Les soldes avant l’heure sur le site internet des 3 Suisses
Les sites de e-commerce en ligne ne sont pas à l’abri d’un bug informatique. Comme celui qui a touché les 3 Suisses, e
Les 11 et 12 juin der niers, les 3 Suisses ont été victimes, sur leur site internet, d’un bug informatique grâce auquel, en rentrant un code de réduction, les internautes bénéficiaient d’une remise de 50% applicable sur l’ensemble des produits vendus en ligne.
Le succès de cette “offre spéciale” a bien sûr été au rendez-vous : des milliers d’acheteurs, par le biais des réseaux sociaux ou des sites de microblogging, en ont été très vite informés et se sont précipités.
L’entreprise de vente à distance a été rapidement alertée de ce bug, en raison non seulement de la propagation de l’information sur le Net, mais également des volumes inhabituels de commandes passées, portant sur des produits ne faisant, d’ordinaire, jamais l’objet de réductions (notamment les produits technologiques, PC, tablettes…).
Dès le lendemain, l’entreprise communiquait sur sa page Facebook, en indiquant que “les commandes concernées ne seront pas honorées et chaque client sera recontacté individuellement dans les prochaines jours. Nous nous excusons auprès des internautes, mais les communautés ont bien compris qu’il s’agissait d’un bug”.
Plusieurs arguments peuvent venir appuyer la position adoptée par la société. Tout d’abord, la notion d’erreur sur le prix. La jurisprudence admet généralement que, du fait de la divergence de volontés due à un malentendu, le contrat n’a pu légalement se former entre les parties.
L’article 1110 du code civil dispose que “l’erreur ne peut être une cause de nullité que si elle a pour objet soit la substance de la chose, soit la personne du cocontractant”. Toutefois, la jurisprudence a élargi cette notion à “l’erreur obstacle”, lorsque l’erreur commise est d’une gravité telle qu’elle est considérée comme s’opposant à l’existence même du consentement.
Interdiction de revendre à perte. De même, l’interdiction de revente à perte, prévue à l’article L442-2 du code de commerce, pourrait être également avancée. En vertu de cet article, il est interdit de revendre ou d’annoncer la revente en dessous du prix d’achat effectif (correspondant au prix unitaire net figurant sur la facture d’achat du commerçant, minoré du montant de l’ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur, exprimés en pourcentage du prix unitaire net du produit et majoré des taxes sur le chiffre d’affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport).
Aussi, sous réserve de certaines exceptions prévues légalement, comme par exemple celles bénéficiant aux produits soldés ou aux produits périssables menacés d’altération rapide, les 3 Suisses ne pourraient, dans ce cadre, revendre les produits affectés d’une réduction de 50% dès lors que le prix de revente serait ainsi inférieur au prix d’achat effectif assumé par l’entreprise.
Enfin, la règlementation des soldes est particulièrement restrictive. Les soldes présentent, en effet, des caractéristiques précises.
– Ils sont accompagnés ou précédés de publicités, ils favorisent l’écoulement accéléré de marchandises en stock, payées, et dont des exemplaires ont été proposés à la vente depuis au moins un mois.
– Ils comportent une annonce de réduction de prix pouvant aller jusqu’à une revente à perte, dans la limite du stock à écouler.
– Ils sont pratiqués pendant des périodes fixes (soldes d’été et d’hiver), ainsi que pendant des périodes complémentaires librement choisies par les commerçants. Une obligation déclarative sur les soldes complémentaires incombe au commerçant. Cette période ne peut se terminer moins de 30 jours avant le début d’une période de soldes fixes. Ce choix aurait, en l’espèce, été impossible compte tenu de la date du bug informatique concerné et de la date des soldes d’été démarrant le 27 juin 2012.
Le groupe nordiste avait déjà été victime par le passé d’un problème similaire. Ce nouvel épisode ne peut qu’appeler à la prudence les commerçants menant une activité de vente en ligne, d’une part concernant la vérification des promotions proposées et, d’autre part, sur la nécessaire réactivité imposée par ce type de circonstances particulières.
1. Cass. ch. com.15/02/1961 et CA de Bordeaux 08/09/1993. Jurisdata n°1993-045357.