Un nouveau président de l'UMIH dans le Calaisis
Successeur de Pierre Nouchi, parti à l'UMIH du Pas-de-Calais, Hervé Lefebvre est le nouveau président de l'UMIH du Calaisis depuis le 13 mars. L'occasion d'échanger autour des perspectives d'avenir du syndicat patronal hôtelier dans le Calaisis et alentour, qui s'annoncent plus heureuses que l'an dernier...
La Gazette. Les enjeux de l’hôtellerie et de la restauration dans le Calaisis sont nombreux et de nombreux défis attendent le secteur. Quelles sont vos priorités ?
Hervé Lefebvre. Il y a d’énormes dossiers. Le tourisme évolue, il ne consomme plus exclusivement à l’intérieur du Calaisis, il concerne beaucoup plus les alentours du Calaisis. Je veux donner plus d’appui aux gîtes et à la restauration traditionnelle, qui ont autant de droits que les restaurateurs, hôteliers, discothèques et cafetiers à l’intérieur du Calaisis. Le bureau a été élargi : auparavant nous étions six, maintenant, nous sommes quatorze. Chaque ville autour du Calaisis a un représentant. Deuxième dossier important, la e-réputation. Trip advisor, Booking.com, Google, Facebook donnent une note à l’établissement, c’est incontournable. Qu’on le veuille ou pas, trois clients sur cinq regardent ces avis de clients avant d’aller dans un établissement. Il y a également un projet qui veut mettre la vérification des contrôles vétérinaires sur notre porte. Je suis pour la transparence, mais il faut en analyser les conséquences. Vous imaginez voir un commerce où le contrôle s’est fait à 100% sans problème ? Je n’en connais pas beaucoup. Une bactérie sur les joints, une trace de graisse peut amener à une baisse de la note. La notification à la porte de ces contrôles nous desservira plutôt qu’autre chose… Air BnB et ce type de plate-formes de location privées constituent elles aussi un grand enjeu pour l’UMIH. On n’est pas contre, mais qu’ils aient les mêmes réglementations que nous, à commencer par la taxe de séjour, qui est intégralement reversée aux offices de tourisme territoriaux. Cela aiderait à amener plus de touristes chez nous. Il suffit pour récupérer cette taxe de séjour de faire en sorte que la taxe soit prélevée à chaque réservation. Un autre grand point, à Calais, concerne les animations vivantes dans les bars et cafés. Il y a une réglementation qui tolère jusqu’à six animations vivantes par an dans ce type de lieu.
C’est assez flou, peu de monde comprend vraiment le fond de cette réglementation, entre les lois autour du bruit, autour de l’organisation de ces soirées, du statut du lieu, les licences, la SACEM, la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles, ndlr)… Il y a eu beaucoup d’agitation autour de ces réglementations. Comment allez-vous aider vos adhérents à y voir plus clair ?
À l’heure d’aujourd’hui, c’est bien structuré. Mais il faut bien interpréter. On a eu une grande tolérance tant qu’on n’avait pas de plainte de voisinage, de consommateurs, de bruit, d’alcoolémie ou de dépassement d’horaires. On a toujours eu en face de nous une volonté de laisser vivre la culture. C’est un palier pour ces groupes avant d’arriver sur une grande scène. Mais ces groupes, il leur faut des indemnités, être en sécurité dans un endroit de grande concentration du public. Il faut être formé à ça. C’est pourquoi l’UMIH lance une formation, grâce à laquelle les entrepreneurs pourront demander à la DRAC de leur délivrer une licence d’entrepreneurs du spectacle pour organiser des événements. En une journée, nous avons reçu cinq candidatures pour cette formation (qui nécessite cinq personnes pour pouvoir être lancée). Ce type de formation est censé se dérouler à Paris. Là, ils vont venir pour la délivrer. C’est dans l’ADN des cafetiers d’organiser ce type d’événements, ça fait venir des clients. Mais on a eu tellement de tolérance jusqu’à aujourd’hui qu’on a eu l’accident du Cuba Libre en août dernier, qui a fait 14 morts et a fait réagir l’État. Chaque commune a l’obligation d’aller voir les établissements qui font des animations : est-ce qu’ils ont à ce jour une autorisation pour faire des animations vivantes et est-ce que, réglementairement parlant, ils ont une sécurité digne d’un établissement recevant du public (ERP) de 5e catégorie ? C’est pourquoi ils ont lancé une campagne de sécurisation électrique, des extincteurs, des sorties de secours…
La volonté du gouvernement était donc de lancer une campagne de sécurisation.Mais d’où est partie la confusion ?
