Le marché métropolitain «compliqué»
L’Observatoire des bureaux de la métropole lilloise vient de rendre son verdict pour le troisième trimestre 2014 : 27 000 m2 transactés contre 49 000 m2 sur la même période de 2013, 70 transactions contre 88. Le marché des bureaux de la Métropole est à l’image de l’économie : compliqué. Le point de vue de Mathieu Léonard, directeur adjoint de BNP Paribas Real Estate Région Nord.
La Gazette. Quel sentiment vous inspire les résultats pour le troisième trimestre 2014 ?
Mathieu Léonard. Pour parler de 2014, il faut au préalable resituer 2013 qui avait été une année exceptionnelle avec, par exemple, 49 transactions supérieures à 1 000 m2 réalisées. Elle avait permis d’absorber le stock d’offres disponibles sur les secteurs d’Euralille et de Lille-Centre. Nous savions avoir connu une année exceptionnelle et que le marché reviendrait à des niveaux de transactions davantage en ligne avec ceux de 2011 et de 2012. A l’échéance du troisième trimestre, les transactions de plus de 1 000 m2 sont inférieures à 15, contre une trentaine l’an dernier. Compte tenu d’un quatrième trimestre historiquement toujours meilleur que les trois premiers, le marché 2014 devrait avoisiner les 120 000 m2 transactés, contre 141 785 m2 en 2013, hors comptes propres, et 127 200 m2 en 2012.
Pourquoi le marché ne reproduit-il pas les performances 2013 ?
Les sociétés à l’origine des plus importantes transactions de 2013 sur Lille-Centre et Euralille émanent essentiellement du CAC 40 et du SBF 120. Il est difficile de les déménager à nouveau d’une année sur l’autre. Par comparaison avec 2013, les PME étaient complètement absentes ; 2014 est davantage un marché de PME. Pour avoir bien transacté sur Lille et Euralille, toute l’offre disponible y a été épongée, ce qui devrait profiter à la périphérie et notamment au secteur des Grands-Boulevards où restent des offres significatives sur Château-Bleu, Château-Blanc, Business Park. