Ports de Calais et de Boulogne-sur-Mer : ascension en cours
La Société d’exploitation des ports du détroit a fait son bilan annuel. Une année 2023 qui remet les ports de Calais et de Boulogne-sur-Mer sur ses rails d’avant Brexit et Covid. Compte-rendu.
Retour à la normale pour la Société d’exploitation des ports du détroit (SEPD) ? «2023 aura été la première année pleine en termes de trafic de tourisme depuis la crise sanitaire et la levée complète de restrictions de circulation en mars 2022» contextualise la direction de la SEPD, ce 18 janvier à l’heure de faire son bilan annuel.
Retour des cars et des véhicules neufs
Sans surprise, la reprise amorcée par le port de Calais en 2022 s’est poursuivie l’an dernier avec une augmentation de 41% sur les passagers (à 7,3 millions) et + 33% sur les véhicules de tourisme (à 1,3 million). Signe d’un retour aux chiffres d’avant-crise, les deux mois d’été ont vu passer 2 millions de touristes et 450 000 véhicules, étiage usuel avant 2019. Mais il faudra encore aller chercher près de 3 millions de voyageurs de plus pour retrouver totalement le niveau de 2015.
Calais enregistre aussi un bond spectaculaire (+85%) avec les autocars dont le volume est revenu au-dessus de 60 000 unités, soit 70% de parts de marché. Coté fret, Calais progresse de 10 % avec 1,8 million de poids lourds et remorques non-accompagnées dans un contexte général où le trafic-fret transmanche a chuté de 2 points en 2023. Pour la première fois depuis longtemps, Calais pèse la moitié du trafic fret transmanche. Pour autant, le porte de Calais voit décroître le trafic des remorques non-accompagnées (-12%) avec 55 000 unités. Benoit Rochet l’explique par une plus grande disponibilité des chauffeurs-routiers dans les pays de l’Est, poussant les opérateurs à délaisser le non-accompagné.
Calais peut se féliciter de voir revenir le trafic des voitures neuves qui avait migré à Zeebruges, il y a une décennie. En effet, le groupe de transport et de logistique Charles André y reprend pied avec 10 400 véhicules neufs qui ont transité en 2023. Le volume devrait tripler cette année, grâce à son partenariat avec Stellantis.
Tout ou presque en hausse
Le pari des autoroutes ferroviaires semble encore loin de pouvoir devenir conséquent sur le territoire. S’il s’est maintenu au port de Calais en 2023 (+ 1 % avec 41 641 unités) avec l’opérateur VIIA dans une tendance nationale très défavorable (- 20% sur le transport combiné), il reste marginal. Une situation marginale que connaît également l’autre opérateur de ce type - Cargo Beamer - qui a choisi de développer son activité le long de l’A16 dans la zone de la Turquerie.
Les terminaux de commerce portuaires ont connu une activité stable en 2023 avec près d’1,9 million de tonnes. Boulogne-sur-Mer en a traité 642 000 (-2%) dont les deux tiers à l’export. À noter l’apparition d’un trafic de pellet avec 21 000 tonnes.
Au port de pêche de Boulogne-sur-Mer, les résultats confirment une certaine vigueur. Avec près de 90 millions d’euros, la valeur des marchandises s’est accrue de 2% l’an dernier. Le tonnage de poissons croit de 8 points et franchit la barre des 30 000 tonnes. Si les soles, maquereaux et merlans se font rares à la capture, le projet de ferme aquacole de Local Océan est plébiscité par le directeur général des ports. «Ce sont 150 millions d’euros d’investissements et 110 emplois» souligne Benoît Rochet, directeur général de la SEPD. Au total, les ports ont vu passer 44,7 millions de tonnes de marchandises, soit une hausse de 10% par rapport à 2022.
Tournant environnemental
D’une façon générale, les faits marquants ont été nombreux l’an dernier. «C’est la reprise du tourisme, le retour d’activité historique avec les voitures et l’activité de construction maritime avec la Socarenam qui réoriente sa stratégie avec des navires militaires ; l’arrivée du Pioneer de P&O (hybride)...» égrène encore le directeur. Avec la poursuite de son redressement des trafics, les ports devront prendre aussi le grand tournant environnemental avec pour objectif d’être neutres en 2030.
Si les émissions des ports sont peu importantes (2 200 tonnes en 2019), les compagnies maritimes sont fortement émettrices et sont désormais assujetties depuis le 1er
janvier au principe du pollueur-payeur. «Il doivent couvrir 40% de leurs émissions de dioxyde de carbone pour l’instant» rappelle le directeur général. Les traversées sur batteries électriques sont possibles, mais le rechargement des navires pose de sérieuses questions d’installation et de standardisation des systèmes. Si le flux des navires doit rester constant entre Douvres et Calais, les temps de recharge forment encore à ce jour un inquiétant mystère. Les deux ports forment, en 2023, un chiffre d’affaires de 145 millions d’euros contre 110,7 millions d’euros en 2022, où le résultat net dépassait déjà les 12 millions d’euros.