Les Alchimistes : la boucle vertueuse des biodéchets en ville

Difficile quand on vit en ville de pouvoir valoriser ses biodéchets. Pourtant, les volontés ne manquent pas. Initiés à Paris, Les Alchimistes ont démarré leur activité en juin dernier sur le site de l'ancienne gare Saint-Sauveur, à Lille. Ce site de production de compost a déjà traité 14 tonnes de biodéchets et produit une tonne de compost.

Un vélo pour aller chercher les bio-déchets.
Un vélo pour aller chercher les bio-déchets.

Le composteur tourne déjà à plein régime. Il collecte tous les déchets organiques biodégradables – en ville, principalement les déchets alimentaires – pour éviter qu’ils ne soient détruits ou incinérés. Foucauld Watine et Lucas Gauthier sont à l’origine de l’émanation de ce projet né à Paris en 2017. Dans son budget participatif de 2018, la Ville de Lille avait voté le test d’un composteur électromécanique. Le démonstrateur des Alchimistes, au sein du Cours St-So à Lille, en est le premier test grandeur nature dont l’objectif est affiché : valoriser 4 000 tonnes de biodéchets par an sur le territoire de la MEL. Une première étape dans le projet des deux associés qui voient déjà plus grand : «A terme, nous aurons des sites 20 fois plus grands, qui pourront traiter 700 tonnes par an», explique Foucauld Watine. D’abord destiné à sensibiliser les habitants, ce démonstrateur collecte des biodéchets dans un rayon de 10 km : «Nous nous opposons à la destruction de la ressource grâce à la proximité et à l’inclusion. Un déchet bien valorisé et bien trié a un impact plus limité pour la planète.» Si le déchet collectif émane de la compétence de la MEL et du fait que la moitié des habitants disposent d’une solution de tri, l’autre moitié reste demandeuse. Les Alchimistes ont déjà déployé trois bornes en ville : devant les magasins Biocoop de la rue du Molinel et Solférino et à la gare Saint-Sauveur. Déjà 200 inscrits y amènent chaque semaine leurs biodéchets. Une fois produit, le compost servira à fertiliser les sols urbains ou les cultures maraîchères de proximité : 150 t de compost permettent de nourrir un espace de 15 hectares.

Au Cours St So, les Lillois peuvent venir déposer leurs biodéchets, qui seront ainsi revalorisés.

Se rapprocher des restaurateurs

Collecter, composter, mais aussi agir pour l’environnement, Les Alchimistes ont de même démarré leur collecte auprès des professionnels producteurs de biodéchets, principalement des restaurateurs. Pokawa, La Luck, Ripaille, Mother… ils sont déjà une vingtaine à s’être engagés dans la valorisation. «Le seuil légal de 10 t par an (soit un restaurant de 250 couverts, ndlr) va baisser à 5 t au 1er janvier 2023. Les professionnels ont besoin d’avoir accès à un système de valorisation, surtout quand ils n’ont pas de système de tri à la source. Et la qualité de service ne correspond pas toujours à leur activité car il est conçu pour les particuliers», précise Foucauld Watine. Les Alchimistes veulent augmenter par trois leur zone de chalandise et répondre aussi aux demandes des cantines d’entreprise, des établissements scolaires… Après avoir expérimenté la collecte en vélo, Foucauld et Lucas se sont équipés d’un véhicule dédié. Ils réalisent également de la vente directe auprès de l’ISA (école d’ingénieurs agriculture agroalimentaire), mais aussi en vrac au Biocoop rue du Molinel. Une boucle vertueuse que veulent impulser Les Alchimistes : «Nous ne sommes pas que des acteurs du traitement des déchets : nous souhaitons une collecte et une production propre en proposant une solution de tri adéquate pour réaliser du compost de qualité, très précieux dans la lutte contre le réchauffement climatique.» Hébergés chez l’incubateur Evident! depuis septembre 2020, Les Alchimistes ambitionnent de créer trois emplois par site. A Paris, Les Alchimistes comptent 116 points de collecte ; le concept est déjà étendu à huit villes de France. A Lille, Foucauld Watine et Lucas Gauthier peuvent compter sur l’engouement régional pour l’économie circulaire.