Le redressement du commerce extérieur de la France, un défi pour 2016
Si l’export représente près de 30% du PIB, la France accusait un déficit commercial sur les biens et services de 16,8 milliards en 2014. Face à cette situation, le secrétaire d’Etat au Commerce extérieur, Matthias Fekl, a présenté un rapport auprès des députés. Il dresse l’état des lieux et propose des pistes pour remédier aux faiblesses de l’appareil exportateur français.
La France est le 6e exportateur mondial de biens et services mais son “déficit commercial reste à un niveau significatif”, reconnaît le rapport consacré à la “Stratégie du commerce extérieur de la France”, présenté début décembre 2015. De fait, au tournant des années 2000, le déficit commercial de la France s’est continuellement détérioré jusqu’en 2011, avec un solde négatif de près de 41 milliards d’euros. Cette dégradation a pesé négativement sur la croissance (-0,3% de PIB par an en moyenne) sur cette période. Et, dans le même temps, la part de marché de la France dans le commerce mondial est passée de 4,7% en 2000 à 3,1% en 2012. Depuis, cette part de marché s’est stabilisée autour de 3,5% et le déficit s’est réduit de 45% grâce principalement à une conjoncture favorable, notamment avec la chute des prix de l’énergie et du cours de l’euro. Pour 2015, le déficit devrait dépasser les 40 milliards d’euros contre 58 milliards en 2014, essentiellement en raison de la baisse du prix du pétrole.
Des positions commerciales solides dans des grands secteurs. Si la balance commerciale n’est pas favorable à la France, l’export est pourtant une composante essentielle de notre économie. Ainsi, un quart des emplois salariés (soit 6 millions de personnes) sont directement ou indirectement liés aux exportations. Le pays connaît des exportations diversifiées et le poids du commerce extérieur dans l’économie ne cesse de croître, gagnant 10 points de PIB en vingt ans. Dans le domaine de l’aéronautique et du spatial, le groupe Airbus est une belle réussite européenne qui pèse fortement dans les succès français à l’étranger. En 2014, l’excédent commercial était de 24 milliards d’euros pour ce secteur. En seconde position, on trouve la pharmacie, la chimie, les parfums et la cosmétique, suivis des produits agricoles et agroalimentaires. L’industrie du luxe enregistre aussi de bonnes performances, et la France, première destination touristique mondiale, enregistre un excédent de 7 milliards d’euros. Les secteurs dynamiques dans les services et le négoce international permettent de compenser plus des deux tiers du déficit enregistré sur les biens, note le rapport.
Mais un déficit récurrent… Sur la dernière décennie, la très forte dégradation du solde commercial peut s’expliquer par plusieurs éléments conjoncturels, comme l’appréciation de l’euro face au dollar, avec un pic en 2008 (1 euro pour 1,6 dollar), la forte hausse du coût de l’énergie, en particulier du pétrole et l’impact de la crise économique. Aussi, par les difficultés persistantes de la zone euro qui correspond à la moitié de nos échanges, avec une croissance de 1% en moyenne ces dernières années. Outre ce contexte, s’ajoute la perte de compétitivité de nos industries avec un manque d’investissement dans la robotisation par rapport à nos voisins allemands et italiens, et un coût du travail élevé, lié à la hausse des prélèvements obligatoires. La désindustrialisation de la France s’est accentuée ces dernières années, et plus rapidement que chez nos partenaires européens. Toutefois, on notera que l’énergie représente les trois quarts du déficit des échanges de biens, avec une facture de 55 milliards en 2014, mais qui tend à se réduire.
… qui tend à se résorber. Depuis 2011, le déficit des échanges de biens et services s’est réduit de près de 60%, de 41 milliards d’euros à 17 milliards d’euros en 2014, soit 0,9% du PIB. En comparaison, l’Allemagne, premier partenaire commercial de la France, enregistre un excédent courant supérieur à 7% de son PIB en moyenne, depuis trois ans, rappelle le rapport. Un niveau jugé toutefois excessif par la Commission européenne qui l’exhorte à dynamiser sa demande intérieure.
En 2015, les entreprises ont bénéficié d’une conjoncture favorable avec la chute durable et forte des coûts énergétiques et de la baisse de l’euro. Et le gouvernement a engagé des réformes pour améliorer la compétitivité des entreprises françaises, avec notamment l’instauration du CICE (Crédit d’impôt compétitivité et emploi) “Le coût du travail horaire dans l’industrie en France est passé sous celui de l’Allemagne”, se félicite le secrétaire d’Etat au Commerce extérieur dans un récent entretien au quotidien Les Echos. Pour Matthias Fekl, “l’enjeu, c’est aussi la montée en gamme et l’innovation”.
Des PME peu présentes à l’export. Les PME contribuent à hauteur de 16% au poids du chiffre d’affaires à l’export et les ETI (entreprises de taille intermédiaire), d’un tiers. Pour accroître les parts de marché de la France dans le commerce mondial, il devient essentiel d’encourager l’émergence d’exportateurs parmi les PME et les ETI, trop peu présentes, en les accompagnant sur les nouveaux marchés. En 2014, seulement 121 000 entreprises se sont risquées à l’international. Les PME sont confrontées à un ensemble de freins. En effet, au niveau de l’Etat, le dispositif français à l’export est complexe et les petites entreprises ne disposent pas toujours du temps et des moyens humains nécessaires pour mettre en oeuvre une stratégie. Pour accompagner les entreprises, l’Etat a depuis créé Business France en regroupant divers services dédiés à l’export. Enfin, les grands groupes doivent jouer un rôle de facilitateur en emmenant les PM E conquérir des marchés étrangers, comme peuvent le faire les entreprises allemandes.