Visite de Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de l’Europe, à Boulogne-sur-Mer
Les pêcheurs menacés par les aires maritimes protégées britanniques
Le 29 mars dernier, Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de l’Europe, s’est rendu à Boulogne-sur-Mer pour échanger avec les pêcheurs autour des aires maritimes protégées britanniques.
Depuis le vendredi 22 mars, plus aucun bateau ne peut prélever de poissons dans les eaux britanniques. Plus précisément dans plus de 13 zones marines, dont 3 se situent dans la Manche et la Mer du Nord. Ces aires ont été déployées pour protéger la biodiversité. Mais l’argument passe mal du côté du port de Boulogne-sur-Mer, premier port de pêche de France, qui représente à lui seul plus de 28 000 tonnes par an de poissons.
Une taxe pour les Britanniques ?
C’est dans cette atmosphère tendue que Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de l’Europe, a fait une halte le 29 mars dernier, au Comité régional des pêches maritimes et des élevages marins pour écouter les préoccupations des pêcheurs et élus locaux. «Entre le Covid, le Brexit, les licences de pêche et puis maintenant ces zones qui ont été mise en place sans aucun fondement scientifique, les pêcheurs payent un lourd tribut», s’est indigné Olivier Leprêtre, président du comité régional des pêches. «Pourquoi laisse-t-on les Britanniques tout faire ? Que fait l’Europe ?». Des questions que se posent bon nombre de pêcheurs, qui demandent aux pouvoirs publics de trouver des compromis.
Jean-Noël Barrot s’est voulu rassurant. «La France soutient ses pêcheurs pour diverses raisons : souveraineté alimentaire, justice... Nous résistons aux décisions arbitraires du Royaume-Uni». Pour autant, aucune mesure n’a été prise à l’heure actuelle. Mais la France va travailler, ces prochains mois, avec huit pays européens sous la forme d’une coalition pour protéger ses pêcheurs. Le ministre laisse ainsi entendre que des mesures de rétorsion européennes pourraient être mises en place. «Nous pensons à installer une taxe pour les Anglais qui viendraient faire transformer leurs produits maritimes sur Boulogne», a envisagé Jean-Noël Barrot. Un engagement salué par le comité régional des pêches. Le gouvernement sera d’autant plus vigilant lors des prochaines négociations, prévues en 2026, entre l’Union européenne et le Royaume-Uni en matière de coopération et de commerce.
Petite satisfaction pour la filière, le ministre a également annoncé l’autorisation d’agrandissement de la flotte de pêche française, qui était refusé depuis 2015. «On en a besoin puisque sur quinze ans, nous avons perdu plus de la moitié de nos bateaux», a renchéri le président du comité régional des pêches.
Des conséquences désastreuses
Au total, ce sont plus de 110 bateaux du Nord-Pas-de-Calais qui se trouvent privés de lieux de pêche. «Nous avons perdu plus de 150 km2 de surface. On y pêchait principalement de l’encornet entre octobre et janvier, mais aussi d’autres poissons», explique Nicolas Margollé, au bord du chalutier familial, le Nicolas-Jérémy. Ces 13 zones protégées, désormais interdites, représentaient plus de 30% de leur chiffre d’affaires annuel. Mais les marins du Nicolas-Jérémy n’ont d’autre choix que de se passer de la zone de Goodwind Sands, sous peine d’amende. «Nous allons nous adapter sur les zones françaises. Mais avec toute la flottille, il y aura trop de trafic. Ce qui impactera les ressources halieutiques», a attesté le pêcheur.
Les impacts à long terme seront conséquents pour la filière. Avec une forte concentration, les ressources seront surexploitées. Ce qui va impacter plus de 5 000 emplois directs et indirects dans le Boulonnais. «Les professionnels pourraient perdre jusqu’à 50% de leur chiffre d’affaires annuel», a tablé Stéphane Pinto, vice-président du comité régional des pêches. Certains pêcheurs commencent même à douter de leur avenir. Mais le président du comité régional veut se montrer optimiste. «La pêche n’est pas morte. Il faut lui redonner un nouveau souffle et donner de l’espoir aux jeunes. On doit aussi s’adapter à l’écologie en construisant des bateaux moins énergivores».