Manuel Valls appelle à un habeas corpus numérique

Le ministre de l’Intérieur a annoncé que les réflexions issues de la 5e édition du Forum international de la cybersécurité à Lille Grand Palais les 28 et 29 janvier alimenteront le travail du groupe interministériel en charge de la lutte contre la cybercriminalité.

Manuel Valls appelle à un habeas corpus numérique

D.R.

Lorsqu’en 1679, l’habeas corpus est devenu un principe de justice entré en vigueur pour la première fois en Angleterre, le droit s’est par la suite davantage structuré pour garantir les libertés et protéger de l’arbitraire. Contre les délits et crimes dans l’espace numérique, il existe certes un arsenal juridique, mais «les textes de loi sont disséminés dans cinq différents textes» et les outils d’investigation «sont à adapter», a affirmé Manuel Valls venu clore le 29 janvier dernier à Lille Grand Palais, la 5e édition du Forum international de la cybersécurité (FIC). Il y a en ce moment comme une ébullition aussi bien à l’échelle nationale qu’internationale des experts du numérique, des pouvoirs publics privés pour «construire un ordre numérique». Manuel Valls a parlé d’un «habeas corpus numérique». Un système censé donner de nouveaux droits aux citoyens et qui était une promesse de campagne de la majorité actuelle.Visiblement le gouvernement s’est mis à la tâche en créant un groupe interministériel chargé de la lutte contre la cybercriminalité dont la mission est de faire des propositions pour une sécurisation du web. Le FIC 2013 qui a réuni 2 400 spécialistes et non spécialistes du numérique pourrait apporter une contribution importante. Le ministre a laissé entendre que les réflexions du forum seront prises en compte par le groupe interministériel.

«BYOD» ou «pas BYOD» en entreprise. Parmi les sujets débattus les 28 et 29 janvier à Lille Grand Palais, plusieurs concernaient la vie en entreprise. Il en est un qui a porté sur le BYOD, acronyme américain pour Bring your own device. «C’est simplement la possibilité pour un salarié d’utiliser du matériel personnel (smartphone, ordinateur portable, tablette tactile) dans l’entreprise pour travailler, explique un juriste. La difficulté est que, comme c’est du matériel personnel, l’entreprise a des problèmes pour contrôler ce que le salarié fait avec.» Exemple de risque potentiel qui se trouve amplifié du fait de la dissémination des terminaux numériques : la fuite de données confidentielles. Les entreprises sont donc confrontées à la question : faut-il autoriser le BYOD ou l’interdire ? «Il n’y a pas une solution meilleure, explique le même juriste.  Le mieux pour l’entreprise c’est qu’en fonction de ce qu’elle fait et du risque qui est le sien de déterminer si oui ou non elle accepte le BYOD et de l’organiser à travers des règles du jeu pour les collaborateurs.» Lors de la table ronde ayant porté sur ce sujet au FIC, certains ont préconisé à l’entreprise qui autorise le BYOD de mettre en place une charte, de déclarer les systèmes d’information à la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) et d’informer les collaborateurs. Au sein du Groupe Adeo, un leader de la distribution en région, le choix a été fait d’autoriser le BYOD. «On ne l’interdit pas mais on l’encadre techniquement, indique Stéphane Omnes, responsable de système informtique chez Adeo. Par exemple nous limitons l’accès à l’information en cloisonnant les terminaux de type BYOD dans des réseaux complètement séparés. C’est-à-dire que le collaborateur qui arrive avec un terminal personnel va être mis sur un réseau Wifi dédié au BYOD sans accès aux serveurs de l’entreprise.» Au sein de ce groupe, le contrôle au niveau de la gouvernance de l’entreprise est fait au travers d’une charte laquelle vient d’être actualisée.  

Même pour qui est tenté par l’interdiction du BYOD, les spécialistes reconnaissent qu’il est difficile d’interdire complètement l’utilisation d’outils numériques personnels dans l’entreprise. BYOD ou pas BYOD le danger n’est pas total et la menace n’est pas inéluctable pour les données confidentielles. «Le secret existe encore, rassure un expert. Depuis que l’informatique existe, personne n’a encore trouvé le secret du Coca-Cola ou du Nutella.»

 

Prix du livre Cyber : deux lauréats

 La cybercriminalité en mouvement d’Eric Freyssinet paru chez Lavoisier et La sécurité numérique de l’entreprise, l’effet papillon du hacker de Pierre-Luc Réfalo paru chez Eyrolles ont reçu en ex-aequo le Prix du livre Cyber remis le 29 janvier au FIC.