Les endiviers tirent la sonnette d’alarme

La forte augmentation du prix de l’électricité met en péril les producteurs d’endives. La hausse du coût des emballages et les longues périodes de sécheresse noircissent encore un peu plus un tableau déjà bien sombre...

Une fois à maturité, l'endive est en mise dans une coupeuse afin de la détacher de la racine. © Aletheia Press/B.Dequevauviller
Une fois à maturité, l'endive est en mise dans une coupeuse afin de la détacher de la racine. © Aletheia Press/B.Dequevauviller

Philippe Bréhon est désemparé. Ce producteur de 3 000 tonnes d’endives par an, installé à La Couture, dans le Pas-de-Calais vient de tirer la sonnette d’alarme, pour lui, pour les 48 saisonniers qu’il emploie mais aussi pour tous les producteurs d’endives. Car la filière est aujourd’hui menacée par l’augmentation exponentielle des tarifs de l’électricité. «En 2016, on payait le mégawattheure 36 euros, explique-t-il. Aujourd’hui, il est à 800 euros.» Et ce n’est pas terminé : le tarif annoncé dernièrement pour 2023 est de 1 000 euros.

Or, cultiver l’endive nécessite une grosse quantité d’électricité. Entre le stockage des racines dans d’immenses frigos afin de les refroidir, puis conserver les bourgeons entre -2 et -3 degrés, avant de les placer dans des salles de forçage pour les faire grandir, les producteurs d’endives tirent sur leurs compteurs électriques tout au long du processus de production.

«Nous sommes en train de négocier nos nouveaux contrats d’énergie», poursuit Philippe Bréhon, également coprésident du syndicat des endiviers. Ils doivent être finalisés avant le 15 novembre prochain. Donc la pression monte, avec en toile de fond le risque d’un dépôt de bilan pour plusieurs exploitations régionales. "Pour 2022, ma facture d’électricité va s’élever à 210 000 euros. Avec ce qu’on nous propose sur le nouveau contrat, nous serons à 800 000 euros en 2023. A ce prix-là, il faut arrêter tout bonnement la production."

Philippe Bréhon assure que les endiviers ne résisteront pas à l'augmentation exponentielle du coût de l'électricité. © Aletheia Press/B.Dequevauviller


30% d’augmentation du prix des emballages

Le 26 août, Philippe Bréhon a donc invité Marie-Sophie Lesne. Quoique compatissante, la vice-présidente de la Région Hauts-de-France en charge de l’agriculture n’a somme toute pas grand-chose à proposer, si ce n’est d’inciter les endiviers à vite se tourner vers les énergies alternatives, pointant du doigt tout l’intérêt d’équiper leurs installations en photovoltaïque. Elle a d’ailleurs promis aux endiviers «un dispositif d’avances remboursables», afin de faire face à la frilosité des banques en matière d’investissement…

Pour ne rien arranger, Philippe Bréhon a aussi soulevé le problème de l’augmentation de 30% du prix des emballages. Et ce n’est pas tout : «Avec les nouvelles directives et l’interdiction prochaine d’utiliser le plastique, on va même passer de 2 ou 3 centimes à l’unité à plus de 12 centimes avec l’emballage papier», s’inquiète-t-il. Que dire aussi de la sécheresse qui fait peser de vives inquiétudes sur la pousse des racines dans les champs, au début du processus de production. «On va avoir 30% de pertes sur des parcelles…»

Un danger pour toute la filière

Aujourd’hui, c’est toute la filière, un des fleurons régionaux, qui est en danger. Car, bien sûr, les effets sont mécaniques. En clair, une hausse des coûts de production implique une hausse du prix de vente pour le consommateur, avec le risque à court terme d’une baisse de la demande et donc des volumes pour les producteurs. «L’endive se vend 3,5 euros, sur lesquels le producteur touche 1,5 euro.» Alors, pourquoi ne pas récupérer une partie des 2 euros engloutis par les intermédiaires, afin de soutenir les producteurs ?