Le RSI performe son organisation
En butte aux critiques de ses cotisants travailleurs indépendants, chefs d’entreprise artisans et commerçants, le Régime social des indépendants a revu les modalités de ses interventions. De quoi remonter le moral de ses cotisants, même s’il reste à faire.
Cela va de mieux en mieux au RSI, mais nous sommes conscients, un, des efforts qui nous sont encore à conduire pour restaurer la confiance ; deux, de la difficulté réelle dans laquelle se trouvent certains de nos assurés du fait de la crise et du comment est organisé notre système de protection sociale qui pèse sur leur trésorerie. Nous en sommes conscients et nous voulons les accompagner. Nous sommes en ordre de marche au niveau national et régional. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a plus aucun problème. Cela veut dire que nous sommes en mesure de les prendre en en charge du point de vue de l’assuré, et non plus du point de vue de notre bureaucratie. Directeur régional du RSI (Régime social des indépendants) Nord-Pas-de-Calais depuis avril 2012, Patrick Davigo témoigne d’un optimisme à la hauteur des efforts consentis pour remettre d’aplomb une organisation qui s’est fait remarquer par ses dysfonctionnements, avec son lot de détracteurs prompts à la critique, mais aussi de défenseurs. Pour faire simple, les ennuis dus au rapprochement forcé avec l’Urssaf ne sont plus d’actualité. Le point avec Patrick Davigo.
La Gazette. Qu’est-ce que le RSI et d’où viennent ses difficultés ?
Le Régime social des indépendants est le résultat de la fusion en juillet 2006 de trois organismes de Sécurité sociale que sont l’AVA et l’Organic, en charge de l’assurance vieillesse des artisans pour le premier et des commerçants pour le second, avec l’AMPI (Assurance maladie des professions indépendantes). Le RSI est donc l’organisme de protection sociale des chefs d’entreprise artisans, commerçants et de leurs ayants droit pour les prestations santé, retraite, invalidité et décès, hors allocations familiales servies par les CAF. En même temps qu’elles fusionnaient, le législateur a lancé la réforme de l’interlocuteur social unique créé en 2008 pour prendre en charge le recouvrement des cotisations dues par les travailleurs indépendants. Si la fonction est unique, la machinerie est partagée : à l’Urssaf, la gestion du calcul et l’encaissement des cotisations, les activités de recouvrement étant partagées entre l’Urssaf et le RSI. La mise en place de ce dispositif a engendré des dysfonctionnements informatiques significatifs.
Que s’est-il passé ?
La prise de conscience de ces dysfonctionnements a été rapide et les vraies solutions, trouvées autour de 2011 alors que le gros de la crise commençait à se faire sentir chez les travailleurs indépendants. Cette catastrophe industrielle a mis plusieurs années à se résoudre dans ses grands mécanismes. On peut affirmer que les gros dysfonctionnements technologiques sont résolus.
Pour autant, nous continuons de gérer l’Interlocuteur social unique sur des outils Urssaf qui ne sont pas bâtis pour gérer les spécificités des travailleurs indépendants. La vie des affaires est chez eux fluctuante, ils ne peuvent attendre longtemps quand ils sont confrontés à un problème de trésorerie, la pérennité de l’entreprise passe le plus souvent après leur protection sociale… La relation qu’ils ont avec le collecteur est compliquée, alors que l’Urssaf est une organisation qui fonctionne sur de la réglementation, sur des modes assez industriels. Nous continuons à avoir des problèmes entre le système de gestion que nous sommes tenus d’utiliser – il n’y a pas d’alternative – et la réalité des travailleurs indépendants. Le système de l’Urssaf est par exemple bâti pour envoyer des courriers et est difficilement débrayable. On peut comprendre que les travailleurs indépendants soient facilement perdus. Nous nous sommes efforcés de mettre en place des dispositifs d’amélioration, mais du fait de la crise et des dysfonctionnements, nous avons continué de subir une affluence forte d’appels téléphoniques, de courriers, de visites dans nos centres d’accueil. Notre capacité à répondre à toutes ces sollicitations n’était, jusqu’il y a peu, pas tout à fait au rendez-vous. Les travailleurs indépendants peinaient à nous contacter, à avoir une information constante et fiable, à résoudre leurs problèmes.
Où en êtes-vous ?
L’année 2015 est pour le RSI national et régional une année pivot. Fin 2014, nous avons concrétisé avec l’Urssaf, par la signature d’une convention, la redéfinition du partage des activités. La nouveauté est que celui qui prend une affaire la traite jusqu’au bout. Ce sont 80 collaborateurs, 40-40, qui ont été formés aux outils de l’autre. L’idée est de traiter de bout en bout la situation des travailleurs indépendant avec les outils tels qu’ils sont, leurs défauts, mais en s’efforçant de toujours se mettre à la place de l’assuré et non plus du point de vue du partage des rôles. Cette transformation régionale est mise en place. Avec elle, nous cherchons une organisation souple et adaptable et qui, progressivement, prenne le sujet du point de vue de l’assuré et non plus du point de vue des responsabilités que lui confère la loi. Le deuxième sujet de changement porte sur l’accueil téléphonique. Jusqu’à présent, pour des raisons administrativofinancières, une partie de notre réponse téléphonique était opérée par un prestataire extérieur. Dans le contexte qui était le nôtre et avec en sus les contraintes de marché, cela a conduit à une catastrophe de communication. Le sujet était connu. Aujourd’hui, nous travaillons à une réinternalisation globale de la réponse téléphonique pour que ce soit des collaborateurs RSI, avec les outils et les compétences nécessaires, qui puissent répondre aux travailleurs indépendants et faire un certain nombre d’actes. Au niveau régional, notre propre plate-forme téléphonique a été réorganisée en juillet 2014. Dorénavant elle compte entre 12 et 16 collaborateurs professionnels de la réponse téléphonique, recrutés sur ces compétences et formés aux métiers du RSI, qui répondent à une bonne part des appels entrants. Dans le même temps ont été mis en place deux numéros de téléphone courts non surtaxés, le 3648 dédié aux appels concernant les prestations et services du RSI, le 3698 dédié aux problèmes de cotisations. Les équipes se sont aussi organisées pour qu’en cas d’incapacité à apporter une réponse éclairante, l’interlocuteur soit renvoyé vers le back office pour donner la réponse ou prendre l’engagement d’une date de réponse. Tout cela est opérationnel.
