Législatives: la gauche s'unit derrière son programme, Bardella en fait son "principal adversaire"
La gauche a dévoilé vendredi son programme commun sous la bannière du "Nouveau Front populaire", érigé par Jordan Bardella comme son "principal adversaire" aux législatives anticipées, loin des fractures des Républicains, dont la décision d'exclure leur président...
La gauche a dévoilé vendredi son programme commun sous la bannière du "Nouveau Front populaire", érigé par Jordan Bardella comme son "principal adversaire" aux législatives anticipées, loin des fractures des Républicains, dont la décision d'exclure leur président Eric Ciotti a été invalidée par la justice.
A deux semaines du premier tour, des manifestations contre l'extrême droite sont prévues ce week-end mais, dès vendredi soir, plusieurs milliers de personnes ont défilé dans plusieurs villes, avec à Lyon, des violences qui ont fait quatre blessés, dont trois policiers selon la préfecture.
Lors du scrutin des 30 juin et 7 juillet, "ce sera soit l'extrême droite, soit nous", a lancé la patronne des Ecologistes Marine Tondelier, lors d'une conférence de presse avec l'ensemble des principaux partis de gauche, des Insoumis à Place publique, le mouvement de Raphaël Glucksmann.
Surprise: l'ex-ministre de la Santé Aurélien Rousseau, qui fut également directeur de cabinet d'Elisabeth Borne à Matignon, sera candidat sous la bannière Nouveau Front populaire - via Place publique - dans la 7e circonscription des Yvelines, suscitant l'ironie d'Emmanuel Macron: "Ça montre toute sa cohérence".
En marge du G7 à Bari (Italie), Emmanuel Macron a estimé que les programmes "totalement irréalistes" du Nouveau Front populaire et du Rassemblement national "font porter un très grand danger" à l'économie française, notamment en raison de "cadeaux qui ne sont pas financés".
L'unité à gauche s'est cependant lézardée vendredi soir tard avec l'annonce de l'investiture par La France Insoumise (LFI) du député sortant du Nord Adrien Quatennens, contesté après avoir été condamné pour violences conjugales. A l'inverse, des figures historiques du parti comme Danielle Simonnet, Alexis Corbière ou Raquel Garrido, n'ont pas été reconduites. "Une purge", a dénoncé la première, "une punition pour avoir fait entendre des critiques en interne", selon le deuxième. "On me fait payer le crime de lèse-Mélenchon", a encore protesté Mme Garrido.
"Vous préférez un homme qui frappe sa femme, auteur de violences conjugales, à des camarades qui ont l'impudence d'avoir un désaccord avec le grand chef. Notre démocratie mérite mieux que vous", a tonné le député LFI François Ruffin.
Pourtant, la gauche s'était affichée vendredi matin rassemblée sur une photo de famille. Leur "contrat de législature" propose "une rupture totale avec la politique d'Emmanuel Macron", a assuré le coordinateur de LFI Manuel Bompard.
"Quand l'essentiel est en jeu, nous sommes là", s'est félicité le patron du PS Olivier Faure qui a fait valider l'accord par son Conseil national dans la matinée, avec huit oppositions sur environ 300 membres.
Engagements sur l'antisémitisme
Le texte prévoit l'abrogation de la réforme des retraites, celle de l'assurance chômage et la loi immigration, l'indexation des salaires sur l'inflation, ou l'augmentation du Smic à 1.600 euros net (1.398,69 euros actuellement).
Sujet hautement sensible à gauche, la nouvelle coalition condamne "les massacres terroristes du Hamas" commis le 7 octobre et reconnaît une "explosion inquiétante sans précédent" des "actes racistes, antisémites et islamophobes".
Le député PS sortant Jérôme Guedj, cible de violentes attaques des Insoumis sur ce sujet ces dernières semaines, a annoncé qu'il était à nouveau candidat dans l'Essone mais qu'il refusait la bannière du Nouveau Front populaire.
