Thomas Desmettre : «L’Uracen aura besoin des entrepreneurs !»

Avec plus de 300 adhérents, l’Uracen Nord-Pas-de-Calais veut négocier deux virages : s’adapter au fil du temps au monde des intercommunalités en conservant ses liens privilégiés avec la commune et d’autres partenaires, et attirer le monde entrepreneurial via le mécénat à encourager.

Thomas Desmettre : «L’Uracen aura besoin des entrepreneurs !»

S.L

Au moment où l’économie sociale et solidaire (ESS) est célébrée, l’Uracen (Union régionale des associations culturelles et éducatives), fait le point sur ses activités et songe à négocier quelques nouveaux virages. Thomas Desmettre, directeur, commente l’actualité.

 

La Gazette. On parle beaucoup d’ESS en ce moment. Quelle place occupez-vous sur cet échiquier et depuis quand ?

Thomas Desmettre. L’Uracen, qui est présidée depuis 2008 par Serge Martin, est l’une de ses composantes historiques de l’ESS. Le lien est très fort et ancien puisque depuis 1965 l’Uracen accompagne la vie des associations culturelles de notre région et leur offre ses services. Aujourd’hui, elle est l’ESS du spectacle aux côtés, par exemple, du CROS (Comité régional olympique et sportif), c’est-à-dire que nous ne vivons que par et pour les réseaux associatifs. Nous rassemblons en 2012 plus de 300 adhérents et 42 communes, entités territoriales prédominantes en ce qui nous concerne, même si les intercommunalités émergent de plus en plus. On a bénéficié en 1989 et 1990 de deux directives portant sur la fiscalité des associations. A savoir qu’enfin, les associations devenaient si elles le désiraient des employeurs. Cela changeait la donne, on passait d’un certain amateurisme à une exigence en compétences. C’est là que l’Uracen a pu pleinement jouer son rôle de pilote, de conseilleuse et surtout de formatrice. Aujourd’hui, en France, il y a près de deux millions d’emplois dans les associations et 16% d’entre elles sont des employeurs à part entière. Notre activité concerne pour un peu moins des trois quarts le Nord mais dans le Pas-de-Calais, ça bouge. Ainsi, avec l’EPCI d’Osartis1 ou encore Bruay-La-Buissière qui viennent de nous rejoindre, démarrons-nous un mouvement qui va dépasser la commune plus souvent qu’avant.

 

Celle-ci reste votre collaboratrice privilégiée ?

 C’est effectivement à son échelle que se mesurent la plupart des activités des membres associatifs2 qui sont chez nous. Donc, tout est lié puisque nous nous adressions d’abord à des territoires à valoriser et la commune en est l’âme. La communauté d’agglomération est à une taille plus vaste. Mais nous sommes présents aux forums intercommunaux d’associations comme à Lens ou Arras récemment. Mais, au-delà de ces questions territoriales, l’important est plutôt de retenir que notre “tiercé gagnant” est d’assurer l’autonomie de notre gestion, la mobilité (c’est-à-dire se faire connaître là où c’est bénéfique) et enfin de communiquer avec les élus.

 

Comment les associations vous perçoivent-elles ?

 Il existe plusieurs types de motivations dans la volonté d’adhérer chez nous. Nous sommes une sorte de gare de triage, alors certaines associations adhèrent préventivement. Ça me sera utile un de ces jours se dit-on, et c’est vrai statistiquement. Souvent une tuile tombe sur la tête du président et il faut alors la compétence de l’Uracen pour réparer les dégâts. C’est rentable puisque nous pratiquons l’accompagnement de longue durée. Puis il y a celles qui ont du mal à voir clair dans leur situation. On leur ouvre les yeux sur plusieurs réalités. Les comportements, la gestion, le back office, les dossiers financiers, la fiscalité, les conventions, les plans de communication, comment négocier un soudain développement… Bref, ça part dans tous les sens mais nous, on apporte un regard extérieur et des compétences et on vise toutes les tailles d’associations , il n’y a aucun ghetto.

 

Cette diversité engendre-t-elle une méthodologie adaptée ?

 Absolument ! L’Uracen a dû créer un outil personnalisé, surtout dans les formations, mais nous avons aussi une méthode bien cadrée par sécurité. Nous commençons par examiner le juridique. Par exemple une association veut monter un projet artistique, quelle structure juridique choisir ? On fait un audit, puis on passe au budget puis à la fiscalité, à la diversification des ressources, etc. Enfin, éventuellement une dernière phase : l’association devient employeur, comment gérer ce stress ?  Ensuite seulement vient la diversité de nos formations. C’est aujourd’hui, avec le juridique et le financier, l’axe de travail le plus fort, nous sommes repérés pour ces compétences. Les associations ne peuvent pas s’en sortir uniquement avec Internet. Il faut une intervention humaine. La formation c’est très délicat et il faut en faire de plus en plus. C’est pour cela que ne pas être fédéré à l’Union régionale devient une faute de gestion et d’économie.

