Préserver la biodiversité : contrainte ou opportunité ?
La diminution des colonies d’abeilles par exemple a un impact sur l’activité apicole et pourrait affecter l’agriculture.
Albert Einstein disait que «si l’abeille disparaissait de la surface du globe, l’homme n’aurait plus que quatre années à vivre». Le père de la relativité forçait-il délibérément le trait ? Ce qui est sûr, c’est qu’une telle perspective est encore éloignée… En faisant cette affirmation, Einstein pensait notamment au pouvoir pollinisateur des abeilles sans lequel une partie de l’activité agricole serait considérablement entravée. La Journée de l’Observatoire régional de la biodiversité, le 10 juin dernier, a été l’occasion de faire le point sur la préservation des espèces en Nord-Pas-de-Calais. Emmanuel Cau, vice-président du Conseil régional, évoquait alors «un déficit de pollinisation en région». Il est vrai que certains agriculteurs font venir des abeilles pour polliniser leurs champs (culture sous serre). Mais la question ne semble pas être un sujet de préoccupation majeur dans le secteur. «Même s’il y a de la mortalité d’abeilles, nous n’en manquons pas, affirme Vindicien Delcourt, un agriculteur de Douvrin. C’est plus les apiculteurs, qui constatent ce phénomène de disparition d’abeilles, qui sont inquiets.»
La filière apicole est celle pour laquelle la disparition des abeilles semble avoir le plus d’impact pour la production de miel. «C’est simple : une colonie qui meurt, c’est une colonie qui ne produira pas de miel, indique Lucie Lefebvre, une apicultrice adhérente à d’API Nord. On estime qu’il y a eu 40 à 50% de pertes sur les ruches en métropole lilloise l’hiver dernier. Une ruche en bonne santé produit entre 7 et 15 kg de miel.» Les pertes ont été plus importantes ailleurs en France. «En Aquitaine, les colonies d’abeilles ont disparu dans 70% des ruches cet hiver», indique Guillaume Lemoine, entomologiste et apiculteur amateur. Au point que certains évoquent un déficit de production de miel en France, avec une dépendance vis-à-vis de l’étranger. La baisse des colonies d’abeilles affecte donc la production de miel et dans une moindre mesure la pollinisation des plantes. Sachant que la pollinisation n’est pas assurée que par les abeilles mais aussi par d’autres insectes (papillons, certaines mouches, etc.) et le vent (cas des céréales).
Y a-t-il des risques d’extinction de certaines espèces d’abeilles en région ? Pas pour l’apis mellifera, «l’abeille noire», l’espèce la plus répandue en Nord-Pas-de-Calais. «Il y a des bourdons qu’on ne retrouve plus, affirme toutefois Guillaume Lemoine. Le bombus magnus, qui est un bourdon sauvage, est quasiment en extinction.» Les causes de la disparition des colonies d’abeilles sont multiples. Les apiculteurs invoquent bien souvent le varois, un acarien. Le frelon asiatique, le prédateur si redouté, «n’a pas été aperçu en Nord-Pas-de-Calais», indique Lucie Lefebvre. L’une des causes, mais qui reste un sujet explosif, est «l’utilisation de pesticides», affirme Guillaume Lemoine. Pour y remédier, les agriculteurs diffèrent le traitement des champs en fonction des mouvements des abeilles.
Encadré :
STB matériaux “prélève et préserve“
Fournir du sable pour l’enfouissement de réseaux de canalisation d’eau. C’est le métier de STB matériaux. Pour cette activité destructrice d’habitats naturels, cette PME s’emploie à la préservation de la biodiversité sur les quatre carrières qu’elle exploite en région. “Par exemple, nous estimons à environ 200 000 le nombre d’individus d’abeilles appartenant à 52 espèces différentes que nous avons contribué à préserver sur notre carrière de Hamel près de Douai“, explique Nicolas Seignez, géologue et responsable développement durable chez STB matériaux. Pendant et après exploitation d’un site, la PME procède à de la “remise en état” en semant certaines essences végétales pour faire venir des espèces, en aménageant des talus, en créant des zones humides, etc. Des actions qui ont valu à STB matériaux quelques distinctions dont, en 2013, le prix Biodiversité pour la conservation d’espaces naturels de l’Union nationale de producteurs de granulats. La même année, STB matériaux s’est engagée dans la stratégie nationale pour la biodiversité.