D'autres sujets de désaccord sont laissés de côté dans le contrat d'alliance, tels le nucléaire et l'OTAN.
L'épineuse question de l'incarnation à Matignon en cas de victoire n'est pas non tranchée pour le moment.
Raphaël Glucksmann, vainqueur à gauche des européennes (13,83%), s'est toutefois fermement opposé à l'hypothèse d'un Jean-Luc Mélenchon chef du gouvernement.
Et François Ruffin a pour sa part estimé dans un entretien au Courrier Picard que M. Mélenchon avait "raison de se mettre en retrait" pendant la campagne, "son nom" suscitant l'"inquiétude" des électeurs, en notant qu'il "semble manifeste" que le fondateur de LFI ne sera pas Premier ministre".
Les partis sont convenus que celui qui aura le plus de députés proposera un candidat, ce qui avantage a priori LFI, présent dans 229 circonscriptions, contre 175 pour PS, 92 pour les Ecologistes et 50 pour le PCF.
- "Gouvernement d'union nationale" -
A droite, le rebondissement est venu du tribunal de Paris, qui a invalidé en référé, c'est-à-dire selon une procédure d'urgence, l'exclusion d'Eric Ciotti de LR décidée par un bureau politique dont il contestait la légitimité.
"La justice a parlé, je suis président des Républicains", a réagi M. Ciotti vendredi soir auprès de l'AFP, même si une nouvelle juridiction devra à nouveau se prononcer sur le fond du litige.
D'ici là, LR est-il l'allié officiel du RN, tel que M. Ciotti le souhaite, au grand dam de ses détracteurs? "Les Républicains présenteront des candidats indépendants", ont répondu ces derniers, dans l'attente d'une décision judiciaire définitive, considérant que "l'entêtement de M. Ciotti est sans effet sur la réalité politique".
Jordan Bardella a au contraire assuré que son parti présenterait "un candidat commun" avec LR "dans 70 circonscriptions".
Il faudra s'attendre à "un certain nombre de surprises dimanche" lors du dépôt des listes, a d'ailleurs prévenu Mme Le Pen lors d'un déplacement dans son fief d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), en évoquant "la possibilité de gagner" et de constituer "un gouvernement d'union nationale".
M. Bardella a par ailleurs appelé les formations politiques à prôner "l'apaisement" et à ne pas "refuser le résultat des urnes" à la veille d'un week-end de manifestations contre l'extrême droite organisées à l'appel de syndicats et de partis politiques.
Au même moment, Squeezie, deuxième YouTubeur le plus suivi en France (19 millions d'abonnés), a mis en garde contre "une montée drastique de l'extrême droite" et appelé "les jeunes qui (le) suivent" à voter aux législatives, dans un message publié sur Instagram.
Accords de boutique
Face à l'orchestration du duel des gauches et des droites, le Premier ministre Gabriel Attal a dénoncé en Loire-Atlantique "des accords de boutique".
Mais le chef du gouvernement a lui-même conclu, ainsi que d'autres candidats macronistes, un pacte de non-agression dans les Hauts-de-Seine avec des candidats LR.
D'ici à dimanche, date limite du dépôt des candidatures, les partis finalisent leurs castings.
Les Ecologistes ont notamment investi Dominique Voynet dans le Doubs et les ex-eurodéputés Pierre Larrouturou (Essonne) et Benoit Biteau (Charente-Maritime). La tête de liste communiste aux européennes Léon Deffontaines sera candidat dans la Somme, comme l'adjoint socialiste à la mairie de Paris Emmanuel Grégoire dans la circonscription parisienne de l'ex-ministre Renaissance Clément Beaune.
Horizons, le mouvement d'Edouard Philippe, a pour sa part investi l'ex-député Thomas Mesnier (Charente), battu sur le fil lors d'une législative partielle en 2023, l'ex-secrétaire d'Etat Bérangère Abba (Haute-Marne) ou le maire de Vesoul Alain Chrétien.
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