Rejugé pour le meurtre d'une postière, Mamadou Diallo clame à nouveau son innocence
Mamadou Diallo, accusé du meurtre d'une postière en 2008, a de nouveau clamé son innocence jeudi à l'ouverture de son procès en appel à Lyon, où des témoins ont rappelé le caractère...
Mamadou Diallo, accusé du meurtre d'une postière en 2008, a de nouveau clamé son innocence jeudi à l'ouverture de son procès en appel à Lyon, où des témoins ont rappelé le caractère "horrible, insoutenable" de la scène de crime.
"Comme je le dis depuis le début, je suis innocent et je n'ai pas tué cette pauvre femme", a déclaré d'une voix posée mais ténue le brancardier de 34 ans, qui comparaît libre un an et demi après avoir été acquitté au bénéfice du doute.
"J'ai reconnu que j'avais pris une liasse de billets" dans un tiroir caisse avant de prendre la fuite, a-t-il concédé, fidèle à sa ligne de défense depuis le début de cette affaire qui a captivé les médias et le public.
Celle-ci a débuté le 19 décembre 2008, quand Catherine Burgod, 41 ans, enceinte et mère de deux enfants, a été retrouvée lardée de 28 coups de couteau dans la petite agence postale qu'elle tenait à Montréal-la-Cluse (Ain).
Quinze ans plus tard, photos, vidéo et témoins ont fait revivre l'horreur de cette scène devant la cour d'assises du Rhône.
C'était "particulièrement horrible, insoutenable, même pour un enquêteur chevronné", a déclaré un ancien gendarme en charge de l'affaire. Une "personne lambda, en ayant cette vision des choses, ne reste pas. Elle est choquée, quitte immédiatement les lieux et donne l'alerte".
"J'ai eu un mouvement de recul immédiat, j'ai eu vraiment un choc", a confirmé une des premières personnes à avoir découvert le corps. D'autres témoins ont indiqué avoir eu la même réaction.
Face aux images, Mamadou Diallo a systématiquement détourné le regard.
Plus grande peur
Le procès avait débuté sur une note plus légère. Lors de l'examen de sa personnalité, Mamadou Diallo a décrit son "enfance normale", se disant proche de sa famille. Marié religieusement, il ne vit plus avec son épouse mais entretient avec elle "de bonnes relations".
Le président Eric Chalbos a ensuite lu les témoignages de proches univoques sur sa "gentillesse" et sa "douceur".
A l'avocat général Eric Mazaud qui lui demandait comment il a vécu le fait de cacher pendant plusieurs années la découverte du corps et le vol, M. Diallo a répondu: "J'ai fait avec. Ma plus grande peur, c'était qu'on m'accuse à tort".
Malgrés ses dénégations, "on a la conviction que M. Diallo est l'auteur du crime", a pourtant affirmé lors d'une suspension d'audience Jean-François Barre, qui représente notamment les enfants de Catherine Burgod.
"La coïncidence qui dit : +Je suis venu, j'ai vu, j'ai pris+ on ne peut pas l'accepter".
Le petit criminel
L'ombre d'un ancien espoir du cinéma a aussi plané sur l'audience.
Au début de l'enquête, les soupçons s'étaient en effet tournés vers Gérald Thomassin, césarisé "meilleur espoir" en 1991 pour son rôle dans "Le petit criminel" de Jacques Doillon, et devenu marginal.
Cet ancien toxicomane, qui vivait près de l'agence postale, avait livré des détails troublants sur la scène de crime et s'était accusé du meurtre, ce qui avait conduit à sa mise en examen et à son placement en détention.
Mais en 2017, le fichier national des empreintes génétiques (FNAEG) avait montré que l'ADN prélevé sur un sac près du corps de la victime était celui de Mamadou Diallo.
Depuis son arrestation le jeune homme maintient la même version: il s'est rendu à l'agence postale, a découvert le corps et est reparti dans la panique en emportant une liasse de billets. Si son ADN a été retrouvé sur le sac, c'est parce qu'il s'est essuyé les mains dessus.
En août 2019, une confrontation avait été organisée entre Mamadou Diallo et Gérald Thomassin mais ce dernier avait disparu avant le rendez-vous et reste depuis introuvable. Il a depuis bénéficié d'un non-lieu.
"Qu'on n'ait pas les aveux c'est une chose, mais il n'y a surtout pas les éléments matériels", a pointé un autre enquêteur, pour expliquer ce non-lieu.
Lors du premier procès, la défense de Mamadou Diallo avait utilisé cette piste pour semer le doute parmi les jurés, qui l'avaient acquitté en avril 2022. Le parquet général avait fait appel.
Il encourt à nouveau la réclusion à perpétuité. Le verdict est attendu le 19 ou le 20 octobre.
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