Le nombre de cessions de fonds de commerce diminue légèrement
En 2014, 43 800 fonds de commerce ont été rachetés en France. Une tendance en légère baisse par rapport à l’an dernier et très diverse selon les secteurs et les régions.
Dix milliards d’euros pour 43 800 fonds de commerce rachetés à un prix moyen de 189 600 euros. Ce 26 mars, la DILA (Direction de l’information légale et administrative), rattachée au Premier ministre, a publié la 5e édition de son baromètre Bodacc (Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales), réalisé en collaboration avec Altares, spécialiste de l’information sur les entreprises. En 2014, le nombre de transactions a diminué de 1,6% par rapport à 2013, pour retomber à un niveau similaire à celui de 2009. “Sur les cinq dernières années, on est autour de 45 000 transactions, à part en 2012”, précise Thierry Million, directeur des études Altares. Quant à la valeur des transactions, “on reste sur le haut de la volumétrie des dernières années, sur des montants importants, preuve que les fonds de commerce sont de qualité”, ajoute-t-il. Qu’il s’agisse du nombre de cessions ou des montants des transactions, les secteurs présentent des situations très variées.
La restauration en tête. Un repreneur sur quatre a opté pour les activités de la restauration. En tête des plus attractives, figure la restauration traditionnelle. Avec ses 5 218 reprises, elle fait presque deux fois mieux que la restauration rapide (2 911). Concernant cette dernière, attention, prévient Thierry Million : “Le secteur est en plein boom. Il y a beaucoup trop d’acteurs. Aujourd’hui, des entreprises s’installent parce qu’il n’y a pas besoin de plus de 10 m2 , mais il faut des clients…” Avec les débits de boissons, les deux premières activités cumulent plus de 10 000 transactions. En revanche, la construction n’en compte que 3 435, diminuant de 7,7 % par rapport à l’an dernier. Cependant, le prix moyen de la transaction a augmenté de 6,6 %, pour atteindre près de 148 600 euros. “C’est un secteur qui souffre énormément, mais il y a de belles affaires à faire”, commente Thierry Million. Dans le détail, les travaux publics connaissent la baisse la plus sévère du nombre de transactions (-32,7 %), alors que les agences immobilières “vont moins mal”, estime Thierry Million. Car si le nombre d’acheteurs régresse, “le montant des transactions reste préservé, ce qui est une bonne nouvelle car cela traduit le fait que les fonds de commerce sont de qualité”, analyse-t-il. Dans l’industrie, qui connaît une diminution de 11 % du nombre des transactions, l’imprimerie et le secteur énergie, eau et environnement, affichent des baisses respectives de l’ordre de 25,6 % et 30,8 %. Dans le secteur des services aux particuliers, des activités comme les coiffeurs et les instituts de beauté sont des “métiers qui ne vont pas bien du tout. Les clients ont réduit très largement leurs besoins”, commente Thierry Million. Le nombre de transactions a diminué en nombre (15,2 %) et en valeur (12,3 %). Parmi les activités qui ont le vent en poupe, en revanche, le secteur de l’information et de la communication voit le nombre d’opérations augmenter de 12,2% en volume et de 5,4 % en valeur.
Une géographie fine. Variables selon les secteurs, les tendances des cessions se différencient également très fortement sur le territoire, mais dans une logique qui poursuit celle des années précédentes. Ainsi, l’Ile-de- France concentre encore 20 % des transactions, conclues pour un montant moyen de 285 000 euros. Les prix des fonds de commerce les plus élevés sont constatés, pour l’essentiel, dans les régions situées au-dessus de la Loire. En Métropole, outre l’Ile-de-France, trois autres régions se distinguent : la Bretagne, la Haute-Normandie – qui connaissent des transactions moyennes supérieures à 180 000 euros – et la Picardie (à plus de 200 000 euros). Témoin de l’extrême localisation possible des évolutions économiques, si l’on regarde les départements dont les performances se sont maintenues trois années de suite, “il y en a à peu près partout”, remarque Thierry Million. En particulier, le département du Rhône est le seul sur lequel la valorisation a progressé chaque année depuis cinq ans.
Dispersion de ressources ? La population des repreneurs d’entreprise est constituée pour moitié (21 600) de structures sans salariés. Viennent ensuite les TPE (15 784) et les PME (4 423). Quant aux 1 952 ETI (entreprises de taille intermédiaire) et grandes entreprises repreneuses – un chiffre en forte augmentation cette année (+17 %, 1 952 transactions) –, elles sont concentrées dans le commerce de détail, en magasins multirayons. “La situation ne devrait pas se reproduire. Cette évolution est liée à la réorganisation du secteur de la grande distribution, avec des transferts d’enseignes ou des réorganisations intergroupes”, commente Thierry Million.
Autre caractéristique des entreprises repreneuses, la majorité d’entre elles sont jeunes, souvent créées pour l’occasion. Toutefois, “il y a aussi quelques entreprises plus anciennes, de plus de dix, voire quinze ans”, ajoute Thierry Million. Une donnée que la DILA analyse, comme celle d’entreprises créées, dans une conjoncture favorable, avant une crise à laquelle elles ont su s’adapter, et qui déploient aujourd’hui des stratégies de rachat de fonds de commerce sur d’autres territoires. Dans leur cas, le montant des transactions s’élève à plus de 200 000 euros. Mais malgré cette diversité de cas de figures, en regard à ces repreneurs d’entreprise, “il y a au moins autant d’entrepreneurs qui, quand ils décident de prendre leur retraite, ne trouvent pas de candidats pour reprendre leur fonds de commerce”, estime Thierry Million pour qui il s’agit là d’un gaspillage de ressources.
En effet, “les entreprises qui sont créées pour reprendre un fonds de commerce sont plus pérennes que celles créées ex nihilo. Si on regarde cinq ans après, une entreprise sur deux est encore en vie en général. Huit sur dix pour celles du Bodacc. C’est un moyen fort de pérenniser l’emploi local”, explique Thierry Million. Reste que reprendre une entreprise comporte son lot de contraintes, en premier lieu les prix éventuellement élevés de rachat, pour lesquels il peut s’avérer difficile d’obtenir l’appui d’un banquier. Parmi les autres freins possibles, “dans les petits business, il y a une problématique qui n’a pas été anticipée, celle de la mise aux normes des établissements pour les handicapés”, signale Thierry Million. Un chantier qui peut rajouter 50 000 euros de travaux au prix d’achat du fonds de commerce.