Nouveau parfum au “Succès Berckois”

Depuis l’été 1922, la famille Matifas fabrique de façon artisanale et vend à Berck-Plage des berlingots et des sucettes aux délicieux parfums. Le client assiste en direct à la cuisson du sucre et à la confection de ces confiseries. Un savoirfaire ancestral soigneusement préservé et jalousement transmis de mère en fils. Pour les 90 ans de la maison, Jean-Yves a dévoilé son dernier parfum : pomme tatin flambée calvados.

L’artisan confiseur Jean-Yves Matifas perpétue la tradition familiale en mettant au goût du jour le sucre qu’il file à l’ancienne, au crochet.
L’artisan confiseur Jean-Yves Matifas perpétue la tradition familiale en mettant au goût du jour le sucre qu’il file à l’ancienne, au crochet.

 

L’artisan confiseur Jean-Yves Matifas perpétue la tradition familiale en mettant au goût du jour le sucre qu’il file à l’ancienne, au crochet.

L’artisan confiseur Jean-Yves Matifas perpétue la tradition familiale en mettant au goût du jour le sucre qu’il file à l’ancienne, au crochet.

Cet été-là, deux grands-tantes de Micheline Matifas, originaires du Pays basque, s’installent pour la saison à Berck-sur- Mer, rue Carnot, pour vendre des bonbons dont la forme rappelle celle du piment d’Espelette. “L’emplacement avait été conseillé aux deux demoiselles, Lucie Bousqué et Maria Bouet, raconte Micheline, car les hôpitaux berckois accueillaient de nombreux enfants.” La réussite est immédiate, d’où le nom donné au magasin : le “Succès Berckois”. En 1950, une de leurs nièces poursuit l’aventure avant de confier la clé de la boutique et la recette à sa fille aînée qui vient l’aider durant ses vacances : Micheline, à son tour, sera bientôt rejointe par son fils, Jean-Yves. “Je suis tombé dans la marmite tout petit, avoue ce dernier, et cela fait déjà 25 ans que je pratique ce beau métier.”

Un savoir-faire distingué. En 1994, au salon Intersuc de Paris, Micheline Matifas a reçu le prix du Meilleur bonbon de France pour ses “Succès fourrés”, des friandises garnies de morceaux de fruits exotiques déshydratés. En 1997, pour les 75 ans de l’enseigne, les confiseurs berckois ont réalisé une sucette de 4 mètres de haut et de 1,25 tonne, la plus grande du monde. Et en 2002, pour le 80e anniversaire, il a fallu quitter la petite boutique des débuts pour emménager une surface de vente et de travail plus spacieuse, sur le trottoir d’en face, rue Carnot, l’axe le plus commerçant de la ville. La vitrine, longue de 11 mètres, permet aux curieux, attirés par les senteurs sucrées qui s’échappent par la porte, d’assister à la fabrication. “Car nous n’avons pas d’autre marbre que celui de la boutique, explique Jean-Yves. Tous nos berlingots et nos sucettes sont fabriqués à la vue des clients ou des passants qui sont parfois une centaine en été. Même en soirée, quand je produis pour approvisionner les bocaux vidés au cours de la journée, je laisse les stores ouverts.”

Une recette mille fois répétée. A un détail près, la voici : après avoir fait fondre le sucre dans une casserole à feu nu sur un gros gaz, l’artisan coule le caramel sur une plaque de marbre huilée. De lourdes règles en fer délimitent la surface. Coulé à la température de 150°, le sucre est alors transparent comme le verre. “Repérer le bon moment est une question d’expérience, commente Jean- Yves, car je travaille sans thermomètre ni chronomètre, en me fiant uniquement à l’odeur, au crépitement ou à la grosseur des bulles.” Pendant que le caramel refroidit, le confiseur ajoute le parfum et le colorant et mélange le tout à l’aide d’une spatule et d’un couteau. Le bloc de sucre épaissi est ensuite suspendu à un crochet et se laisse filer. En s’oxygénant, la masse perd sa transparence et devient opaque. Puis, le sucre est rassemblé en boules et étiré en bandes régulières afin d’être taillé aux ciseaux en petits berlingots qui prennent la forme d’un coussin rebondi. Les sucettes sont taillées en forme de petits piments et piquées d’un petit bâton de bois. Il ne reste plus alors qu’à passer chaque sucette au chalumeau pour l’ébarber.

Cinq tonnes de sucre par an.Contrairement aux bêtises de Cambrai, fait remarquer l’artisan, nous ne sommes jamais passés à la production industrielle : tout est fait à la main, ce qui est de plus en plus rare et nécessite une bonne dextérité, car le sucre refroidit très vite et ne laisse guère plus de 20 minutes pour être travaillé.” La production est écoulée essentiellement au magasin de Berck-Plage, même si Jean-Yves Matifas, qui a déjà initié son fils au travail du sucre, a développé une nouvelle vente à la faveur de son site internet. En une année, il travaille ainsi cinq à six tonnes de sucre, pour fabriquer quelque 120 000 sucettes, à raison d’une centaine par casserole de deux kilos de sucre : “nous avons toujours été fidèle au sucre cristal de Béghin”, précise-t-il. Il y en a pour tous les goûts : anis – “notre parfum vedette depuis toujours” – mais aussi ananas, violette, melon, raisin, noix de coco, banane, menthe, fruits de la passion, kola… Au total 25 saveurs, anciennes ou modernes. En France, il ne reste que deux ou trois confiseurs à faire encore les bonbons à la main !

Le “Succès Berckois”, 31 rue Carnot 62600 Berck-sur-Mer. Site : www.succesberckois. com