Plastic Odyssey, paré à faire un tour du monde contre la pollution plastique des océans

Le navire scientifique Plastic Odyssey est en cours de préparation à Dunkerque. Il s’apprête à naviguer dès juin avec, à bord, un laboratoire hors norme pour promouvoir la valorisation et la réduction des déchets plastiques.


Plastic Odyssey lors de sa mise à l'eau.
Plastic Odyssey lors de sa mise à l'eau.

Chantier naval de Damen, cale sèche n°5 au port de Dunkerque, 9h le 9 mars dernier : le bateau Plastic Odyssey, jusque-là soutenu par des étais en bois, est mis à l’eau. Ça y est, il flotte. Un moment émouvant pour l’ONG venue de Marseille, à l’origine du projet, après des mois de travaux importants sur cet ancien navire océanographe de 40 m de long et 10 m de large.

Les fondateurs de Plastic Odyssey Simon Bernard, Bob Vrignaud et Alexandre Dechelotte
Les fondateurs de Plastic Odyssey Simon Bernard, Bob Vrignaud et Alexandre Dechelotte.

Les aménagements ne sont pas complètement finis, et les trois fondateurs - l’ingénieur Icam Nantes Bob Vrignaud et deux anciens officiers de la marine marchande, Alexandre Dechelotte et Simon Bernard - savent qu’il y a encore plusieurs semaines de travail. La seconde étape sera d’accueillir fin avril dix machines de recyclage de plastiques, avant le départ début juin.

Chantier en cours de Plastic Odyssey
Chantier en cours de Plastic Odyssey

3 ans de périple, 3 continents et 30 escales

La feuille de route va conduire Plastic Odyssey vers dix villes françaises étapes (Dunkerque, Rouen, Le Havre, Brest, Concarneau  jusque Marseille pour le Congrès mondial de la nature en septembre), puis le pourtour de la Méditerranée, l’Amérique du Sud, les îles du Pacifique, l’Asie du Sud-Est et l’Afrique de l’Ouest.

L’objectif est de promouvoir des solutions sans brevet et à bas coût de recyclage du plastique, afin de réduire la pollution des océans. Chaque minute, 19 tonnes de plastique sont déversées dans l’océan, soit l’équivalent d’un camion-poubelle, avec des conséquences dramatiques sur la faune et la flore. Et 80% de la pollution marine provient des pays en voie de développement.

A chaque escale, un village nomade sera installé pour présenter les machines de recyclage et organiser des conférences sur les alternatives au plastique. Public visé : particuliers, collectivités, associations et entrepreneurs locaux.

«Au sein même du bateau, la vingtaine de personnes vivant à bord feront tout pour réduire au maximum les déchets. Ils testeront des alternatives à l’utilisation du plastique, qui pourraient intéresser demain hôtels et restaurants, en mer comme à terre», précise Alexandre Dechelotte, responsable de la communication du projet.

Un centre de recyclage à bord

L’atelier des machines de recyclage sera composé sur le bateau de trois parties. Une première avec un broyeur, un bac de lavage et une centrifugeuse pour broyer, laver et sécher les déchets plastiques.

Machines de recyclage situées à l'arrière du bateau
Machines de recyclage situées à l'arrière du bateau

Un deuxième espace dédié à la «transformation» exposera une extrudeuse et des moules de tailles et formes diverses, mais aussi un four et une presse hydraulique. Le déchet plastique peut ainsi devenir une tuile, des briques, des tuyaux de canalisation… Enfin, un dernier espace exposera la «valorisation énergétique» des déchets plastiques qui, grâce à la pyrolyse, peuvent devenir du carburant.

«Ce sont 10 machines conçues en Afrique du Sud et Marseille, influencées par des solutions déjà éprouvées dans le monde entier, notamment en Egypte. Mais les plans n’existaient pas. Trois cents ingénieurs y ont alors travaillé pendant quatre ans pour élaborer les systèmes les plus simples possible, précise Simon Bernard, le président de l’ONG. L’objectif est que ces machines soient ensuite faciles à dupliquer dans chaque pays visité, créant de l’emploi local.»

Ainsi, le coût de fabrication du broyeur exposé par Plastic Odyssey variera entre 4 000 et 9 000 euros, contre un prix à neuf de 60 000 euros. 

«Cette différence de prix s’explique par un système de construction nécessitant peu de matières premières et de pièces que l’on peut élaborer avec des outils de base», souligne Simon Bernard.

Et ce centre de recyclage sera autonome en énergie grâce la production sur le bateau de carburant, nécessaire pour alimenter le circuit électrique. Une manière de reproduire ainsi les conditions qui pourraient exister sur une île ou dans une campagne isolée, coupées de source d’énergie.

Inspirés de Nomade des Mers

Le budget de deux millions d’euros pour rénover le bateau a été cofinancé par des sponsors (la Matmut, le Crédit agricole, Clarins et l’Occitane), soutenu par la Fondation Solar Impulse de Bertrand Piccard.

A l’origine du projet, les fondateurs trentenaires se sont appuyés sur le parcours de Corentin de Chatelperron sur Nomade des Mers, un bateau qui vient aussi de Dunkerque et qui promeut les low-techs (basses technologies conçues à partir de matériaux de recyclage) dans le monde entier. Ils ont passé plusieurs mois avec lui, leur permettant de prendre conscience des dégâts de la pollution plastique dans les océans. Une expérience initiatique qui a transformé leur vie.