Une année stationnaire au tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer
Le tribunal de commerce de la Côte d’Opale et de l’Audomarois ouvrait la nouvelle année judiciaire le 21 janvier dernier, à Boulogne-sur-Mer, devant la communauté judiciaire rassemblée et parfois venue de loin. L’occasion de tirer un bilan de l’année dernière et de dresser quelques perspectives pour 2025. Compte-rendu.
La salle était pleine ce 21 janvier au tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer à l'occasion de l'audience solennelle, qui marque traditionnellement le début de l'année. À la sonnerie qui donne le top départ pour l’entrée des juges consulaires, de nouvelles figures ont fait leur apparition.
En effet, le 11 octobre dernier, le président Max Hénaux a laissé la place à Jean-Pierre Braure. Six nouveaux juges ont aussi été «recrutés» et ont prêté serment en novembre dernier. Parmi eux, trois femmes, dont la présidente de Calaisis Initiative et ex-cadre de la Banque de France Françoise Wheatley. À noter également l’entrée de Benoît Potterie, l’ancien député Horizon et ex-juge consulaire à Saint-Omer.
Créations d'entreprises en hausse
Le président Braure a commenté les chiffres annuels 2024 et souligné «la stabilité de l’ouverture de procédures collectives, qui interpelle» : 331 contre 332 en 2023 alors qu’au niveau national, la hausse est de 18%… Une stabilité à mettre selon lui - et c'est paradoxal -, sur le compte des inondations… «L’action de l’État, les interventions rapides des assurances, des Urssaf, ont freiné les défaillances», selon le président. Il faut ajouter à cela le fait que le niveau d’activité général est resté bas et a donc subi moins de soubresauts. Le nombre de contentieux est également en hausse de 4%, tandis que leur durée moyenne est passée de 380 à 353 jours. Le stock des affaires en cours est lui aussi à la baisse. Au registre des créations, la juridiction consulaire affiche une hausse générale de 6% (3 396 sociétés) dans laquelle les commerçants sont à + 11% (pour 1 446 entreprises), les agents commerciaux à + 9%, les sociétés civiles à + 6%. Seules les sociétés commerciales déclinent de 4%.
Nouvelles compétences, nouvelle organisation
L’année 2024 a vu la préparation d’une expérimentation législative : celle des Tribunaux des affaires économiques (TAE), nouveau nom donné aux tribunaux de commerce dans 12 juridictions pilotes en France depuis le 1er janvier dernier. À droit constant, ses compétences s’élargissent désormais sur toute activité économique. «Les TAE absorbent les tribunaux de commerces spécifiques, mais pas les professions réglementées. Avec les mêmes juges, les mêmes locaux», précise le vice-procureur Philippe Sabatier.
Autre velléité de simplification «louable mais qui a dysfonctionné» dixit le président Braure, la porte d’entrée des créations d’entreprises, prise au Greffe, et donnée à l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI). La plateforme mise en place collectionne, depuis, les problèmes, et a même contribué à dissuader quelques créateurs. «Le chef d’entreprise n’a pas été mis au centre de cette réforme», a estimé Jean-Pierre Braure. Le président a plaidé pour un tribunal plus accessible, plus marqué sur la prévention : «13% des entreprises viennent de leur propre chef ; 70% des procédures sont des liquidations judiciaires mais 80% des entreprises qui viennent dans la prévention s’en sortent». Le tribunal se veut aussi plus moderne, avec l’arrivée de la signature électronique.
Au rayon des sujets qui fâchent, le dépôt des comptes sociaux concerne encore 13% des entreprises du périmètre. «C’est parfois un vecteur de blanchiment ou de financement du terrorisme», a soulevé le président. Pour accompagner les chefs d’entreprises, le tribunal a mis en place des sentinelles de la prévention et vise à en disposer de 300 dans les trois prochaines années. Enfin, et comme souvent, il a été rappelé combien était grand le fossé entre le droit et le chef d’entreprise.