Etude du groupe Altares, spécialiste des données sur les entreprises
Les défaillances d’entreprise retrouvent leur niveau d’avant la crise sanitaire
Après être resté à des niveaux historiquement bas depuis deux ans, le nombre d’ouvertures de procédures collectives a enregistré une forte hausse ce premier trimestre, renouant avec les niveaux observés en 2019.
Après deux années atypiques, l’année 2023 renoue avec des niveaux habituels sur le terrain des défaillances d’entreprises (ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire directe). C’est ce que dévoilent les chiffres récemment publiés par le groupe Altares, spécialiste des données sur les entreprises. Avec 14 317 procédures collectives ouvertes ce premier trimestre 2023, le niveau des défaillances a augmenté de près de 44% par rapport aux trois premiers mois de 2022, retrouvant les niveaux d’avant crise.
Forte hausse des sauvegardes, des redressements et liquidations judiciaires
Le nombre de procédures de sauvegarde a augmenté de près de 40% ce premier trimestre. Réservées aux entreprises qui ne sont pas en cessation de paiement, elles ne représentent toutefois que 2% de l’ensemble des défaillances. Le nombre de procédures de redressement judiciaire s’est, pour sa part, accru de près de 50% sur la période. Elles représentent près d’une décision sur quatre (23%) et visent des structures de plus grande taille. Enfin, le nombre de liquidations judiciaires directes prononcées ce premier trimestre a augmenté de près de 42%, atteignant son plus haut niveau depuis 2017.
Nette hausse des défaillances de PME et ETI
Dans ce contexte, les très jeunes entreprises font preuve d’une résistance inhabituelle. Seules 1 520 entreprises de moins de trois ans ont fait défaut au premier trimestre, soit 21% de moins sur un an. Si les TPE (moins de 10 salariés) demeurent, et de loin, les plus fragiles (92% des défaillances), le nombre de PME et ETI défaillantes a enregistré une hausse de 59% sur un an, atteignant un niveau supérieur à ceux enregistrés début 2016. En ce début d’année, les défaillances de PME ont été particulièrement nombreuses dans le secteur du textile-habillement, suivi du bâtiment, du transport routier de marchandises, de la restauration et des activités sociales (aide à domicile et action sociale, en particulier). Sur les 59 000 emplois menacés, 12 000 concernent Orpea (groupe d’Ehpad), en procédure de sauvegarde accélérée.
Des augmentations variables selon les régions
Le nombre d’ouvertures de procédures collectives a plus que doublé en Corse (+120%) au cours du premier trimestre, mais il dépasse à peine son niveau de 2020. Cinq régions ont en revanche enregistré, début 2023, des niveaux de défaillances nettement supérieurs à ceux observés début 2018 : la Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie, les Hauts-de-France, les Pays-de-la-Loire et la Bourgogne-Franche-Comté. La plupart des autres régions affichent des niveaux proches des valeurs du premier trimestre 2019. En Île-de-France, la barre des 3 000 procédures est ainsi dépassée pour la première fois depuis début 2019. Seules la Normandie, le Grand-Est et les départements et territoires d’Outre-mer sont encore bien en deçà des niveaux de 2019.
Les secteurs d’activité retrouvent au mieux leurs valeurs de début 2019
Les agences immobilières, le commerce de détail, alimentaire et multi-rayons, en particulier, (le sport et loisirs, l’habillement, l’optique et le soin de la personne résistent mieux), la restauration et les transports routiers de marchandises font partie des secteurs les plus fragilisés. La construction est également touchée tout en se maintenant à un niveau inférieur à celui d’avant crise, du fait de la bonne résistance du BTP. Dans l’agroalimentaire, les défaillances ont en revanche atteint leur plus «haut», depuis plus de dix ans, alors que la hausse est limitée dans l’agriculture, où elle atteint un niveau proche de début 2020.
Enfin, on observe que l’augmentation des ouvertures de procédures, qui était davantage concentrée sur les activités à destination du consommateur en 2022, s’est étendue aux activités B to B (services administratifs, conseil en communication et gestion, services d’architectures et d’ingénierie, activités scientifiques et techniques), début 2023.
Les prémisses d’une forte accélération ?
Selon le directeur des études du groupe Altares, Thierry Million, cette tendance s’explique par le ralentissement économique, l’inflation, l’essoufflement des trésoreries et un accès au financement devenu plus compliqué. «Plus qu’une normalisation c’est à un fort rebond des défaillances d’entreprises que notre économie doit faire face. Le retour à la situation avant Covid, 2019, est déjà là, et c’est désormais 2018 et ses 55 000 défauts qui est en ligne de mire.» Après avoir enregistré une forte croissance en 2017, l’économie française a connu une phase de net ralentissement en 2018.