Stratégie

Marle : forgée pour l'international, Lariplast se réinvente

Du gobelet plastique à l'essuie-tout. Voilà la dangereuse cabriole qu'a dû effectuer l'entreprise Lariplast pour survivre. Basée à Marle, elle semble aujourd'hui sortie d'affaire, et regarde vers l'avenir (et l'Europe) avec optimisme.

L'essuie-tout produit à Marle est distribué à 50% aux Pays-Bas et en Belgique. ©Lariplast
L'essuie-tout produit à Marle est distribué à 50% aux Pays-Bas et en Belgique. ©Lariplast

Tout entrepreneur le sait : il faut savoir s'adapter et louvoyer pour survivre et se développer. C'est en tout cas l'expérience vécue par l'entreprise Lariplast, qui se réinvente totalement aujourd'hui après presque dix ans d'existence, en orientant sa production sur l'essuie-tout et le papier toilette... Dont 50% par à l'export.

Tout commence en 2013, avec l'arrivée à Marle, d'une brochette d'entrepreneurs européens. Trois grecs, deux français et un italien, qui décident de réunir leurs moyens humains et financiers et leurs savoir-faire pour implanter une industrie de production de gobelets en plastique en France. Comme d'autres, ils choisissent Marle, pour son implantation au cœur de l'Europe, au carrefour de grands axes logistiques, et sont soutenus par la Région Picardie (à l'époque) et le Département de l'Aisne.

Réglementation et Covid

Très vite, la mayonnaise prend. Une première ligne de production est mise en route, puis une seconde moins de deux ans plus tard. Au total 6 millions d'euros sont investis, et 24 salariés tournent en 3 x 8 pour répondre à la demande d'une large clientèle. Lariplast vend ses gobelets dans toute la France et dans une grande partie de l'Europe de l'Ouest : Benelux et Italie notamment.

Mais cette belle croissance avait une date de péremption. « Nous savions que l'interdiction du plastique était possible, depuis la loi Royal, se rappelle Giorgos Kazazoglou, président de Lariplast France. Mais il n'y avait pas de certitude. Alors nous avons continué à produire. » Voyant la polémique sur les emballages plastiques faire baisser la consommation, l'entreprise prend toutefois les devants et tente de travailler avec des bioplastiques à base d'amidon. « Nous étions les premiers en France à essayer », poursuit le président. 300 000 euros sont investis dans des essais qui se révèlent infructueux. Heureusement peut-être. Car finalement le bioplastique sera assimilé au plastique par l'Europe qui finit aussi par confirmer en 2021 son souhait d'interdire définitivement les emballages à usage unique.

Du gobelet plastique à l'essuie-tout

Le Covid vient mettre le coup de grâce. « Au début, j'ai pensé que ça pouvait nous aider car un produit à usage unique était plutôt une bonne chose face au risque de contamination », se rappelle Giorgos Kazazoglou. Mais le confinement a eu pour conséquence de fermer les bureaux, et, avec eux les fontaines à eau... grandes consommatrices de gobelets. « Plus de 75% de notre production était dirigée vers les fontaines à eau, souligne encore le dirigeant, qui fait alors appel au chômage partiel. De 8 millions d'euros en 2018, le chiffre d'affaires est tombé à 3 millions d'euros en 2020. » Cette situation très inquiétante, avec une succession de résultats négatifs sur trois années (plus de un million d'euros de pertes en 2020), conduit évidemment les dirigeants de Lariplast à réagir.

Une opportunité inattendue se présente alors : celle de produire de l'essuie-tout. « Avant même l'arrêt de nos lignes plastiques, on avait décidé d'installer une ligne de production de papier, raconte encore le président de Lariplast. On n'avait pas l'expérience, mais ça nous paraissait complémentaire avec ce que nous faisions. » La ligne de production arrive tout droit de Grèce à l'été 2020 et les tests sont lancés. Les premiers camions quittent Marle au mois de mars 2021, alors que les lignes de production "plastique" sont définitivement arrêtées. Elles seront vendues quelques mois plus tard à une société américaine (Phoenix Packaging Corp.) au prix de 2,3 millions d'euros. De quoi renflouer la trésorerie.

Une seconde ligne de production sera installée au printemps, avant la construction d'un entrepôt. ©Lariplast

Renforcement productif et diversification

La production d'essuie-tout prend vite son envol, avec un client unique. La totalité du personnel peut ainsi conserver son emploi. Les équipes s'adaptent, évoluent et se forment, et augmentent peu à peu leur productivité. « Aujourd'hui nous travaillons avec deux équipes en 2 x 8 avec une très bonne connaissance des machines, se félicite Giorgos Kazazoglou. Au début, nous produisions 20 palettes par équipe. Nous en sommes actuellement à plus de 80. » Et en 2022, Lariplast renoue avec le profit, affichant un chiffre d'affaires de 7,7 millions d'euros. Une nouvelle ligne de production devrait être installée au printemps, et la gamme s'élargit au papier toilette. L'entreprise vient en outre d'acquérir un terrain de 32 000 m2 à Marle, destiné à accueillir, dans un premier temps, un entrepôt de stockage de 3 500 m2.

50% des ventes se font vers la Belgique et les Pays-Bas, via l'unique client de Lariplast. Le reste est distribué en France. Bien sûr, pour plus de sécurité, Giorgos Kazazoglou recherche de nouveaux débouchés, tout en étant conscient de ses modestes capacités de production. Il mise sur la qualité. « Nous n'allons pas aller démarcher la grande distribution, sourit-il. Notre souci principal c'est de satisfaire notre client principal, lui fournir un produit de qualité et lui apporter un maximum de services. »