Le nouveau CCAG Travaux accélère les procédures de paiement
Le Cahier des clauses administratives générales Travaux rénové introduit un mécanisme de tacite acceptation du décompte général définitif (DGD) sur la base des demandes formulées par l’entreprise, lorsque le pouvoir adjudicateur n’a pas établi de décompte général dans les délais requis.
La lutte du gouvernement contre les retards de paiement se poursuit. A la suite des nouveaux délais de paiement réglementaires institués par le décret du 29 mars 2013, le cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de travaux, issu d’un arrêté du 8 septembre 2009, vient d’être modifié afin que le décompte général et définitif puisse être établi plus rapidement, même en cas d’inertie des pouvoirs adjudicateurs.
Après une consultation publique tumultueuse, l’arrêté du 3 mars 2014 modifiant le CCAG Travaux a été publié le 11 mars dernier. Il vise à réduire le temps de production et de validation du décompte général définitif, afin de faire courir au plus vite le délai de paiement des entreprises. Le nouveau CCAG Travaux prévoit trois modifications majeures.
Ce qui va changer. Tout d’abord, les délais successifs de production des différents décomptes par l’entreprise, le maître d’oeuvre et le maître d’ouvrage sont réduits à 30 jours.
Ainsi, dès la fin des travaux, le titulaire a 30 jours, et non plus 45, pour établir son projet de décompte final et le transmettre simultanément au maître d’oeuvre et au représentant du pouvoir adjudicateur. A leur tour, le maître d’oeuvre et le maître d’ouvrage ont 30 jours pour notifier le décompte général au titulaire du marché, étant précisé que ce délai court à compter de la plus tardive des deux dates de réception du projet de décompte final par le maître d’oeuvre et le pouvoir adjudicateur. Enfin, l’entreprise a de nouveau 30 jours pour signer et notifier au maître d’ouvrage le décompte général, lequel deviendra le décompte général et définitif si le titulaire n’émet aucune réserve. Les délais de paiement commencent alors à courir dès cette notification.
L’autre innovation majeure de l’arrêté, mais également celle qui a suscité le plus d’émoi lors de la consultation publique, est la création d’un DGD tacite. Dans sa version initiale, le projet de réforme du CCAG travaux prévoyait que l’acheteur public était réputé accepter tacitement le décompte final établi par le titulaire, à l’expiration du délai de 30 jours qui lui était imparti. La Commission consultative d’évaluation des normes (CCEN) a notamment jugé sévèrement ce projet dans un avis du 13 juillet 2013. Pour Alain Lambert, président de la CCEN, cela faisait courir aux collectivités “des risques financiers énormes” et “généraliserait des refus systématiques du DGD par le pouvoir adjudicateur”. Il était également redouté que le maître d’ouvrage se retrouve à devoir payer des sommes indues, sans pouvoir rectifier le projet présenté par l’entreprise.
Le nouveau CCAG travaux a ainsi préféré organiser une procédure d’alerte lancée par l’entreprise auprès du maître d’ouvrage. Après réception du projet de décompte final de l’entreprise, en cas de silence du pouvoir adjudicateur à l’issue du délai de 30 jours, l’entreprise peut établir un projet de décompte général. Le pouvoir adjudicateur aura alors 10 jours pour réagir et notifier au titulaire le décompte général. Sans retour du maître d’ouvrage, le projet de décompte général établi par le titulaire deviendra le décompte général définitif.
Même revu par le gouvernement, ce “DGD tacite” reste une “petite révolution” en matière de marchés publics. Les entreprises étant les créancières à la fin de travaux, elles pour ront désormais jouer un rôle actif pour débloquer la situation d’inertie du maître de l’ouvrage.
La nouvelle rédaction du CCAG travaux prévoit, par ailleurs, une procédure de révision a posteriori des prix du solde du marché, pour permettre l’établissement du décompte général sans attendre la publication des derniers index de révision.
Entrée en vigueur. Ces nouvelles dispositions sont entrées en vigueur le 1er avril 2014. De ce fait, les marchés pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis d’appel public à la concurrence a été envoyé à la publication avant cette date demeureront régis par les dispositions du CCAG dans sa rédaction antérieure. Reste que les parties à un marché public peuvent toujours décider de ne pas être soumises au CCAG Travaux, et notamment lorsque la complexité du contrat ou les enjeux financiers nécessite de bénéficier de délais de paiement plus longs.
Charlotte HERMARY,
avocate en droit public (charlotte.hermary@fidal.fr)