L’ère de l’Homo periurbanus…
En pleine réforme de la PAC (Politique agricole commune) et de l’élaboration des nouvelles aides financières devant soutenir le monde rural à s’associer réellement au développement économique de son territoire, l’Insee Lorraine vient de faire paraître une étude, intitulée «le rural lorrain : plus dynamique autour des villes». À côté des zones périurbaines actives où l’essence même de la ruralité tend à disparaître, se distinguent des zones dites «rurales isolées» où précarité et désertification sont lois. Bienvenue dans l’ère des ségrégations territoriales et sociales.
D’un côté un rural urbain, affichant un dynamisme démographique et une économie résidentielle, investi par les nouveaux «Homo periurbanus». De l’autre un rural précaire, vieillissant et en souffrance. La ruralité en Lorraine : côté pile et côté face. Une ruralité régionale à deux visages : un bon et un mauvais. «Le renouveau démographique récent des espaces ruraux lorrains est porté avant tout par les espaces périurbains proches des agglomérations de Nancy et de Metz et de la bande frontalière avec le Luxembourg. Dans les espaces ruraux proches des autres pôles d’emploi, la réduction des emplois industriels, aggravée depuis 2008, met en évidence, le déficit de diversification économique et de l’attractivité des territoires», peut-on lire dans l’enquête de l’Insee régional, «le rural lorrain : plus dynamique autour des villes » présentée la semaine dernière (disponible sur le www.insee.fr/lorraine). «Dans les espaces ruraux isolés, l’agriculture participe pleinement à la structuration de l’espace et conserve son rôle économique de premier plan, mais les revenus dépendant majoritairement des transferts sociaux, leur diminution pourrait peser sur l’équilibre territorial régional au détriment d’une population déjà fragilisée.»
Rural qui rit, rural qui pleure…
Une photographie régionale de la ruralité en six clichés principaux. Des zones périurbaines riches et dynamiques, à l’image des agglomérations nancéienne et messine, peuplées aujourd’hui de ces fameux «Homo periurbanus», en général des couples bi-actifs travaillant la journée en ville et rentrant le soir en campagne. Des zones périurbaines avec de grands pôles d’emploi, à l’image de Lunéville, Briey, Pont-à-Mousson ou encore Bar-le- Duc, Verdun, Thionville et Saint-Dié-des- Vosges : «dans ces espaces on retrouve le même phénomène de périurbanisation qu’autour de Nancy et Metz, mais il est plus récent et moins intense». Des zones périurbaines avec des petits pôles d’emploi, comme l’Ouest vosgien et le Sud-Est meusien «nécessitant aujourd’hui un redéploiement et une revitalisation économique.» Les zones frontalières, essentiellement aux abords du Grand-Duché de Luxembourg qui s’affichent comme un puissant aimant. Dernière catégorie : le rural isolé, notamment au pied du Donon, dans l’Argonne, dans la Vôge et dans le Sud meusien : «cet espace est éloigné des zones de croissance du Sillon lorrain et de la bande frontalière.» Cette cartographie de la ruralité régionale n’est en fait qu’une vision de la mouvance sociétale actuelle. L’Insee s’interroge légitiment : «va-t-on vers la fin de la solidarité nationale et le début d’un chacun pour soi territorial ?» L’enjeu des politiques publiques est de tenter de limiter ce nouveau type de ségrégation territoriale que l’observation des phénomènes socioéconomiques récents laisse augurer.