L’entreprise et les salariés
Durée du travail : temps partiel
Une cour d’appel ne peut débouter une salariée de sa demande de requalification de contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet alors qu’elle a constaté que le contrat ne mentionnait pas la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail et ne répondait pas aux exigences légales. Elle ne peut, en effet, écarter la présomption de travail à temps complet qui en résulte, sans rechercher si l’employeur justifiait de la durée de travail exacte convenue. (Cass. soc., 3 juillet 2019, pourvoi n° 17-15884).
Rémunération : titres-restaurant
Les sommes consacrées par l’employeur pour l’acquisition par le salarié de titres-restaurant n’étant pas versés en contrepartie du travail, elles n’entrent pas dans le calcul de la rémunération à comparer avec le salaire minimum conventionnel. (Cass. soc., 3 juillet 2019, pourvoi n° 17-18210).
Rupture conventionnelle : procédure
Seule la remise au salarié d’un exemplaire de la convention de rupture signé des deux parties lui permet de demander l’homologation de la convention et d’exercer son droit de rétractation en toute connaissance de cause. Dès lors, pour la Cour de cassation, une cour d’appel ne saurait dire valable la rupture conventionnelle, malgré l’absence de signature de l’employeur sur l’exemplaire de la convention remis au salarié. (Cass. soc., 3 juillet 2019 pourvoi n° 17-14232). Une cour d’appel ne peut débouter un salarié de sa demande de nullité de la rupture conventionnelle sans constater qu’un exemplaire de la convention de rupture lui avait été remis. (Cass. soc., 3 juillet 2019, pourvoi n° 18-14414).
Contrat de travail : clause de non-concurrence
Une cour d’appel ne peut déclarer nulle une clause de non-concurrence au regard de sa seule étendue géographique, la clause étant, en l’espèce, applicable en Europe et dans la zone Asie-Pacifique, sans rechercher si le salarié se trouvait dans l’impossibilité d’exercer une activité conforme à sa formation, à ses connaissances et à son expérience professionnelle (Cass. soc., 3 juillet 2019, pourvoi n° 18-16134).
CDD : rupture
Le Code du travail prévoit que la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l’initiative de l’employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat. Le texte fixe seulement le minimum des dommages-intérêts que doit percevoir le salarié dont le CDD a été rompu de façon illicite. En l’espèce, la cour d’appel avait relevé que la rupture illicite des CDD avait empêché la réalisation de deux des albums faisant l’objet des contrats. Elle a ainsi pu retenir que les salaries justifiaient d’un préjudice direct et certain résultant de la perte d’une chance de percevoir les gains liés à la vente et à l’exploitation de ces œuvres, préjudice qui constitue une suite immédiate et directe de l’inexécution de la convention. C’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation que la cour, sans procéder à une evaluation forfaitaire, a fixé le montant du prejudice soumis à réparation. (Cass. soc., 3 juillet 2019, pourvoi n° 18-12306).
Contentieux et contrôles Urssaf
Opposition à contrainte : à qui la preuve ? En matière d’opposition à contrainte, il incombe à l’opposant de rapporter la preuve du caractère infondé de la créance dont le recouvrement est poursuivi par l’organisme social, comme l’a d’ailleurs jugé la Cour de cassation. (Rennes, 9e Ch. Sécurité Sociale, 3 juillet 2019, RG n° 16/09471).
Travail dissimulé : pas d’obligation pour l’Urssaf d’envoyer le PV au cotisant. L’organisme n’est pas tenu de joindre à la lettre d’observations le procès-verbal constatant le délit de travail dissimulé à l’origine du redressement litigieux. (Nîmes, Chambre sociale, 2 juillet 2019, RG n° 17/01931).
Dissimulation d’emploi salarié : pas d’obligation d’établir l’intention frauduleuse de l’employeur. Lorsque le redressement Urssaf procède du constat d’infraction de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié, il a pour objet exclusif le redressement des cotisations afférentes à cet emploi, sans qu’il soit nécessaire d’établir l’intention frauduleuse de l’employeur : le contrôle n’a pas pour finalité de poursuivre une sanction, mais de recouvrer les cotisations dues. (Nîmes, Chambre sociale, 2 juillet 2019, RG n° 17/01931).
Contrôle par sondages : procédure. Le contrôle par sondages ou extrapolation est réservé aux grandes entreprises, sous réserve de l’accord de l’employeur. En outre, l’Urssaf est tenu de respecter une procédure stricte en plusieurs phases. Mais il lui arrive de se tromper… Ainsi en l’espèce, les observations formulées par l’employeur auprès de l’inspecteur étaient insuffisantes à démontrer qu’il avait été associé par l’Urssaf à chacune de ces phases. En conséquence, le contrôle effectué selon cette méthode devait être annulé. (Aix-en-Provence, Pôle 04 ch. 06, 28 juin 2019, RG n° 18/09730).
Avis de contrôle : contenu. L’article R.243-59 du Code de la sécurité sociale n’impose pas à l’Urssaf de préciser l’ensemble des comptes contrôlés. (Bordeaux, Chambre sociale – section B, 4 juillet 2019, RG n° 17/02042 17/02043).
Les courriers doivent parvenir à la bonne adresse. Dans cette affaire, une société avait précisé à l’Urssaf, le 16 mars 2010, sa nouvelle adresse de correspondance, à Ludres (Meurthe-et-Moselle). À l’issue du contrôle, conformément au Code de la sécurité sociale, l’entreprise avait reçu, à son siège social de Tinqueux (Marne), en lettre recommandée avec avis de réception, le 5 novembre 2010, (soit après l’information relative au changement d’adresse), une lettre d’observations pour un montant total de 51 600 euros ; la réponse de l’inspecteur aux observations de la société avait également été adressée au siège social de Tinqueux. La mise en demeure du 10 mars 2011 avait, quant à elle, été notifiée à l’adresse de Ludres. Si la lettre d’observations et les réponses formulées aux observations de la société par l’organisme de recouvrement ont bien été adressées au débiteur des obligations afférentes au paiement des cotisations, l’Urssaf ne démontrait pas que la mise en demeure avait été adressée au débiteur des obligations, de sorte qu’aucune mise en demeure n’a été adressée à la société redevable des cotisations réclamées. En conséquence, la mise en demeure litigieuse était irrégulière. (Nancy, chambre sociale section 2, 5 juillet 2019, RG n° 19/00160).
François TAQUET
Avocat spécialiste en droit du travail et protection sociale