Phoenix Equipement, la start-up isarienne dans la défense qui promeut le « made in France »
La start-up, installée à Venette, propose des équipements individuels adaptés aux besoins des militaires et des forces de l’ordre. Avec un objectif : concevoir et fabriquer en France un produit de qualité.
Surmonter les obstacles, Franck Bourdelle en a l’habitude. Au sens propre, au travers de son expérience de plusieurs années au sein de la réserve de l’armée de terre. Mais également au sens figuré, tant la création de son entreprise - en 2019, Phoénix Equipement basée à Venette - a rencontré d’imprévus, petits et grands.
« Depuis des années, la France accuse un retard dans le domaine des équipements individuels militaires et des forces de l’ordre. Nous voulons participer à combler ce retard en proposant des équipements individuels adaptés aux besoins et produits en France, avec des matières de qualité, souvent recyclables et toujours traçables », explique Franck Bourdelle, épaulé, depuis décembre 2021, par Thibaud Mennesson, ayant également plusieurs expériences au sein de l’armée, qui a pris la suite d’un premier associé.
Parmi les innovations de l’entreprise, Crokyd™ est un crochet permettant d’attacher et de sécuriser ses clés et petits objets à une ceinture, une sangle ou un vêtement. Ou encore le Beltaptor™, un adaptateur de ceinture pour poches. L’entreprise travaille également sur les motifs de camouflages, et fait de la recherche et développement pour les entreprises et les institutions selon leurs besoins.
La difficulté à trouver des financeurs
L’aventure débute en 2016 avec une participation au concours Mode Défense dans la catégorie "treillis du futur". « J’ai présenté une idée de motif de camouflage, c’est un sujet qui m’intéresse depuis longtemps à titre personnel », explique Franck Bourdelle. La proposition est remarquée. Même si elle n’aboutit pas en tant que telle, « il est très complexe de modifier l’uniforme d’une armée complète ». Cela permet à Franck Bourdelle d’intégrer, en 2018, le très prestigieux Label Generate du Gicat parrainant des start-ups œuvrant dans le secteur de la défense et de la sécurité. Il faut dire qu’il a de nombreuses idées à développer ! « J’étais déjà auto-entrepreneur et je travaillais sur des modifications d’équipements », poursuit-il.
Le jury qui examine le dossier de Franck Bourdelle compte parmi ses membres Emmanuel Chiva, directeur de l'Agence de l'innovation de défense. « Là, la récréation était finie, j’ai compris que le bricolage dans le garage ce n’était plus possible ! Je suis parti à la recherche d’un associé et j’ai créé une SAS », résume, avec humour le chef d’entreprise.
La recherche de financements s’avère complexe, les banques tout comme les business Angels sont frileux, malheureusement un constat récurrent pour les start-ups de la défense et de la sécurité. Ce qui conduira Franck Bourdelle à témoigner devant des membres de la Commission Défense de l’Assemblée nationale à ce sujet. « Cela a permis une réaction en chaîne qui a abouti la création de fonds d’investissements spécifiques, mais il a fallu deux ans ».
Face au Covid
Ce qui n’empêche pas Phoenix Equipement d’avancer… pour faire face au Covid en 2020. À cette époque, pas si lointaine, l’entreprise décide d’être solidaire tout en démontrant son savoir-faire et sa réactivité. Elle met au point bénévolement, dans des délais très courts, les seules visières retenues par l’appel à projets français officiel du service de santé des armées, dont elle imprime des milliers exemplaires gracieusement. Un crochet d’hygiène est également mis au point, pour ouvrir les portes, fenêtres… sélectionné par l'Armée de Terre pour être imprimé selon les besoins, en interne. « Il a été imprimé près de 6 000 fois par l’armée et plus de 5 000 fois par des tiers », souligne Franck Bourdelle.
Dernier succès en date, l’entrée dans le programme Centurion, l’année dernière, porté par le ministère des Armées, visant à favoriser l’innovation au combat. En 2021 toujours, un ampoulier a été développé pour répondre aux besoins militaires. Si les idées, les compétences et la réactivité de la start-up sont démontrées, il lui reste à faire la différence face à une concurrence effrénée. « Sur un appel d’offres, où nous avions cinq concurrents étrangers, nous avons obtenu la meilleure note technique et la plus mauvaise note pour le prix. Nous étions 4,3 fois plus chers que le concurrent étranger, le plus cher dont le travail de conception a une douzaine d’années », constate Franck Bourdelle. Lequel regrette que les enjeux d’une fabrication nationale soient encore si mal appréhendés pour les équipements individuels, en pratique, dans ce secteur sensible.