Les collectivités locales s'attaquent au vrac
Vendre en vrac permet d'éviter le plastique, limite les frais de recyclage, favorise les circuits courts... Cherchant à encourager des modes de développement plus durables, des régions commencent à se saisir de cet enjeu et s'appuient sur Réseau Vrac, association qui promeut la démarche.
Pourquoi donc une région se lancerait-elle dans la promotion du vrac, qui consiste à vendre et à acheter des produits sans emballage ? «Le vrac constitue une aide à la réduction des déchets, à la consommation responsable, à la lutte contre le gaspillage alimentaire et aussi, à la création d'emplois locaux», répond Stéphanie Modde, vice-présidente de la Région Bourgogne-Franche-Comté, en charge de la transition écologique. Le 6 décembre dernier, elle participait – en visio- à une matinée de décryptage consacrée à «La France du vrac : les dynamiques territoriales». L'événement était organisé par Réseau Vrac, association qui promeut cette démarche (1 900 adhérents). Et Bourgogne-Franche-Comté est la première région à annoncer la signature d'une convention avec cette association (et l'Ademe, Agence de la transition écologique). Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) et Centre-Val de Loire s’apprêtent à faire de même.
Si les collectivités s'intéressent au vrac, c'est parce que cette pratique peut s'intégrer dans des politiques publiques existantes, par exemple en matière de prévention et gestion des déchets. A ce sujet, le plan bourguignon prévoit une diminution de ceux ménagers de 20% d'ici 2031. Et «le vrac représente l'une des solutions pour atteindre cet objectif», explique Stéphanie Modde. «C'est un outil intéressant» pour trois raisons, confirme Marie-Pierre Martinet, directrice générale adjointe «Mobilisation, publics et territoires» au Syctom, l’agence métropolitaine des déchets ménagers en Île-de-France.
Pour elle, le vrac permet la réduction des emballages, et donc, des déchets. Mais il comporte d'autres vertus (moins apparentes), liées au fait qu'il s'inscrit dans une consommation responsable : «lorsque les consommateurs adoptent le vrac, ils améliorent la qualité du tri» et donc, la gestion des déchets destinés à être ré-exploités. Par ailleurs, «c'est un moyen de lutte contre le gaspillage alimentaire, car cela augmente la conscience de l'aliment», note Marie-Pierre Martinet.
C'est donc une multitude d'enjeux qu'adresse cette pratique... En Bourgogne, la Région prévoit un effort de promotion auprès du grand public et des acteurs déjà engagés dans le vrac, pour stimuler la création d'un écosystème. Et la convention nouée avec Réseau Vrac prévoit la formation d'agents public, aux profils différents : chargés de mission prévention déchet, économie circulaire, responsables de la restauration scolaire, acheteurs... La commande publique peut en effet aussi constituer un outil de développement du vrac.
La crise ne stoppe pas le vrac
Aujourd'hui,
au niveau national, le vrac représente un marché de 1,3 milliard
d'euros environ, en croissance depuis cinq ans, même si le rythme de
celle-ci s'est ralenti depuis la crise, selon Réseau Vrac. «Nous
avons une base stable de consommateurs, une offre grandissante, un
parc de magasins qui s'équipent, d'autres qui grandissent, et un
cadre législatif qui l'encourage»,
résume Célia
Rennesson, cofondatrice
et directrice générale de l'association. Par circuit de
distribution, le marché se répartit entre la grande-distribution
(50%), les magasins bio (45%), et les boutiques spécialisées dans
le vrac (5%). Et des différences apparaissent aussi entre les
régions, montre une étude de Réseau Vrac. Ainsi, au niveau
national, 37% des foyers déclarent acheter en vrac. Mais Normandie,
Bretagne, Provence et Languedoc comptent plus d'adeptes. A l'inverse,
ils sont moins nombreux en Champagne, Alsace, et en Nord-Picardie...
Les motivations des acheteurs aussi peuvent varier en fonction
de leur localisation. Au plan national, la première raison invoquée
par les adeptes du vrac réside dans le fait de pouvoir acheter la
juste quantité de produits. La deuxième, dans la réduction des
déchets d'emballages. C'est cette dernière que privilégient ceux
qui ont opté pour le vrac en Bourgogne, Auvergne, et Touraine. Les
habitants d’île-de-France, eux, privilégient la première
motivation. «En
île-de-France, le vrac constitue une réponse au fait que les
foyers sont souvent petits, et qu'ils ne disposent pas de beaucoup de
place pour stocker»,
analyse Célia
Rennesson.
Par ailleurs, «pour
les urbains qui vivent dans des zones denses, et qui font des longs
transports quotidiens, transporter ses sacs de vrac constitue un
véritable défi»,
note Marie-Pierre
Martinet.
Bref, le vrac s'adapte aux modes de vie existants, comme l'illustre
aussi les types de produits les plus achetés. Par rapport à la
moyenne nationale, Nord et Picardie surconsomment ainsi le café en
vrac. En PACA, on préfère confiseries et olives. Dans les Alpes et
le Jura, les gâteaux..