Somme - produits locaux, du champ à l'assiette des cantines scolaires
Travailler avec des produit locaux et bio dans la restauration collective des collèges, c'est possible. Le département de la Somme le prouve avec sa démarche Somme - produits locaux, initiée en 2013 avec la chambre d'agriculture. Une démarche pionnière dans les Hauts-de-France expliquée par Emmanuel Noiret, conseiller départemental délégué à l'alimentation, la ressource en eau et la stratégie littorale.

Comment est née la démarche Somme Produits Locaux ?
C'était une idée de Christian Manable, alors président du département, et de Daniel Roguet qui présidait la chambre d'agriculture. Ils voulaient intégrer les produits locaux au niveau de la restauration scolaire des collèges. Daniel Roguet avait eu une expérience dans les circuits courts donc c'était du vécu. Il a fallu du temps pour que cela se mette en place. De quelques producteurs au point de départ et le temps que la SAS Somme produits locaux se mette en place, le développement a été assez lent. Une trentaine de producteurs s'y est mis quelques années plus tard pour approvisionner une quinzaine de collèges.
Aujourd'hui, nous avons une centaine de producteurs pour les 50 collèges. Et une plateforme de gestion de commande, aujourd’hui dénommée approlocal.fr depuis sa régionalisation, a été créée en 2013 afin de développer l'approvisionnement en circuit court. Le bouche-à-oreille a fonctionné et les producteurs ont été de plus en plus intéressés. Il s'agit plutôt d'exploitations de taille moyenne qui cherchaient une bouffée d'oxygène et une diversification.
Est-ce que l'opération prouve que le manger local ne coûte pas plus cher ?
Pour moi oui. Les producteurs doivent être dans le rapport de prix attendus parce que c'est encadré, c'est de l'argent public d'une part. Et d'autre part, non, les produits locaux ne sont pas plus chers aujourd'hui que chez certains grossistes parce qu'on limite les intermédiaires. Mais c'est la même logique pour les produits bio chez l'agriculteur local qui ne sont pas plus chers par exemple que ce que vous allez trouver en supermarché et qui viennent souvent de l'étranger.

Est-ce qu'il a fallu convaincre les producteurs comme les chefs de cuisine des collèges du bien-fondé de la démarche ?
Les producteurs sont toujours à la recherche d'expériences qui sortent un peu de l'ordinaire et à partir du moment où ils trouvent un débouché, ils s'y retrouvent. Au total, il y a une cinquantaine de collèges à alimenter donc ce sont des volumes intéressants. Après, qui dit restauration collective dit quelques normes à respecter et un cahier des charges précis. En ce qui concerne les chefs de cuisine des collèges, nous avons deux chefs de cuisine adeptes des produits locaux, Nicolas Ricouart et Emmanuel Vaillant, qui sont allés à leur rencontre. Nous les avons appelés les «locavores», ce sont eux qui prêchent la bonne parole dans les collèges, qui vont voir les producteurs pour se mettre au courant des produits disponibles, qui règlent la logistique et s'intéressent aux cycles de production. Ils gèrent cela avec la direction des collèges et ont pour mission de développer la démarche au maximum, d'aller voir dans les collèges où ça a du mal à décoller, quels sont les problèmes et comment on peut passer au-dessus et faire grandir le dispositif. Nous avons aussi veillé à renouveler les équipements des cuisines afin que les cuisiniers puissent véritablement bien travailler.
Quel bilan tirez-vous de l'opération aujourd'hui ?
Au début de l'actuel mandat, en 2021, l'objectif du département était de tripler les volumes sur le mandat. C'est une chose que nous avons atteinte dès la fin de l'année 2022. Et l'autre objectif, c'est de se rapprocher le plus possible de la loi EGAlim. Nous sommes même plus précis que cette loi qui ne parle pas précisément des produits locaux comme nous on l'entend. Notre objectif est d'atteindre 50% de produits locaux et 20% en bio, dans l'ensemble des collèges. Un collège a atteint ces deux objectifs, c'est celui de Moreuil. Plus globalement, nous arrivons à 1,35 million d'euros d'achats de denrées locales et plus de 300 000 euros de denrées bio en 2024. Et ce sont des repas équilibrés élaborés par une diététicienne. On signale la provenance locale sur les menus et les enfants comme les parents savent de quels producteurs locaux sont issues les denrées.
Quelles ambitions pour la suite ?
Nous aimerions aller chercher les quelques restaurants scolaires qui sont à la traîne. Ça n'est pas forcément qu'il manque de producteurs, il y a parfois des chefs de cuisine qui ne voient pas le sens de la démarche. Nous avons édité un livre de recettes, élaboré par des chefs de restauration scolaire. Cela a été distribué aux enfants également à la rentrée scolaire 2024. Et nous voudrions continuer à nous rapprocher de plus en plus du 100% local. Le département a aussi la volonté de développer la même démarche vers les établissements médico-sociaux, notamment les maisons de retraite, pour faire en sorte que nos aînés aient aussi accès à des produits locaux et de saison. En plus, contrairement aux établissements scolaires où il y a les vacances estivales, ces établissements sont ouverts tous les jours de l'année et cela représente deux repas par jour. Il faut arriver à convaincre que cela puisse se faire avec des coûts qui restent modérés.
En chiffres
- 17 554 kg de viande de bœuf locale en 2024
- 100 producteurs locaux intégrés dans la démarche
- 1,35 million d'euros de denrées locales commandées