Innovatrice, la Ferme du quartier passe à la taille supérieure
Après dix années de développement d'un système novateur et autonome, la ferme du quartier de Coye-la-Forêt s'apprête à déménager sur la friche L'Oréal à Orry-la-Ville.
C'est une histoire de légumes, d'écrevisses et de protozoaires... À Coye-la-Forêt, la Ferme du Quartier est une ferme pilote qui explore de nouvelles méthodes de production alliant efficience et autonomie en eau et en énergie. Un défi dans l'air du temps que s'est lancé l'association, dirigée par Gabriel Bedoy... et qui semble se concrétiser.
Tout n'était pourtant pas parti vraiment du bon pied. Initialement, le projet tournait autour de cultures aquaponiques alliées à un élevage d'écrevisses. Ces dernières, détritivores, étaient nourries avec des déchets de cuisine, et leurs déjections dans l'eau étaient utilisées pour nourrir les plantes. Un système qui est depuis longtemps connu avec l'élevage de poissons. Malheureusement, les déchets de cuisine n'étaient pas en capacité d'apporter suffisamment de protéines aux crustacés. Et pire : un protozoaire du nom de Psorospermium, cause de la maladie de porcelaine, est venu décimer l'élevage...
Biodiversité et ferti-irrigation
« Nous nous sommes dit qu'il fallait travailler sur un écosystème plus complet, dans lequel ce protozoaire existe mais n'est pas pathogène », raconte Gabriel Bedoy. La ferme décide d’alimenter son système avec une eau « sale » prélevée dans la nature. Cherchant, en parallèle, à tendre vers l'autonomie en eau, la ferme du quartier organise alors un système de récupération des eaux de pluie (piloté par une pompe fonctionnant à l'énergie photovoltaïque) qui les enrichit ensuite en biodiversité via un réseau de mares. Le potager est réaménagé et, désormais, les grenouilles vertes y pullulent au milieu des roseaux massettes...
En « bas » du parcours d'eau, la serre est toujours présente. Mais au lieu d'écrevisses, ce sont désormais des vers de terre qui y sont élevés, nourris par les fameux déchets de cuisine. Arrosés en continu par l'eau de pluie naturellement enrichie, ils apportent leur contribution par leurs déjections, créant un « compost liquide ». Celui-ci arrose ensuite les plantes cultivées et participe à les faire s'épanouir par ferti-irrigation.
20 kg par mètre carré
Ce système bien ficelé donne des résultats. L'association tire un rendement supérieur à 20 kilogrammes de récolte par mètre carré. Une partie est notamment revendue à un restaurateur de Compiègne, à la recherche de produits originaux. « Nous avons fait le choix de garder une serre fermée pour tester des plantes et légumes un peu exotiques », sourit Gabriel Bedoy. Haricot kilomètre, citronnelle d'Australie, coriandre bolivienne, gros thym... côtoient ainsi les classiques tomates et aubergines.
Forte de ces résultats, la ferme pilote envisage de changer d'échelle, pour aller vers un système viable, tout aussi autonome, mais susceptible de dégager un salaire. « Nous avons trouvé un site à Orry-la-Ville qui conviendrait. C'est une ancienne friche industrielle, ce qui aurait aussi le mérite de ne pas consommer de foncier. Et les briques concassées de l'ancienne usine pourraient remplacer les billes d'argile qui servent de substrat à nos plantes. » Une structure qui sera 20 fois plus grande que la ferme pilote actuelle, avec près de 1 000 m²
de serres (750 m² pour les plantes et 200 m2 pour les lombrics).