Une reprise propice à undéveloppement à l’export
Spécialisée dans la pose, la motorisation, l’automatisation et la maintenance de valves industrielles pour le gaz et le pétrole, Sarasin Actor est depuis 2 ans dans les mains d’un ingénieur champenois. Michel Legras a su surmonter bien des vicissitudes face à un cédant perpétuellement hésitant. Mais la solidité de la société et ses excellentes perspectives de développement à l’export ont justifié cette patience. 2012 s’annonce d’ailleurs prometteuse.
Quels sont votre formation et votre parcours professionnel avant cette reprise ?
J’ai 48 ans, je suis ingénieur en mécanique originaire de Champagne. Arrivé ici en 2000, j’ai occupé plusieurs postes dans une PME importante de la métropole jusqu’en 2008-2009. Depuis plusieurs années, je songeais à voler de mes propres ailes, à créer mon activité. A 45 ans, je me suis dit que c’était le moment.
Quel a été le facteur déclenchant votre volonté de reprendre une entreprise ?
J’ai examiné les deux possibilités, créer ou reprendre. Par exemple, je suis allé dans un incubateur pendant ma période de formation à la reprise, j’ai fréquenté de jeunes créateurs, bref j’ai vu du monde, j’ai pesé le pour et le contre. La reprise m’a semblé à la fois assez complexe mais aussi la mieux adaptée à mon âge et ma situation professionnelle. De plus, avec mes partenaires, en particulier de l’IRD, j’ai rapidement identifié plus d’une dizaine de possibilités de reprises à 80% situées dans cette région, les autres en région parisienne ou dans l’Ouest. C’est d’ailleurs en activant ses réseaux que l’on parvient à cela, c’est une très bonne chose que de multiplier les possibilités de choix. Il ne faut pas hésiter à mettre tout le monde à contribution, les banques et leurs services, les experts comptables, Internet et ses contacts directs. J’ai constamment eu, même dans la phase finale de la reprise, plusieurs autres possibilités que celle que j’ai choisie, pratiquement jusqu’à la signature le 23 septembre 2009, et cela a failli me rendre service. Bref, au fil du temps, on se fait à l’idée de reprendre et on abandonne celle de la création, parce que les entreprises à reprendre sont, elles, bien réelles et disponibles.
Quelles actions avez-vous menées dans votre carrière pour vous faire penser que vous étiez capable de reprendre une entreprise ?
J’ai fait un bilan professionnel complet et j’ai constaté que j’avais des atouts : du vécu dans ces métiers pointus, une bonne connaissance du travail avec les grands groupes français et une solide expérience à l’international, que je naviguais bien dans les questions de finance et de gestion et que je savais manager, en particulier des équipes. Et comme je connaissais beaucoup de monde, je pouvais me lancer dans cette aventure, fort du soutien des miens.
Combien de temps s’est passé entre l’idée et sa concrétisation ?
Treize mois. Je m’étais donné un an. Six mois pour trouver l’entreprise, six autres pour mener l’opération, j’étais dégagé de mon précédent contrat, j’étais donc libre d’agir à ma guise et d’écrire un cahier des charges précis. A savoir qu’il me fallait une société dans la moitié Nord de la France, disons au dessus de la Loire, entre 10 et 50 personnes, dans l’industrie B to B, donc surtout pas de clientèle de particuliers, demandant un minimum de compétences techniques pointues. Rapidement, j’ai eu une vingtaine de dossiers Michel Gras lors d un voyage en Extrême Orient à traiter. L’intérêt d’en avoir autant est de mieux cerner dans toutes ces sociétés, celles qui répondent bien aux critères recherchés, les types d’organisation interne et les risques encourus. J’ai vu beaucoup d’entreprises peu ou pas structurées. Les échanges avec mes partenaires ont joué leur rôle à fond. C’est ainsi que l’IRD et un fonds d’investissement ont, comme moi, estimé que Sarasin Actor était la mieux placée.
Quels ont été les facteurs prépondérants dans le choix de l’entreprise choisie ?
Elle semblait avoir les faveurs de pas mal de mes partenaires. Ce n’était pas une affaire qui battait de l’aile bien au contraire, en fait elle ne souffrait que d’une chose, de l’indécision de son créateur à se résoudre à la céder, et je le comprends…Je veux dire qu’à sa place j’aurais aussi réfléchi longuement. Au moment où il a fini par vendre, elle faisait un CA de 5 M€ et avait progressé en un an de +1, 3 M€. De plus, M.Retailleau était jeune, il avait créé son groupe de PME autour de Sarasin Actor, et ses collaborateurs lui conseillaient de se recentrer sur l’activité de filtration industrielle et de céder l’autre que j’ai rachetée. Cette niche existe encore puisque sa société est juste à côté de la mienne dans les anciens locaux. Il avait, comme aujourd’hui, des débouchés de première importance avec GDF, Total etc. Elle avait une excellente notoriété et financièrement, elle était en bonne santé, bref, difficile de trouver une faille, et en plus il m’est apparu qu’elle pouvait facilement progresser à l’export. Les premiers bilans qui m’ont été communiqués, parfois avec quelques difficultés, ont confirmé tout cela. Au fil du temps, les autres entreprises ciblées se sont évanouies, Sarasin Actor est restée, mais jusqu’au dernier jour, tout pouvait encore capoter.
Quels ont été vos partenaires durant cette reprise ?
