Régis Gourtet : une mandature sous le signe de l’accompagnement

Depuis le 1er janvier, Régis Gourlet est président de la Compagnie régionale des commissaires aux comptes, du ressort de la cour d’appel de Douai. Changement d’homme, puisqu’il succède à Gauthier Perthame, mais dans la continuité, tous deux étant inscrits au syndicat Experts-comptables et Commissaires aux comptes de France (ECF). Entretien. .

Régis Gourtet : une mandature sous le signe de l’accompagnement
D.R.

Régis Gourlet (à gauche) et Gauthier Perthame.

 

La Gazette. Vous venez d’être élu à la présidence de la Compagnie régionale. Quelle est votre priorité ?

Régis Gourlet. Le métier de commissaire aux comptes est un métier très délicat qui est de plus en plus encadré par des normes, ce qui s’inscrit dans l’évolution bien comprise de notre société. Dans ce cadre, le rôle de la Compagnie est essentiellement d’accompagner ses membres dans ce passage à de nouveaux modes d’exercice. Même si la grande majorité des NEP, normes d’exercice professionnel, ont déjà été publiées, on en est déjà aux mises à jour. Il importe, comme dans toute évolution de profession, d’accompagner tous ceux qui, pour rencontrer une difficulté particulière, sont un peu restés sur la touche. La Compagnie se doit de les aider à se mettre en conformité les nouvelles règles.

Un autre volet de nos préoccupations tient à la relative restriction du marché du commissariat aux comptes par rapport au marché de l’expertise comptable. Il n’est pas toujours évident pour de jeunes confrères qui débutent dans la profession d’obtenir un mandat de commissariat. Il est même parfois difficile pour d’autres de conserver l’inscription à la Compagnie faute de mandats suffisants pour avoir une activité rentable en commissariat. C’est ce souci d’accompagnement que nous voudrions mener pendant la mandature.

 

Quel est le poids du commissariat aux comptes dans la région ?

 La Compagnie recense 596 commissaires aux comptes pour un total de quelque 10 300 mandats. La moyenne de mandats par commissaire n’est pas énorme − de l’ordre d’une quinzaine −, mais avec des extrêmes conséquents selon la taille des cabinets. La Compagnie est dans la moyenne nationale. Avec 14/15 mandats, il est difficile de ne vivre que du commissariat aux comptes qui demeure une activité complémentaire à celle de l’expertise comptable. La plupart des mandats émanent de PME familiales et d’associations. Prendre un mandat de 70 000 € − la moyenne est plutôt de 3 000 à 4 000 € − n’est pas à la portée de tous les cabinets, car il faut savoir éviter la trop grande dépendance économique pour conserver son indépendance d’appréciation et de jugement. Le commissariat aux comptes demeure un métier très individualiste, même si les associations se multiplient. Travailler seul avec quelques collaborateurs limite les choix des mandats. Une norme professionnelle oblige d’ailleurs à réfléchir à l’indépendance financière du cabinet par rapport aux dossiers en charge.

 

Cette volonté d’accompagnement prend-elle d’autres formes ?

Elle se situe aussi au niveau de la formation. Les commissaires aux comptes ont obligation de se former au minimum 20 heures par an en audit avec un quota de formation en audit et non-audit de 120 heures par période de trois ans. Les propositions de formation de la Compagnie se doivent d’être les plus attractives possibles pour non seulement permettre de respecter ces obligations, mais aussi pour orienter vers les démarches déterminées au plan national. Il en a ainsi été récemment avec la norme d’exercice professionnel 9605 relative à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, ou encore avec le focus sur la thématique de la communication avec les dirigeants d’entreprise. La Compagnie régionale s’emploie à relayer sur le terrain ces opérations de formation et d’information via deux vecteurs principaux, une journée de formation complète et dédiée à un thème ou des ‘cinq à sept’, réunions à mi-chemin entre la formation et l’information plutôt sous la forme de conférence sur les points d’actualité et d’innovation. Organisés de quatre à cinq fois l’an, ces cinq à sept sont généralement répliqués trois fois pour couvrir l’ensemble de la région, à Lille, Valenciennes et sur la Côte.

 

Sur la partie professionnelle, quelles sont les attentes ?

