Quelle est l’astuce pour trouver l’idée qui devient un projet, puis un produit ?

Quelle est l’astuce pour trouver l’idée qui devient un projet, puis un produit ?

Deux experts tentent de répondre à cette question.
«Favoriser le détournement de la pensée…»

 D.R.

Blandine Fraissé est consultante en créativité, dirigeante de Co-Ideas, une start-up spécialiste en animation d’ateliers de créativité en entreprise et intervenante à l’université Lille 1.

 La Gazette. Quelle est l’astuce pour trouver de nouvelles idées ?

Blandine Fraissé. L’astuce ? Il n’y en a pas, excepté pour les génies ou les inventeurs. Pour les autres, c’est d’abord une ouverture d’esprit, la curiosité, le fait de changer son regard sur le quotidien, de sortir du cadre habituel, de lâcher prise et de s’autoriser à diverger. Mon conseil : bloquer sur son agenda une à deux journées au hasard sur l’année pour faire autre chose, sortir de la routine, se laisser surprendre par ce que l’on découvre. Toujours avoir un carnet sur soi pour noter les idées qui viennent à l’esprit, créer son mur d’inspiration avec ce que l’on aime dans la presse, sur Pinterest… Se laisser surprendre.

 Quels contextes ou situations favorisent la créativité ?

Il faut changer de cadre, de lieu. C’est important pour être créatif de créer un climat qui favorise le détournement de la pensée. Ne pas hésiter à trouver des inspirants (images ou objets) et de jouer avec les mots…

 Les meilleures idées naissent par des chemins détournés, affirme-t-on. En avez-vous des exemples ?

Le détournement, c’est lâcher prise, c’est s’autoriser à imaginer, à s’éloigner de la réalité. Le détournement c’est commencer à trouver de nouvelles idées, rebondir ou associer des mots, créer des connexions, modifier l’existant… Des exemples : Dyson,  la WII ou le kitesurf pour l’association des mots.

 Que proposez-vous pour amener les gens à révéler de nouvelles idées ?

La créativité sert à chercher les idées nouvelles, celles que nous n’avons pas. La créativité s’adresse à tous, soit pour créer son entreprise ou développer de nouveaux produits ou services. Bonne nouvelle : nous sommes tous créatifs mais nous ne le savons pas.

Pour chercher de nouvelles idées il faut suivre une démarche avec des étapes à appliquer en groupe. Le collectif est important : il y a plus d’idées dans plusieurs têtes que dans une seule.

Pour animer un groupe, un des points de départ est la formulation du défi ou du challenge. A partir du défi qui doit être enthousiasmant, motivant, les gens vont pouvoir chercher des nouvelles idées à l’aide d’exercices ludiques. En fin de processus, plusieurs groupes d’idées émergent. Une fois les idées trouvées, appelées «pépites», la première grande étape est franchie. Puis, la démarche marketing entre en jeu pour concevoir le projet. Si l’idée n’est pas suffisamment riche, il faut la nourrir, la faire grandir, la tester. La persévérance est une valeur de la créativité, le pouvoir de croire à l’idée, le fameux “eurêka !”.

 Avec tout ce que l’homme a eu à créer depuis les origines et qu’il a exploité économiquement, est-il légitime de se demander s’il reste encore beaucoup de biens économiques à créer ?

Heureusement oui ! Nous le voyons bien aujourd’hui. Nous vivons une grande et belle période de mutation. La révolution numérique crée de nouveaux besoins et se traduit par de nouveaux comportements. Nous avons de nouvelles choses à produire et à inventer. Les chefs d’entreprise savent que c’est dans l’innovation et la créativité que se trouvent les richesses de demain. Cependant, ne pas oublier que toute idée ou innovation répond à un besoin et doit trouver son marché. L’idée doit être «bankable».  

«Partir de l’envie pour aboutir au projet validé»

 D.R.

Didier Gesp anime des ateliers le 15 septembre au salon Créer, autour de la thématique «Comment trouver une idée ?». Il dirige le Campus Audace, structure de formation à la création d’entreprise.

La Gazette. Que proposez-vous au sein de votre structure pour amener à trouver l’idée ?

Didier Gesp. Le concept Audace est assez simple. On s’est dit que ce qui compte le plus c’est l’envie. Le concept part de l’envie pour aboutir au projet validé. Ensuite les «audacieux» rejoignent les structures d’accompagnement (BGE, LMI innovation, Réseau Entreprendre, etc.). Pour passer de l’envie à l’idée, nous avons mis en place plusieurs ateliers de créativité. Il y en a neuf. Le but c’est d’amener les gens à trouver les idées de différentes façons. Nous avons par exemple l’atelier «Révolte». Le but c’est de trouver des solutions positives à ses révoltes. Et ces solutions sont autant d’idées de projet possibles à mener. Nous avons des ateliers de «Savoir-être» et de «Savoir-faire», toujours en mode collectif. Nous mettons en œuvre des techniques d’organisation qui permettent de faire l’adéquation homme-projet, nécessaire à la réussite du projet. Ensuite, nous avons des ateliers qui tournent autour de la personne pour permettre à cette dernière de trouver des idées qui lui ressemblent, des idées de projet qui ne vont pas l’ennuyer et qui répondent à quelque chose de très profond chez elle. Cela peut être des causes humanitaires, altruistes, sportives, orientées vers la technologie, la recherche, etc. Nous avons un atelier appelé «L’art et la manière», qui consiste à analyser les stratégies porteuses dans une localité. Par exemple, en région en ce moment, il est beaucoup question de la troisième révolution industrielle avec Jeremy Rifkin, de TIC, d’économie solidaire, etc.

Nous avons aussi des ateliers plus ludiques de jeu de cartes ou de jeux de posture. A partir d’un projet embryonnaire, on procède à un challenge au moyen de la «phrase métier», un concept fort chez Audace.

 Ces ateliers ont-ils fait leurs preuves ?

Nous totalisons à ce jour 450 «audacieux» formés, dont 70% sont chefs d’entreprise, 21% qui sont retournés au salariat… Notre formation permet d’acquérir une posture entrepreneuriale et une agilité de créativité.

Les possibilités de créer de nouveaux produits économiques sont-elles illimitées ?

En fait, il y aura toujours des besoins chez les hommes. Et il y aura toujours des possibilités de créer des moyens pour satisfaire ces besoins. Il y a des besoins qui ont toujours existé et des besoins qui naissent. Quand vous prenez l’iPhone, aussi extraordinaire qu’il soit, il permet de satisfaire l’un des besoins les plus vieux du monde qui est celui de communiquer, c’est-à-dire recevoir des informations et en émettre. Et puis vous avez de nouveaux besoins qui sont quelquefois moins vitaux, pour lesquels on développe des technologies permettant d’avancer. C’est par exemple le besoin d’aller découvrir ce qu’il y a sur la Lune. Et on a créé la NASA pour cela…