Les cabinets d’avocats Thèmes et Sudara, les experts comptables In Extenso et Philippe Thélu, le spécialiste de la transmission JP.Nuns, voilà pour mon équipe. Il y a eu aussi le réseau Entreprendre, Nord Transmission du groupe IRD, Total Développement, enfin Oséo et la Caisse des Dépôts via FSI Régions.
Sur quels critères avez-vous estimé la valorisation de l’entreprise ?
Sur un résultat d’exploitation moyen courant sur plusieurs années. C’était une bonne entreprise, saine, les audits l’ont confirmé mais un peu chère quand-même.
Au final, comment avez-vous trouvé l’entreprise ? Avez-vous été surpris par certains points ?
Ses points forts, c’était sa santé, son savoir-faire, sa notoriété et sa structure solide. Ses points faibles, son coût, des produits parfois à faible marge, une notoriété réelle mais auprès d’acteurs de petit calibre et un besoin non satisfait de diversification de l’activité. Il faut dire que ce genre d’industrie est peu propice aux bouleversements soudains parce que le plus dur est de se faire référencer pour ensuite aller sur le marché, fort d’une validation professionnelle universellement reconnue. Et puis pour être juste, il faut ajouter qu’en 2009, la crise est arrivée et que l’on doit juger la situation finale de Sarasin Actor à la lumière de cette période délicate. Au bout du compte, elle était séduisante : le métier à pratiquer est intéressant, elle peut se développer, elle était accessible financièrement et sa taille correspondait à ce que je voulais.
Quels ont été les meilleurs et les plus mauvais moments de cette reprise ?
Le meilleur ? La signature après pas mal d’hésitations de part et d’autre. Le plus mauvais ? L’arrivée de la crise juste après que j’ai rachetée. Mais la transmission elle-même n’a pas été de tout repos. Il a fallu du temps pour affiner les données chiffrées, je n’ai rencontré le personnel d’une vingtaine de personnes dont 50% de techniciens à l’atelier, que très tard, tant que rien n’était signé, pas question de voir mes futurs collaborateurs…Je trouve que c’est un handicap pour le repreneur et le personnel qui est toujours angoissé quand il sait que la société est en cours de cession. Et entre les cabinets, les discussions ont été animées surtout en raison de diverses garanties qui n’étaient pas assurées. Le vendeur a hésité pendant 4 mois d’affilée. Les financements ont été durs à monter à cause des vacances d’été. A ce retard se sont ajoutées la crise naissante et les tergiversations du vendeur.
Quels sont les projets pour Sarasin Actor ?
Il y a eu les projets juste après l’achat et ceux d’aujourd’hui. L’avantage, c’est que j’ai deux ans et demi de vécu derrière moi et que je peux mieux analyser les capacités de l’entreprise maintenant. Juste après la cession, j’ai surtout du régir à la crise. On a perdu 15% de CA en 2011 alors que j’avais prévu une croissance de +15 à 20% par an à partir d’un CA sortant de 5 M€. Imaginez-vous la déception ! Deux ans de perdus… Et comme il a fallu investir en machines et véhicules en 2001, il n’y avait qu’une seule solution, aller en clientèle et ramener des marchés moi-même. La crise s’est matérialisée par une chute de la commande et des marges. Dieu merci, les banques ne nous ont pas lâchés. Auparavant, j’avais renforcé le Bureau d’Etudes, coeur de l’activité, ainsi que la gestion des affaires. C’est-à-dire que notre niche consiste à concevoir et assembler des ensembles, ce qui prend des mois. Comme les grosses pièces viennent de l’étranger, cela allonge encore le temps et le client, lui, risque de s’impatienter. Il faut donc raccourcir les délais au maximum et offrir en permanence de la valeur ajoutée. Car la concurrence est rude et faite de grandes sociétés puissantes. Une PME comme nous doit offrir un “plus” pour séduire le client. Je suis donc allé dynamiser nos marchés étrangers et la réponse a été bonne en Afrique noire. Car il faut aussi se faire certifier par un client pour obtenir le droit de vendre dans le monde entier. Le marché français est, lui, resté atone. Là-dessus arrive 2012 qui s’annonce subitement très intéressant, on le voit aux commandes qui reviennent à un rythme soutenu. Notre marché, ce sont les pays producteurs de gaz et de pétrole et nos débouchés, ce sont des mastodontes comme Total et GDF qui ont leurs fournisseurs avec qui ils nous mettent en concurrence en permanence. Donc il nous faut jouer finement le coup. D’une part nous jouons la carte de la qualité tous azimuts, tant pis pour les prix. Car Entreprise : Sarasin Actor Statut : SAS CA : 4,3 M€ Effectif : 25 Dirigeant : Michel Gras Création : juin 1996 Implantation : Wambrechies Web : www.actor.fr Siret : 407 791 110 000 31 NAF : 2814 z INFOS CLéS Les ateliers de Wambrechies commencent à avoir un peu de mal à tout contenir… dans nos professions, la sécurité et la fiabilité sont primordiales dans le produit et le service. D’autre part, il faut fournir des “plus” comme le remplacement régulier du matériel par exemple. C’est une exigence d’ingénierie en revolving faute de quoi on perd le marché. Et comme le client est luimême dans l’urgence, il ne faut pas relâcher son effort. Ainsi allons-nous encore intensifier l’extension à l’export vers les pays producteurs.
Auriez-vous 3 conseils à donner à un candidat repreneur ?
Se faire bien entourer, par des cabinets par exemple. Bien réfléchir sur la cible via un bon cahier des charges. Se poser la question de savoir ce que je veux faire en définitive. Enfin, multiplier les contacts pour déterminer la bonne cible.