficulté augmente dans l’hébergement-restauration, il diminue dans le secteur immobilier où ce sont les structures les plus jeunes qui sont davantage exposées au ralentissement de l’activité.
Les demandes d’entretien spontanées ont doublé par rapport à l’an passé
« L’essentiel des ouvertures de procédure, à l’issue du mois de juin 2023, s’effectue par convocation suite à des informations internes (78%). Les demandes d’entretien spontanées représentent 24% de l’ensemble des dossiers de prévention étudiés, une part deux fois plus élevée qu’en 2022 et en progression encore plus soutenue comparativement aux années passées », souligne le baromètre. Dans la grande majorité des cas, l’étude du dossier débouche sur une ouverture de procédure collective. « Les ouvertures de mandat ad hoc ou de conciliation pèsent respectivement plus de 20% et de 25% des procédures en cours en 2023. »