Les entreprises incitées à transiger avec les Direccte

Les entreprises incitées à transiger avec les Direccte

D.R.

L’Autorité de la concurrence a adopté sa première décision dissuadant les entreprises de refuser une transaction avec la Direccte1, dans le cas d’une pratique anticoncurrentielle locale.

L’Autorité de la concurrence a rendu, le 27 janvier dernier, sa première décision dans le cadre d’une saisine du ministre de l’Economie faisant suite au refus de quatre entreprises de transport scolaire par autocar de transiger avec ses services. En matière de pratiques anticoncurrentielles, l’article L. 464-9 du Code de commerce confère, en effet, au ministre de l’Economie le pouvoir d’enjoindre et/ou de transiger avec des entreprises parties à des pratiques anticoncurrentielles de dimension locale. Dans ce cas, le montant de la transaction ne peut excéder 150 000 euros ou 5% du dernier chiffre d’affaires, si cette valeur est plus faible. En cas de refus de la transaction, le ministre doit transmettre le dossier à l’Autorité de la concurrence. C’est ce qu’il a fait pour la première fois, dans une affaire relative au transport scolaire par autocar dans le département du BasRhin, quatre entreprises sur sept impliquées ayant refusé la transaction proposée. Dans ce cas, le plafond de l’amende encourue est de 10% du chiffre d’affaires mondial du groupe concerné.Dans cette affaire, il était reproché aux sociétés de transport scolaire d’avoir constitué un groupement en vue de l’attribution de marchés annuels de transport scolaire organisés par le conseil général du Bas-Rhin, alors que ce groupement ne répondait à aucune justification légitime et qu’il empêchait l’émergence d’offres concurrentes.

Amendes alourdies et publicité. L’affaire a donc été transmise à l’Autorité de la concurrence après que les entreprises aient refusé de transiger. Bien mal leur en a pris, puisque certaines ont écopé d’amendes sensiblement supérieures à celles proposées par le ministre de l’Economie, dont une au-delà du plafond légal de 75 000 euros (plafond en vigueur à l’époque des faits, relevé depuis à 150 000 euros par la loi Hamon sur la consommation du 17 mars 2014). Au total, les quatre entreprises d’autocars ont été condamnées à une amende de plus de 190 000 euros. En outre, l’Autorité a ordonné de publier le résumé de la décision dans le quotidien Les Dernières Nouvelles d’Alsace et la revue Transport Public, ce que n’exigeait pas le ministre. En adoptant une décision circonstanciée de plus de 40 pages, le message du gendarme de la concurrence est clair : transigez avec le ministre car devant l’Autorité l’amende risque d’être plus salée ! Sans compter les frais induits par une procédure devant l’Autorité, longue et complexe… Avec cette décision, les entreprises sont clairement encouragées à transiger avec les services du ministre de l’Economie (Direccte) pour les pratiques anticoncurrentielles locales entrant dans le champ d’application de l’article L. 464-9 du Code de commerce. Et l’Autorité de la concurrence appréciera certainement de ne pas voir ses services encombrés par des dossiers qu’elle considère mineurs, pour se concentrer sur les affaires de cartels ou les ententes ou abus de position dominante les plus significatives.

                                                                                                                      Laurent FRANÇOIS‑MARTIN, avocat associé, barreaux de Lille et de Bruxelles,                                                                                                                       département Concurrence/Distribution et PI-TI/laurent-francois.martin@fidal.com