Les ambitions d’un groupe régional et familial
Baudelet environnement est devenu le principal industriel indépendant de la région Nord- Pas-de-Calais. Installé à Blaringhem dans son “écoparc”, le groupe repose sur trois pôles et quelques centres de collecte qui tissent peu à peu les territoires du Nord-Pas-de-Calais. Centenaire en 2020, Baudelet compte près de 300 salariés et se donne de nouvelles ambitions. Rencontre avec les deux dernières générations.
C’est une histoire familiale. Mme Eugène Baudelet fonde l’entreprise à Hazebrouck en 1920. A l’époque, l’entreprise fait du négoce de matériaux de récupération telle la ferraille. En 1964, premier tournant à Blaringhem avec l’implantation de la société qui obtient en 1976 l’autorisation d’y exploiter une décharge. Une bonne décennie plus tard, les dirigeants de l’époque construisent une première affinerie d’aluminium dont les fours sont déjà alimentés au biogaz. En 1999, Baudelet inaugure le transport par voie fluviale de ses matières… Ainsi, depuis une vingtaine d’années, le groupe anticipe les mouvements qui tendent vers l’économie écologique. Aujourd’hui, elle en a fait une industrie globale qui ne s’arrête plus. Et la troisième génération est en passe de prendre les commandes pour s’étendre encore. “On procède à un double développement, interne et externe”, indique Bernard Poissonnier, directeur général du groupe depuis 30 ans. Sa fille et son gendre font partie des jeunes cadres de l’entreprise qui oeuvre dans les déchets, les métaux et les terres. “Baudelet environnement est spécialisé dans la valorisation et le traitement des déchets non dangereux, des
ferrailles et métaux, et de la dépollution des terres polluées”, résume Caroline Poissonnier. Le site de Blaringhem se veut exemplaire : lors de son inauguration, en septembre 2010, la direction parlait d’un “parc”. Ce dernier accueille 300 000 tonnes de matières non dangereuses par an, bien que taillé pour en traiter le double. “On copie des pays comme la Belgique ou l’Allemagne. Sauf que les conditions tarifaires ne sont pas les mêmes”, soupire le dirigeant qui prêche pour “une juste valorisation du traitement des déchets au juste prix”. Et d’ajouter : “Le traitement doit concourir à la production d’énergie et ne pas se résumer à l’incinération.”
Un digesteur opérationnel dans les six mois. Pour continuer à se développer et à répondre aux demandes publiques et privées, Baudelet anticipe. “Nous avons une autorisation de stockage de déchets jusqu’en 2021. Nous souhaitons une prolongation de l’autorisation via un rehaussement du site dédié au stockage (100 hectares sur 300 que compte l’ensemble du site)”, explique le dirigeant. “Sept bureaux d’étude ont travaillé sur ce dossier” renchérit sa fille. L’ensemble devrait consister en la réalisation d’une pente douce intégrée dans le paysage, le tout revégétalisé avec un réseau de ruissellement adapté. Ce tumulus servira à produire du biogaz qui, brûlé, viendra s’ajouter à la production d’électricité du site de Blaringhem et pourvoira pour moitié à son alimentation… Baudelet entend montrer que la valorisation a beaucoup de marge. “Nous pouvons capitaliser sur les synergies et les pérenniser. Le but est d’utiliser le moins de ressources possibles”, ajoute Caroline Poissonnier. Baudelet s’affaire à la réalisation d’un autre projet d’ampleur : la construction d’un digesteur pour les matières organiques, dimensionné pour 30 000 tonnes par an et qui coûtera 10 millions à l’entreprise. La cible réside dans les industriels de l’agroalimentaire – et des restaurateurs –, gros producteurs de biodéchets. L’idée est de compartimenter l’installation sous forme de “garages” qui seront remplis au fur et à mesure de l’arrivée des matières. Avec ce nouvel équipement, Baudelet évitera au passage que ces déchets n’entrent dans la catégorie des produits taxés. Actuellement en chantier, l’installation devrait être opérationnelle au premier trimestre 2013. A travers ce nouvel équipement, Baudelet produira également une nouvelle forme de combustible : “Les industriels paramètrent leurs fours pour pouvoir accueillir de nouveaux combustibles. Avec notre centre de traitement de biodéchets, nous valoriserons les produits en partie en réalisant une fraction sèche.” Ainsi, les industriels clients bénéf icieront d’un retour partiel de leurs déchets. Un échange de bons procédés, une fidélisation à toute épreuve et un coup double pour l’environnement.
Un projet pour la troisième génération. Cette démarche s’inscrit dans une stratégie de production de bioproduits commencée à petite échelle. Exemple : le produit pour pare-brise lancé il y a plus d’un an à partir des déchets de lixiviats. Ces écoproduits doivent trouver leur place dans les réseaux de petite et grande distribution. “Avec le liquide de lavage pour parebrise, nous travaillons sur le concept de recharge auprès des transporteurs mais c’est surtout pour faire de la pédagogie”, explique Caroline Poissonnier. Dernier en date des projets du groupe : “G3”, pour “ troisième génération”, sourit Bernard Poissonnier. Au programme, un centre de valorisation organique pour les déchets ménagers, une unité de méthanisation assortie d’une unité de production “combustible solide et récupération” (CSR). Il faudra pour cela une autorisation pour exploiter ce qu’on appelle aujourd’hui une “installation de stockage des déchets non dangereux” (ISDND). Une enquête publique avec avis favorable s’est terminée en juin dernier. Le dossier est en cours d’examen par les services de l’Etat. Le Conseil de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) s’est prononcé dernièrement (à l’heure où nous mettons sous presse, la décision ne nous est pas encore connue). Si elle était favorable, elle donnerait au groupe un nouveau coup d’accélérateur mais devrait aussi s’appuyer sur une collectivité pour démarrer avec des volumes conséquents. La dernière décennie a vu Baudelet tripler son chiffre d’affaires (110 millions d’euros en 2011).