Série d'été "Au fil de l'eau"

Longpré-les-Corps-Saints : les belles surprises de la Maison du marais

Les marais de Longpré-les-Corps-Saints s’étendent sur 160 hectares. Un étang de 14 hectares est la propriété de la communauté d’agglomération de la baie de Somme. On peut notamment le visiter à pied. Une visite très pédagogique menée par Marc Dallery, qui les entretient.

Marc Dallery ne se lasse pas de ces paysages.
Marc Dallery ne se lasse pas de ces paysages.

Les étangs de Longpré-les-Corps-Saints se développent sur 160 hectares. Il s’intègrent dans un espace naturel de 1 000 hectares de marais qui rassemblent aussi les communes de Condé-Folie, Long et Fontaine-sur-Somme, tout près du fleuve Somme et de sa véloroute. La communauté d’agglomération de la baie de Somme est propriétaire d’un étang de 14 hectares au bord duquel se trouve la maison du marais. Aux beaux jours, d’avril à fin septembre, c’est un office de tourisme où chacun peut prendre diverses informations, louer des vélos et réserver : une balade à pied, en barque électrique prisée par les amoureux de calme et de fraîcheur, en canoë kayak pour partir à la découverte de ces lieux d’exceptions.

Diversité tout au long de l’année

Cet après-midi là, le petit groupe a emprunté le sentier de la Fontinette, du nom de l’étang, pour une balade d’1,8 km. Sur place, il est possible de se procurer un dépliant gratuit sur lequel figurent 100 km de randonnées à parcourir librement. Après cinq ans sur place, Marc Dallery, notre guide qui s’occupe de l’entretien des lieux, ne s’en lasse pas : « Ce qui me plait c’est le côté nature vivante, le contact direct. Il y a énormément de diversité tout au long de l’année », témoigne t-il.

Le village de Long en arrière plan…

Avant de commencer le circuit, une page d’histoire s’impose car ces marais ont été creusés de la main l’homme. En effet, ce sont d’anciennes tourbières : « Trois cents ans en arrière, les forêts appartenaient aux notables qui utilisaient le bois pour se chauffer, raconte t-il. La tourbe a été surnommée le « charbon du pauvre ». Elle chauffe mal mais très longtemps. C’est aussi un bon cicatrisant et un colorant. Mélangé à du textile, elle a un pouvoir thermique important. »

Son processus de transformation est très lent car la tourbe est composée à 100 % de végétaux. Un millimètre est produit par an. À certains endroits, elle mesure 8 m dans le sol, ce qui évalue à 800 ans ! Vers 1780, elle était extraite grâce à un grand louchet de 1,20 m. Il fallait 4 personnes pour extraire ces pains de 7 kg, les transporter puis les ranger en pyramide par 21 briquettes durant un mois puis en pillon encore un mois. La tourbe était ensuite mise en stère :

« Elle était dix fois moins chère que le bois. Les tourbiers, qui exploitaient d’avril à juillet, payaient une taxe aux communes qui se sont enrichies grâce à ce marché », informe t-il. La centrale hydroélectrique de Long mise en service en 1903 en est le meilleur exemple. Il y avait l’électricité dans les rues et chaque foyer avait le droit à son ampoule. La commune de Long, construite sur les hauteurs, se dévoile imposante devant nos yeux. Vers 1900, le charbon venant du nord de la France a commencé à remplacer la tourbe. Dans les années soixante, la tourbe n’était utilisée que par des horticulteurs et des maraichers.

Le paradis de la faune et de la flore.

Une tourbière dix fois plus active qu’une forêt

Le site a été labellisé Ramsar vingt ans plus tard. C’est un traité intergouvernemental qui sert de cadre à l’action nationale et à la coopération internationale pour la conservation et l’utilisation rationnelle des zones humides et de leurs ressources : « Une tourbière est dix fois plus active qu’une forêt en terme d’emmagasinage du dioxine de carbone, narre-t-il avant de nous emmener au bord de l’eau transparente. C’est le royaume des nénuphars blancs et jaune. Cela prouve que l’eau est de très bonne qualité, très oxygénée. Regardez, dans l’eau, on trouve beaucoup d’espèces de poissons différents : carnassiers, herbivores et insectivores. »

Plus loin, on aperçoit une femelle cygne avec ses deux petits. Le mâle les surveille discrètement mais surement. Une centaine de mouettes ont élu domicile sur le plan d’eau. Les lieux sont privilégiés par une vingtaine de variétés de libellules. Lors de notre balade, Marc Dallery n’hésite d’ailleurs pas à descendre dans l’eau pour aller cueillir une feuille sur laquelle se trouve une chrysalide de ces belles dames.

De nombreux oiseaux comme le balbuzard pêcheur ou le rare blongios nain ont aussi élu domicile sur l’étang. Côté flore, le marais abrite des milliers de plantes et d’arbres qui souvent cohabitent. Ce sont des orchidées, des plantes mellifères, des iris d’eau, des saules, des aulnes, des bouleaux pubescents, du houblon : « Nous sommes obligés de raser et d’élaguer des arbres afin que les plantes puissent pousser et se développer, explique t-il. De même, nous pratiquons la fauche différenciée afin que chaque plante fasse son cycle et permettre aux insectes de bien grandir. Même les papillons de nuit vont butiner les fleurs ! » Place maintenant aux pouvoirs naturel des plantes. La spinée aurait des vertus pour les maux de tête, la consoude serait un cicatrisant, la lycope d’Europe soignerait la fièvre.

Entre étang et pâtures.

Notre découverte se poursuit entre étang et pâtures puis nous longeons la route en contre bas de la voie ferrée avant de retrouver la Maison des marais. Avant de nous quitter, Marc Dallery nous donne quelques idées pour prolonger la découverte du secteur : crypte et collégiale de Longpré-les-Corps-Saint, château et centrale hydroélectrique de Long, marais des Cavins de Bourdon, oppidum d’Erondelle, communes de Oisemont, d’Airaines…