Le RSI fait aussi de l’accueil et des permanences…
Longtemps notre accueil n’a pas été de bonne qualité à notre siège régional, rue de Tournai à Lille. Personnes à mobilité réduite, conditions d’éclairage et de confidentialité… Nous avons engagé une rénovation en profondeur de notre accueil physique sur une durée un peu longue – six mois –, qui s’achèvera en cette fin juin. Nous avons aussi, depuis le 1er janvier 2014, reconfiguré notre réseau de permanences en signant avec les chambres consulaires des partenariats. Désormais nos conseillers en protection sociale reçoivent les assurés sur rendezvous obtenus par mail ou par téléphone. L’an dernier, sur les 4 245 demandes de rendez-vous, 2 100 demandes ont été traitées par mail ou par téléphone et 2 145 assurés ont été reçus dans les neuf points de permanence, avec une majorité de rendez-vous conclusifs en un seul entretien compte-tenu de la préparation préalable de solutions conclusives.
Vous développez aussi des services en ligne ?
De fait, le RSI propose des services en ligne pour les cotisants et les professionnels de l’expertise comptable. Le cotisant peut ouvrir un compte personnel1 sur lequel il peut demander un délai de paiement, obtenir des attestations, suivre ses cotisations et les encaissements réalisés, indiquer ses changements administratifs… Bientôt il pourra procéder à des télépaiements. Si aujourd’hui nous sommes un peu débordés par l’affluence de mails, nous avons pour objectif, par la diversification de l’offre et l’organisation mise en place, d’être en capacité de respecter notre engagement de délai de réponse de quelques jours. Sur 95 000 cotisants, nous comptons plus de 30 000 comptes ouverts et quelque 7 000 mandats d’expert-comptable qui ont reçu délégation sur le volet cotisations. À terme, ne viendront plus nous voir que ceux qui nécessitent une intervention à forte valeur ajoutée.
Dernier élément d’organisation, la mise en place d’une cellule réclamations qui gère et est garante de la prise en charge et du suivi de la totalité des réclamations, qu’elles arrivent par courrier, à l’accueil, par téléphone, par mail et même en combiné. Bonne nouvelle, après l’été, la Caisse sera dotée d’un outil de gestion de la relation client qui permettra de suivre de bout en bout les contacts avec nos assurés.
Pour avoir réalisé des enquêtes de satisfaction, nous savons que nos relations téléphoniques sont perfectibles, que nos contacts physiques sont bien perçus, en particulier lors des permanences. Notre relation écrite est également perfectible, parce que nous jargonnons et écrivons beaucoup. Nous savons où sont nos marges de progrès. L’ensemble des équipes est mobilisé sur ces relations.
1. Mon compte sur www.rsi.fr
Le RSI Nord‑Pas‑de‑Calais en quelques chiffres
Assurés actifs : 91 763
Ayants droit santé : 49 109
Assurés retraités : 96 909
Mon Compte (sur rsi.fr) : 30 000
Nombre de délais de paiement accordés : 13 301
Retraite de base : 358,3 M€*
Retraite complémentaire : 75,2 M€*
Invalidité : 11,8 M€*
Décès : 1,4 M€*
Action sanitaire et sociale actifs et retraités : 4,3 M€*
Santé : 200 M€*
Pour prendre rendez-vous : relations.exterieures@npdc.rsi.fr
(Données 2014, sauf * = 2013.)
Cinq mesures pour améliorer le fonctionnement du RSI
Toutes les tensions autour du RSI ne sont pas apaisées. Pour y apporter un mieux, les députés socialistes Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier ont été missionnés par le gouvernement en avril 2015 afin de trouver des solutions pour améliorer le fonctionnement des organisations du RSI. Le 8 juin, ils ont remis au Premier ministre leur rapport, riche de 30 propositions de mesures à prendre pour humaniser le régime. Manuel Vals en a retenu cinq qui seront mises en application à compter du deuxième semestre 2015 : la généralisation des médiateurs locaux, autonomes et indépendants vis-à-vis du RSI pour “accompagner les dossiers complexes et guider les assurés”; la mise en oeuvre d’un système d’information fiable et performant, complétée par un accueil téléphonique assuré dès cet été par les caisses elles-mêmes “pour améliorer la qualité des réponses et proposer des rendez-vous physiques si nécessaire” ; le recours en priorité au recouvrement amiable “au moyen de relances proactives et plus personnalisées”, avec de l’échelonnement en cas de difficultés de paiement ; l’amélioration de la qualité des courriers envoyés aux affiliés ; et enfin le lancement de nouveaux services en ligne, tels que la dématérialisation de l’attestation de droits à la CMU, une meilleure lisibilité des équivalences entre cotisations et droits ouverts, l’amélioration du simulateur des cotisations. Il n’est pas question ici d’un mariage avec le régime général des salariés ou avec la Mutualité sociale agricole qui, de l’avis des défenseurs du RSI, relèverait d’une “aberration totale” qui ne ferait qu’empirer les difficultés des affiliés.