 

 

Quels sont vos moyens ?

Les subventions publiques des institutionnels régionaux, les cotisations des adhérents qui sont modulables et les mécènes parmi lesquels le Crédit du Nord, la Macif, des partenariats aussi surtout en matière de formation professionnelle, et surtout la force d’aide des réseaux. Enfin, nous pratiquons le bénévolat dans notre conseil d’administration de 18 membres. Nous comptons une dizaine de membres très actifs et nous recrutons assez régulièrement des compétences mais après examen minutieux car il faut, outre ces compétences, posséder l’esprit Uracen et savoir travailler sur des territoires.

Maintenant, le paysage change un peu. Nous cherchons à étoffer nos partenaires et mécènes du côté des mutuelles, caisses de retraite ou bailleurs sociaux. Disons que nous aimerions aussi nous rapprocher du monde de l’entreprise. On ne nous voit que comme un organisme subventionné. C’est vrai, mais le monde de l’économie doit s’ouvrir et nous rejoindre un jour ou l’autre, via les textes régissant le mécénat. On a déjà des contacts avec des entreprises, on va avancer dans cette nouvelle voie.

 

Si la prochaine mouture de la loi sur la réforme des institutions territoriales faisait que la commune devait quelque peu s’effacer devant l’intercommunalité, cela modifierait-il votre fonctionnement?

On peut s’adapter. Après tout nous avons toujours eu une dimension régionale. Notre vécu s’est toujours nourri de la commune, du département et de la région. Si de nouvelles compétences passent de la commune à l’intercommunalité, cette dernière aura besoin de nous pour adapter son discours et ses moyens. Les EPCI sont en tout cas des garants de la stabilité territoriale en concentrant la proximité, la créativité et l’économie. L’Uracen restera dans le concret et ne se déconnectera pas des territoires quoi qu’ils deviennent.

 

 

Contact : 03 20 63 91 79 − contact@uracen.org

 

 1. Etablissement public de coopération intercommunale situé à la lisière du Douaisis et de l’Arrageois.

 

2 . Les autres partenaires de l’Uracen : CPCA, coordination des mouvements associatifs, qui est une énorme banque de données sur les lois, les débats, les subventions, les projets régionaux… ; France bénévolat (dont Thomas Desmettre est vice-président régional) qui est le Pôle emploi des associations.

 

 

 

 

Encadré

 

 Ecole  des mines de Douai :  Colas lance les “Campus Managers” !

 

Marc Bonpain, nouveau directeur des relations extérieures, notamment avec les entreprises à l’EMD, a sélectionné une quinzaine d’acteurs économiques dont il veut faire de vrais partenaires à long terme dans les activités de recherche, les Mines de Douai étant un centre éminent en la matière. Parmi ces entreprises et acteurs, le groupe français de taille mondiale Colas, plus de 200 écoles dans le monde dans son panel de collaborations, a demandé une année pour bâtir une grande action novatrice dans le cadre d’un accord avec l’EMD. Ayant constaté, statistiques à l’appui, que les élèves ingénieurs douaisiens qu’il avait embauchés se montraient beaucoup plus performants que d’autres et accédaient rapidement à des postes à responsabilité, Colas privilégie ses rapports avec l’EMD et signe pour trois ans un partenariat. Il  s’agit d’une nouveauté, la mise en place de “Campus Managers”, c’est-à-dire trois sélectionnés qui seront des relais entre l’entreprise et l’Ecole. Il y aura ensuite des stages sur chantiers, des conférences et des journées RH à l’Ecole. Colas pilotera alors des élèves dans son stand de 80 m2 et leur dispensera des conseils sur les CV, donnera des informations sur l’actualité des métiers dans les TP, etc. Le tout étant valorisé via la taxe d’apprentissage. Ensuite, place à un bilan annuel. Hervé Le Bouc, PDG de Colas et parrain des nouvelles promotions, a d’ores et déjà signé l’accord avec les Mines de Douai en novembre mais une première action a démarré le 18 octobre. (notre photo).

 

Contact au 03 27 71 20 50 (communication et relations extérieures)

 

 

D.R.

Thomas Desmettre (à gauche), en compagnie du trésorier de l'Uracen.