Les pigments anticorrosion de SNCZ, l’histoire d’une renaissance
De la Société des couleurs zinciques ne reste qu’un nom remanié en Société nouvelle des couleurs zinciques (SNCZ), et une seule de ses anciennes activités, les pigments anticorrosion. Sauvée en 1984, devenue leader du marché, lauréate de France relance, elle va augmenter sa capacité de production et relocaliser plusieurs activités sur son site de Bouchain – Neuville-sur-Escaut.
«On retrouve nos pigments anticorrosion sur des bâtiments, des ponts, mais aussi sur des machines à laver, détaille Marc Brignou, directeur de l’usine SNCZ. En fait, sur tout ce qui est métallique et soumis aux conditions atmosphériques.» Il s’en est fallu de peu pour que ce ne soit jamais possible.
En 1983, la Société des couleurs zinciques déposait le bilan. C’était une secousse pour Bouchain et Neuville-sur-Escaut, dans le Valenciennois. Depuis la fin de la Première Guerre mondiale, elle fabriquait là blanc de zinc et lithopone, utilisés dans la préparation de peinture.
SCZ, dès 1945, est le principal producteur de pigments zincifères en France. En 1968, elle compte 600 salariés. C’est son âge d’or. Il sera court : le déclin s’amorce dès 1972. Le dioxyde de titane se substitue peu à peu au lithopone, et ça, l’usine n’est pas capable d’en produire. Elle tente de se diversifier. Elle se lance dans la production de phosphate, de chromate, de stéarate de zinc, d’oxydes de zinc spécifiques, de zinc de seconde fusion. Mais au début des années 80, elle se rend à l’évidence : il faut fermer l’usine.
La Société chimique Prayon-Rupel et le groupe Silar voient un potentiel. Ils rachètent le lieu pour un montant symbolique en 1984, insèrent un «N» dans l’ancien nom industriel, se recentrent sur la production de pigments anticorrosion, de chromates de strontium et de phosphates de zinc. Ils repartent avec 25 salariés et, d’emblée, parient sur l’exportation. C’est un bon calcul. L’an passé encore, SNCZ a exporté vers 70 pays plus de 90% de sa production. «Une moitié vers l’Europe, l’autre dans le reste du monde, notamment en Asie», précise Marc Brignou.
25% du marché mondial
SNCZ est, avec ses pigments anticorrosion, sur un marché de niche. «Il n’y a que quelques fabricants dans le monde qui réalisent ce type de produits. Nous, nous représentons 25% du marché mondial.» Certains clients de SCZ ont suivi SNCZ. «Nous passons aujourd’hui par des réseaux de distribution, ajoute le directeur. Nous avons une gamme très large. Elle compte une vingtaine de références, dont la moitié est non dangereuse pour l’environnement.» C’est là la force de l’usine de Bouchain.
Chaque année, elle alloue entre 2 et 3% de son chiffre d’affaires, d’un peu plus de 38 millions d’euros en 2020, à la recherche et au développement de nouveaux produits. «Leur volume a été multiplié par 10 en dix ans, pointe Marc Brignou. Un nouveau produit est commercialisé tous les deux ans, et est à chaque fois non dangereux pour l’environnement.» C’est une demande des clients, une exigence de plus en plus forte des Etats. «On est poussé par les réglementations européennes. Elles influent forcément sur notre développement. Des pays comme la Corée du Sud commencent à faire évoluer leur réglementation dans ce sens aussi. On a une carte à jouer.»
L’usine ne mise pas seulement sur la R&D, faite en interne, pour marquer son empreinte environnementale.
Les repreneurs de SNCZ, en 1984, n’avaient conservé que trois des anciens bâtiments de SCZ et fait détruire le reste du bâti. «Nous avons donc actuellement 20 hectares en zone naturelle boisée, essentiellement par des bouleaux. Nous bordons également l’Escaut sur 700 ou 800 mètres, et tenons à faire de cet espace une zone de biodiversité, une vitrine environnementale.» Le site est classé SEVESO, seuil haut, depuis 2012. «Nous avons obtenu le label or d’Ecovadis en 2020 et 2021, indique Marc Brignou. Il prend en compte à la fois l’aspect environnemental et sécurité.»
SNCZ, détenue entièrement par le groupe belge Silox depuis 1998, n’a pas que ce seul projet pour son unique usine. D’ici 2023, elle compte augmenter sa capacité de production de 30% et en profiter pour relocaliser des productions réalisées jusqu’alors en sous-traitance en Allemagne et en Angleterre. «Nous allons construire un nouvel atelier ici pour soutenir la croissance de nos produits, explique le directeur. Jusqu’ici, il n’y avait pas assez de volumes pour le faire.»
La transition numérique, engagée il y a un peu plus de trois ans, va s’accélérer elle aussi. La digitalisation va lui permettre d’acquérir plus de données encore sur les processus de production et les flux. France relance la soutient de 800 000 euros pour réaliser ces deux tournants.
«Il y aura probablement de la création d’emplois, confie Marc Brignou. Un site sort de terre, l’autre va grossir. Nous aurons sûrement besoin de 5 à 10 emplois de plus. Nous sommes aujourd’hui 70 ici. L’effectif a augmenté de 40% en dix ans.»
Et il est assez fier de sa politique de RSE. «Nous travaillons l’ergonomie au travail, mais aussi l’égalité hommes-femmes. Depuis deux ans, nous avons la parité en dehors des ateliers.»