Plaidoyer pour les valeurs de solidarité et d’accessibilité à tous

Président de la mutuelle, Philippe Mixe est également président de la Fédération nationale indépendante des mutuelles (FNIM). Il a saisi l’occasion pour dénoncer les «obligations démesurées» imposées par les pouvoirs publics au mépris des valeurs mutualistes.

Le nouveau siège a été aménagé dans une ancienne clinique de Valenciennes.
Le nouveau siège a été aménagé dans une ancienne clinique de Valenciennes.

D.R.
Philippe Mixe pendant son intervention devant la presse, avant l’inauguration proprement dite.

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Le nouveau siège a été aménagé dans une ancienne clinique de Valenciennes.

Philippe Mixe, à l’instant d’inaugurer, fin octobre, le nouveau siège de la mutuelle Just’ à Valenciennes (voir encadré), a poussé un nouveau «coup de gueule»… Il l’a fait en tant que président, depuis 2011, de la Fédération nationale indépendante des mutuelles (FNIM) qui représente une trentaine de mutuelles de santé et 1,5 million de personnes. Rappelons aussi qu’il est avocat à l’origine et qu’il sait donc manier le verbe.

 

Non lucratif contre profit maximum ? Quel tableau brosse-t-il de la situation des mutuelles ? Le contexte économique et réglementaire n’est pas simple et le grand public a de quoi s’y perdre. Essayons de résumer. Premier constat : l’abondance des offres publicitaires tend à démontrer que le marché des complémentaires de santé est aujourd’hui très convoité. D’autant plus que la tendance est à la «privatisation», à la «libéralisation», conséquences des mesures d’économie prises par le secteur public (les déremboursements par exemple) et que des évolutions législatives excitent les appétits (la complémentaire santé obligatoire pour les salariés des entreprises depuis le 1er janvier 2016 par exemple).

Des portes ont donc été ouvertes aux acteurs privés, les compagnies d’assurances en particulier, qui s’y engouffrent, au grand dam des mutuelles. Celles-ci craignent de disparaître et sont entrées en résistance. A écouter Philippe Mixe, deux logiques semblent s’affronter à armes inégales : celle − qu’il défend − du risque mutualisé, sans but lucratif a priori, et celle du risque optimisé et du profit maximum.

 

Les pouvoirs publics mis en cause. Et le rôle de l’Etat dans ce tableau ? Pour M. Mixe, il y a une «volonté des pouvoirs publics de mettre à mal le modèle mutualiste», de «faire disparaître les structures de proximité pour ne garder que quelques ‘grands’ sur le marché». Comment ? «Par le biais des contraintes réglementaires surtout», dit-il. Pour lui, si les règlements européens sont «corrects», les contraintes dont il parle apparaissent lors de leur transposition dans le droit français. Il estime que l’Etat veut faire entrer les mutuelles dans le «marché unique de l’assurance», en leur imposant des «obligations démesurées» (en matière de gouvernance et de solvabilité, a-t-il dit), des exigences que ne demande pas l’Europe. «Cela alourdit le fonctionnement et les coûts de gestion. Les mutuelles ne pourront pas suivre et il n’y aura plus de concurrence.»

Philippe Mixe reproche aussi aux pouvoirs publics de se mêler de l’organisation des mutuelles et de pratiquer même «l’inquisition» envers les mutualistes. Les exemples que cite M. Mixe sont techniques, mais tous tendent à montrer que tout est menacé : le service, l’écoute, la gestion, la proximité − « nous, on ne délocalise pas” −, l’économie collaborative, la qualité et les prix des prestations… Bref, les valeurs de solidarité et d’accessibilité à tous.

 

Actions en justice et explications au grand public. Pour lui, la «financiarisation» du domaine de la complémentaire santé et de la prévoyance va favoriser les gens riches et bien portants, et notamment instaurer des cloisonnements entre les âges que les mutuelles ne font pas. Par exemple, il craint l’instauration d’une complémentaire santé pour les plus de 65 ans, qui seraient, en outre, les seuls à supporter le risque. C’est à l’inverse du principe de la solidarité entre générations ! Cette logique, pour lui, pourrait aboutir à exclure et à pénaliser ceux qui sont trop malades ou ont trop d’accidents !

Que préconise-t-il ? M. Mixe évoque des actions devant le Conseil d’Etat et entend bien aussi expliquer au grand public ce qui se prépare. Pour lui, l’intérêt du public pour les principes mutualistes se voit dans l’engouement actuel pour les mutuelles communales où générations et situations sociales différentes sont mélangées.

 

ENCADRE

Just’ vise les TPE et PME des Hauts-de-France 

Ouvert en fait depuis septembre, le nouveau siège de la mutuelle Just’, avenue de Verdun à Valenciennes, a été inauguré le 27 octobre,avec faste et en présence de plusieurs centaines d’invités (dont le président de Région). Le siège a été installé dans l’ancienne clinique Houdart réhabilitée, qui avait connu l’abandon pendant plusieurs années.

Philippe Mixe, président depuis 2007, a expliqué que l’opération avait permis de réunir plusieurs sites, sans avoir à quitter Valenciennes, et de disposer d’un parking d’environ 80 places, très appréciable en ville. Sa mutuelle compte cent personnes, dont les trois quarts travaillent au siège. Côté adhérents : 100 000 personnes et 1 500 entreprises, selon le site de la mutuelle. Les contrats peuvent être individuels ou collectifs.

Just’, c’est en fait deux mutuelles fusionnées : La Famille valenciennoise (devenue Just ensemble), créée en 1927, et la mutuelle En famille, du Pas-de-Calais et qui datait de 1956. La fusion a donné, assez logiquement, «Just en famille» qui s’est dotée d’une nouvelle identité visuelle en 2013. Aujourd’hui, elle dénombre une quinzaine d’agences dans le Nord, le Pas-de-Calais et en Picardie (Saint-Quentin et Amiens), et son président vise maintenant les Hauts-de-France en restant «indépendante et régionale» et tournée vers les TPE et PME, toujours dans les domaines de la santé et de la prévoyance.