Le premier-né d'une nouvelle génération de chalutiers

Evénement à Boulogne : deux chalutiers de 25 mètres ont été mis à l’eau le 3 septembre par la Socarenam  : le «chalutier du futur» Arpège pour l’artisan de Cucq (62) Alexis Hagneré, et le Melizenn pour l’armateur des Côtes d’Armor, Jean Porcher.

Le Mélizenn.
Le Mélizenn.

 

D.R.

L'Arpège.

L’Arpège, premier chalutier boulonnais sorti de la Socarenam depuis 15 ans, veut symboliser la nouvelle génération des navires de pêche artisanale français. Conception en 3 D, double propulsion électrique, appareillage électrique très sophistiqué, glace liquide à base d’eau de mer réfrigérée, stockage des déchets en application du zéro rejet, ergonomie : l’Arpège est un exemple abouti et opérationnel qui va bien au-delà des démonstrateurs et prototypes en cours.

La première rupture architecturale que l’on doit au concepteur (Bureau Mauric) réside dans le choix d’une carène optimisée et d’une propulsion bi-ligne d’arbres. Tout en améliorant l’efficacité énergétique du chalutier, cette carène large à bouchains vifs et les quilles antiroulis permettent d’augmenter significativement l’amortissement en roulis et donc de réduire les amplitudes de mouvements.

Seconde innovation : le choix d’une  architecture de puissance diesel-électrique, qui n’avait encore jamais été validée sur un chalutier de moins de 25 mètres. «Actuellement, explique Pascal Lemesle (Mauric), les navires de pêche ont à gérer trois vecteurs énergétiques : le mécanique pour la propulsion, l’hydraulique pour les apparaux, l’électrique pour les servitudes du bord. Il est important de pouvoir gérer l’énergie absorbée par chacun des consommateurs, de ramener ces vecteurs à un seul et de piloter selon une véritable stratégie de la consommation.» ENAG a ainsi conçu, pour fonctionner à vitesse variable, deux groupes électrogènes de 430 kWe chacun. A terme, on pourra intégrer d’autres sources de production d’énergie (batteries, piles à combustible).

Du chalut à la senne. Le patron Alexis Hagneré et ses deux neveux qui partagent la barre avec lui insistent aussi sur l’amélioration de la sécurité et du travail à bord. «La zone de vie (sèche et non salée) et celle de travail sont nettement séparées par un sas comprenant des rangements à cirés, expliquent-ils. L’isolation phonique est renforcée par l’éloignement du local machines et l’utilisation d’apparaux électriques.» De même, pour réduire les risques de croche, a été installé un sonar multifaisceaux Seapix de détection, développé par IxBlue.

Pour assurer la polyvalence de leur pêche, ils disposent de deux treuils mixtes (senne danoise/chalut pélagique), de deux enrouleurs senne/chalut de fond, d’un enrouleur de pélagique et d’un treuil de caliorne. «Nous pouvons passer très vite d’un train de pêche à un autre, précise le jeune Richard Caloin. Même si, avec les jours courts, nous allons d’abord privilégier le chalut.»

L’Arpège va entrer, à la mi-octobre, dans une phase d’expérimentation de six mois qui pourrait profiter au renouvellement de la flottille française. Sa conception et sa construction ont mobilisé plus de cent personnes durant 18 mois. Elles ont bénéficié de la contribution financière de l’Etat et de l’ADEME (2 millions d’euros sur un coût total de 8,2) dans le cadre du programme “Véhicule du futur” des investissements d’avenir, mais aussi des collectivités territoriales.

D.R.

Le Melizenn.

Melizenn, un chalutier pour les Côtes d’Armor. Sorti de la cale de la Socarenam un quart d’heure à peine après l’Arpège , le Melizenn est un chalutier moderne et robuste qui répond au cahier des charges de l’armement Porcher (Erquy), fidèle au chantier boulonnais depuis 25 ans, puisqu’il s’agit du 16e construit à Boulogne, en attendant, confirme Jean Porcher, «deux sister-ships qui seront lancés en 2016». De quoi renforcer le leadership de l’ancien marin-pêcheur en Bretagne Nord.

Depuis six ans, les constructions pour Porcher et ses quirats s’enchaînent au rythme d’une par an en moyenne. Pêche arrière à pont couvert, le Melizenn conserve les mêmes caractéristiques que ses prédécesseurs, «en bénéficiant de petites améliorations apportées par l’expérience de nos différents patrons» : le Lazalaï (janvier 2010), le Taranis (mars 2011), la Fanette (mars 2012), le Belenos (janvier 2013) et le Farfadet (septembre 2013). D’une longueur de 25 mètres pour une largeur de 7,60 mètres et une jauge d’environ 200 UMS, il dispose d’une passerelle en aluminium (avec la cabine du patron), d’un poste d’équipage pour six hommes et d’une cale à poissons de 94 m3 munie d’une machine à glace. Filiale de Socarenam, la Menuiserie navale Lefevre (Etaples) a réalisé la finition bois, tandis que l’équipementier Bopp a fourni treuils et enrouleurs.

 Le PDG de Socarenam, Philippe Gobert, s’attache à ne jamais confirmer le total exact de bateaux déjà commandés par son fidèle client, de peur de devoir répondre un jour à sa question : «Au bout de combien de navires, ai-je le droit à un gratuit ?»