Patrick Puy : "il faut que le chemin que vous proposez soit bien visible"
Après Jean-Louis Debré le 21 novembre dernier, Patrick Puy, «chirurgien» des entreprises en difficulté est venu conférer devant une trentaine d’acteurs économiques du littoral rassemblés par le Grand Littoral Business Club. Verbatim.
C’est un homme qui ne laisse pas indifférent ; Patrick Puy a l’expérience longue comme le bras des entreprises dans la tempête. C’est son «fond de commerce», sa spécialité, son penchant pour le «sans affect» : «J’ai certes beaucoup licencié. 10 000 personnes. Mais si l’on en sauve 30 000. Je ne pense ni aux uns, ni aux autres, je ne pense qu’à l’entreprise. À sa pérennité. Assez froidement», explique sans ambages le sexagénaire. Il commence chez Total. Puis s’en va chez Schlumberger où il tâte de près les méthodes anglo-saxonnes. Il enchaîne chez Legrand qu’il finit par diriger, passe chez Brandt qu’il tente de redresser, TDF, Vogica, SPIR, enfin Vivarte dont il éponge au forceps des dettes colossales (3,3 milliards d’euros)… «J’ai dit aux banquiers. On va effacer le tout ; vous allez nous prêter 500 millions tout de suite et on a fini par en rembourser 350…», détaille-t-il avec un large sourire. Aujourd’hui, il s’emploie au conseil – «je suis très cher» – et aux conférences (gracieuses…). Toujours sans langue de bois.
Parler vrai et sans affect...
Dans l’industrie régional, Patrick Puy a passé 18 mois au chevet d’Arc International quand l’entreprise était à deux doigts de défaillir définitivement. «Nous avons eu quelques jours de discussion avec la famille. Je leur ai expliqué très franchement : la première chose est de remettre la main sur le cash, puis d’aller pleurer chez le banquier, et ensuite d’aller dans une procédure collective». Quand il dirige brièvement le groupe, il passe, au mépris de la réglementation, au chômage partiel de masse. Le Comité d’entreprise le suit pendant la tempête. «Ils ont fait beaucoup plus d’effort que moi», sourit le cadre. Sur les politiques, l’homme reste «cash» : «Les politiques peuvent servir mais à leur place. La plupart du temps, malheureusement, ils ne comprennent rien à l’économie», se désole t-il. Le plus difficile ? «L’État. Qui n’a qu’un critère : l’emploi à court terme. À tout prix. L’actionnaire, c’est difficile parce qu’il a souvent le sentiment d’avoir mal fait.» À propos de ses succès et ses échecs, l’homme se pose comme désarmé : «Quand j’arrive, je n’ai pas de temps, pas d’argent, aucun pouvoir. Plus c’est difficile, plus il faut parler : il faut que le chemin que vous proposez soit bien visible. Oui, on va supprimer des postes, mais aussi des dettes», ajoute-t-il. Un dernier conseil pour la route : que doit alerter un chef d’entreprise avant une tempête ? «Quand le cash descend, arrêtez-vous et demandez conseil. Et virez votre DAF». L’assistance est conquise.