L’UMIH a interpellé Mme le maire, le sous-préfet et la police sur ces points : on est tout à fait d’accord pour avoir ce type de contrôle. C’est la façon de faire qui a été très mauvaise à mon sens. Quand vous avez quatorze à quinze fonctionnaires de police en tenue qui rentrent dans un petit établissement dans la nuit de vendredi à samedi, qui est une des deux plus belles soirées, en demandant de couper la musique pour un contrôle d’une heure, c’est difficile pour le commerce et ça nous fait perdre en crédibilité vis-à-vis de nos clients. Qu’ils viennent, nous sommes d’accord. Mais soit ils viennent en civil pour contrôler l’alcoolémie des clients ou la présence de mineurs, soit ils viennent à un autre moment en uniforme pour contrôler la sécurité ou pour demander les baux et la licence IV…
L’année écoulée a été plus difficile pour l’économie calaisienne, notamment avec la crise migratoire, largement relayée par nos confrères… Comment l’hôtellerie calaisienne a-t-elle vécu cette période ?
2015 avait déjà été perturbée par de conflits sociaux à MyFerryLink, donc je vais prendre les références 2014… Le sentiment d’insécurité dans la ville, dû à l’incurie de l’Etat qui a tardé à intervenir pour la sécurité des migrants et des habitants, a fait baisser la fréquentation. La saison n’a pas été optimale non plus en ce qui concerne la météo. Tous ces facteurs ont été défavorables en 2016. On a quand même sauvé les meubles grâce à une clientèle locale assidue, mais il y a eu une baiss, dans le secteur de la restauration entre 7 et 10%. Une baisse de 20% a été observée à la plage, à Calais-Nord et sur l’artère principale de Calais-Centre. Les cafetiers ont moins souffert – entre -5 et -8% de baisse de fréquentation –, mais ils ont dû s’adapter, allonger leur amplitude d’ouverture, ouvrir plus souvent, investir dans des soirées, pas uniquement vivantes d’ailleurs. L’hôtellerie, quant à elle, en mettant à part ceux qui hébergeaient les forces de l’ordre (ce qui n’est pas leur vocation première), c’était très, très difficile. Ils ont eu des taux d’occupation en forte baisse, de l’ordre de 10% et plus. On a eu des aides, même s’il fallait remplir des dossiers attestant d’une baisse du chiffre d’affaires sur cette période. Au départ, cette baisse de chiffre d’affaires devait être de 30%, l’UMIH a réussi à faire baisser ce chiffre à 15%. Depuis le mois d’octobre et le démantèlement, et grâce aux médias, les Anglais se sont réapproprié la côte, les Belges ont repris leurs bonnes habitudes : la Côte d’Opale est un peu leur Côte d’Azur. On n’a pas fini de reconquérir les touristes. La Ville de Calais investit énormément, avec “Calais anime l’été”, avec le dragon Long Ma qui a parcouru les rues, avec la parade de Noël qui a amené des milliers de personnes. La Ville, aujourd’hui, ne lâche rien, elle continue à travailler sur le tourisme, la culture, l’animation de la ville et son économie. En réponse, à nous de nous investir dans ces événements. À nous d’être bons, en langues notamment, en anglais et en néerlandais. À nous aussi d’aller voir la CCI pour une assistance autour de nos commerces. L’évolution est encore timide, mais ça devient bon. À titre personnel, je vois la différence. L’an dernier, j’ai dû me séparer de cinq employés…
De quel œil voyez-vous les travaux de la Ville, comme par exemple sur le front de mer ou le projet Heroic Land ? Pensez-vous qu’ils pourraient revitaliser l’économie touristique à Calais ?
Les travaux vont apporter un vrai plus, dans la continuité de ce qui a déjà été fait. Il nous manque juste quelques places de parking à Calais-Nord. Pour ce qui est de la plage, la métamorphose est phénoménale. Avec de nouvelles routes, l’ensemble est cependant très axé sur les piétons, avec des mobiliers urbains très valorisants. Pour le projet Heroic Land, c’est plutôt neutre. J’ai assisté aux réunions publiques, pour ce qui est de notre secteur d’activité on n’est pas très imprégnés dedans. Ça va créer des emplois, mais on sait qu’en retour direct, ça va être compliqué. Les gens qui vont dans de grands parcs d’attractions ne vont pas dans les villes et villages à côté, ou rarement… A nous d’être bons et de convoiter la clientèle qui ira se divertir au parc d’attractions. Notre force, c’est la restauration traditionnelle, reconnue, pour certains inscrits au Guide Michelin. Nous savons travailler les produits locaux et c’est ça qui nous sert.