Transition écologique : qui va payer ?
Patronats italien, allemand, français... Les trois, qui revendiquent 50% du PIB européen, soulèvent une même question, celle du financement de la transition écologique.
«Nous partageons les mêmes problèmes et les mêmes opportunités», expliquait Carlo Bonomi, président de la Confindustria, l'équivalent du Medef en Italie, le 10 novembre, à Paris. Ce jour là, les représentants des trois syndicats patronaux, italien (Confindustria), français (Medef) et allemand (BDI) tenaient une conférence de presse, au terme de la troisième édition de leur sommet trilatéral. Parmi les sujets évoqués, la transition écologique tenait une large place, avec une même position largement partagée par les trois dirigeants. A commencer par la reconnaissance du Green Deal adopté par Commission européenne en juillet dernier, qui vise à rendre l'Europe climatiquement neutre à horizon 2050.
Mais la question du financement de la transition écologique inquiète les représentants patronaux. «Il existe un consensus sur le fait que la transition écologique coûte très cher», rappelle Geoffroy Roux de Bézieux. Pour la seule Allemagne, par exemple, obtenir la neutralité carbone en 2045 nécessiterait plus de 860 milliards d’euros, soit près de 100 milliards par an, d'après une étude du Boston Consulting Group . Mais qui va payer ? Ce sujet constitue «l'angle mort de toutes les politiques italienne, allemande et française», estime le président du Medef. Et pour Carlo Bonomi, «nous avons le sentiment que les gouvernements européens n'ont pas le courage de parler clairement (…) et que c'est la fiscalité générale qui va finir par financer la transition. Or, si l'on agit ainsi, nous n'aurons pas les ressources pour financer la croissance».
Admettre toutes les énergies comme vertes
Les représentants patronaux questionnent aussi les modalités d'application du Green deal : ils pointent les dangers d'une prise en compte des seules émissions de carbone, laquelle encouragerait les importations au détriment des productions européennes. Quant à la taxe carbone européenne, elle risque de devenir une «usine à gaz», selon Geoffroy Roux de Bézieux.
Autre thème qui préoccupe, et sur lequel les trois responsables affichent une position commune, contrairement à leurs gouvernements respectifs : celui de la taxonomie verte, la liste des énergies considérées comme vertueuses pour le climat, et comme telles, éligibles aux ressources de la finance verte, que la Commission Européenne doit proposer d'ici la fin de l'année. Un sujet sur lequel s'opposent France et Allemagne, qui défendent leurs énergies traditionnelles (nucléaire pour la première, gaz pour la seconde). «Nous ne devrions pas nous disputer, essayer de prouver à nos collègues que l'on dispose de la meilleure solution», estime Siegfried Russwurm, président du BDI. «Le bon compromis consiste à accepter le gaz utilisé par les Allemands et le nucléaire», renchérit Geoffroy Roux de Bézieux.
Le cas de l'Italie est un peu particulier : en 1994, 94% des citoyens y ont voté contre la reprise d'un programme nucléaire, lors d'un référendum, mais l'actuel gouvernement envisage cette hypothèse. Dans le même sens, Carlo Bonomi est loin d'exclure la voie du nucléaire. Et il prône un «reality check» des caractéristiques des différentes énergies, pour établir la taxonomie européenne.