Les commissaires aux comptes sont toujours en attente sur la législation européenne. Le Livre vert et ses 1 400 amendements sont toujours en débat, avec deux points principaux d’achoppement très discutés : la rotation, courte ou à 25 ans, des mandats et le co-commissariat, démarche qui est une création française et qui est appréhendée avec intérêt par l’Espagne, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, mais qui n’a pas été reprise dans le rapport Karim remis aux parlementaires européens. Si le calendrier est respecté,  les projets ‘Directive audit’ et de règlement sur les mandats EIP (entité d’intérêt public) pourraient aboutir d’ici la fin 2013. Il y aura là aussi un accompagnement sur les évolutions engendrées.

Parmi les évolutions professionnelles attendues avec grande impatience, il y a aussi les nouveaux marchés qui pourraient s’ouvrir à la profession, à commencer par celui des collectivités territoriales pour lequel une intervention des professionnels du chiffre et de l’audit apparaît comme devoir être souhaitable, mais aussi celui des comités d’entreprise. Pour ce dernier, les textes sont à la signature ministérielle et devraient sortir d’ici la fin de l’année. Dans ce même souci d’assurer au maximum la sécurité financière appuyée par le législateur et dans le prolongement de ce qui est demandé dans le cadre des procédures d’alerte, il serait aussi envisagé de demander aux commissaires aux comptes de se prononcer sur les hypothèses retenues par les entreprises pour établir leurs comptes prévisionnels et sur leurs déclarations en matière de protection environnementale, après recours, si besoin, à des experts pour attester de leur véracité. Ces évolutions s’inscrivent dans une société qui demande de plus en plus à être sécurisée. Pour perdurer, la profession doit suivre ces évolutions. 

Le danger que doit craindre la profession, c’est la disparition des petits cabinets au profit des plus importants, ce qui serait fort dommageable pour la profession. Elle serait de fait moins écoutée (on l’est davantage à 600 qu’à 150), mais surtout elle serait fort préjudiciable à l’intégration des jeunes. Ceux-ci sont tenus d’avoir effectué un minimum de 200 heures d’interventions en audit lors de leur stage dans un cabinet qui obligatoirement fait du commissariat aux comptes. Si le nombre de cabinets assurant les deux métiers de l’expertise et du commissariat diminue, ce seront autant de jeunes qui seront bloqués dans leur formation. Bruxelles avait songé à séparer les deux formations, mais a vite compris qu’il y avait là plus d’avantages que d’inconvénients pour les cabinets.

   

Droit et chiffre font-ils bon ménage ?

Le commissariat aux comptes régional entretient de bonnes relations avec l’expertise comptable et l’objectif est de travailler encore davantage ensemble sur tout ce qui leur est commun et proche. Avec les autres professionnels libéraux du droit et du chiffre, loin des querelles parisiennes qui peuvent se faire jour, sur le terrain régional le travail en commun est réel. Pour preuve, celui effectué avec les CIP, Centres d’information et de prévention des difficultés des entreprises, qui associent experts-comptables/commissaires aux comptes, juges consulaires et avocats. C’est une très bonne synergie de conseils pour les entreprises qui rencontrent des difficultés. A chacun son métier. Tout devient tellement compliqué qu’il n’y a pas intérêt à chasser sur les terres du voisin. On prend déjà suffisamment de risques à bien faire son métier !

Mon ambition, c’est de rendre la profession attractive pour les jeunes, de la conserver attractive pour ceux qui sont en exercice et aussi de la protéger car c’est un métier de responsabilités à risques en  aidant les confrères à bien se former et à effectuer un travail de qualité.

 

 

Le nouveau Conseil régional

Président : Régis Gourlet

Vice-présidents : Régis Gossaert, Gauthier Perthame et Stéphane Dumont

Secrétaire : Hubert Denhez

Trésorier : Valérie Schatteman

Membre du bureau : Christophe Vautrin

Syndic : Jean-Luc Carbonnier et Arnaud Marquet

Contrôle qualité : Patrick Marissiaux

 


«Dans la continuité»

«Je suis ravi que l’équipe en place continue la politique mise en œuvre et initiée par l’équipe précédente», se félicite Gauthier Perthame qui a laissé la présidence du CRCC à Régis Gourlet, en en rappelant les trois axes de développement : «donner plus d’autorité et de reconnaissance à la profession, la faire connaître pour, notamment, attirer les jeunes de talent sur les métiers de l’audit et de la finance, et développer le perfectionnement de l’exercice professionnel».