L’entreprise et les salariés
Mandat social et contrat de travail
Sauf dispositions contraires, un contrat de travail est suspendu pendant un mandat social. (Cass. soc. 5 novembre 2015. Pourvoi n° 14- 19560). Un directeur d’exploitation avait été nommé directeur général adjoint, puis directeur général d’une société avant d’être licencié pour faute grave. Pour la Cour de cassation, l’intéressé occupait les fonctions de directeur général de la société et ses fonctions techniques spécifiques, distinctes de celles exercées en qualité de mandataire social, n’étaient pas démontrées. Dans ces conditions, les juges du fond ont pu en déduire que le contrat de travail avait été suspendu pendant l’exercice du mandat social.
Sanction disciplinaire
Un document rédigé par l’employeur qui n’est qu’un compte-rendu d’un entretien au cours duquel il a énuméré divers griefs et insuffisances reprochés au salarié, sans traduire une volonté de les sanctionner, ne s’analyse pas en une mesure disciplinaire et n’a donc pas pour effet d’épuiser le pouvoir disciplinaire de l’employeur. (Cass. soc. 12 novembre 2015. Pourvoi n° 14-17615). Une responsable de rayon avait été licenciée pour faute grave, le 11 mai 2011. L’employeur avait mentionné, dans un écrit du 16 avril précédent, qu’il ne pouvait tolérer son comportement et les propos qu’il lui reprochait ; ce compte-rendu d’entretien avait été conservé dans le dossier de la salariée, laquelle avait été convoquée à un entretien préalable à son licenciement et mise à pied. L’employeur faisait état, à l’appui du licenciement pour faute grave, des faits qui avaient déjà été évoqués dans le courrier du 16 avril 2011 et qu’il considérait comme fautifs.
Congé de mobilité
Si l’acceptation par le salarié de la proposition de congé de mobilité emporte rupture du contrat de travail d’un commun accord, elle ne le prive pas de la possibilité d’en contester le motif économique. (Cass. soc. 12 novembre 2015. Pourvoi n° 14-15430). Une responsable juridique avait, le 26 octobre 2009, saisi les prud’hommes d’une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail. Le contrat avait été rompu après l’acceptation par la salariée d’une proposition de congé de mobilité de l’employeur dans le cadre du dispositif prévu par un accord collectif du 31 mars 2009 portant sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. La salariée avait été déboutée de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail. Les juges du fond ont rappelé que le contrat de travail peut prendre fin non seulement par un licenciement ou une démission, mais encore d’un commun accord des parties ; la rupture d’un contrat pour motif économique peut résulter d’un départ volontaire dans le cadre d’un accord collectif régulièrement conclu, cette rupture constitue une résiliation amiable du contrat de travail. En l’espèce, le congé de mobilité avait été signé dans le cadre de l’accord conclu le 31 mars 2009 avec les délégués syndicaux et aux conditions prévues par cet accord ; le départ volontaire de la salariée par adhésion au congé de mobilité, entrant dans le champ d’application de cet accord collectif, constitue une rupture du contrat de travail d’un commun accord qu’elle n’est pas recevable à contester. Pour la Cour de cassation, le congé de mobilité a pour objet de favoriser le retour à un emploi stable par des mesures d’accompagnement, des actions de formation et des périodes de travail. Si l’acceptation par le salarié de la proposition de congé de mobilité emporte rupture du contrat de travail d’un commun accord, elle ne le prive pas de la possibilité d’en contester le motif économique.
N’est pas équivoque la lettre de démission qui ne comporte aucune réserve, alors que le salarié ne justifie pas de l’existence de différend avec son employeur antérieur ou contemporain à sa démission et qu’il n’a contesté les conditions de la rupture du contrat de travail que quelques mois plus tard. (Cass. soc.17 novembre 2015. Pourvoi n° 14-18568). Une comptable avait démissionné, le 4 mai 2007 en ces termes : «par la présente, je vous informe qu’à dater du 5 juillet 2007, je ne ferai plus partie de votre personnel». Elle avait reçu son solde de tout compte le 31 juillet et l’avait dénoncé, le 27 septembre suivant, faisant valoir qu’ayant obtenu des assurances concernant sa qualification et l’augmentation de son salaire, elle avait accepté de poursuivre son activité, mais qu’aucune suite n’avait été donnée concernant la révision de son dossier. La démission n’était ni claire ni dépourvue d’ambiguïté.
françois.taquet.avocat,
conseil en droit social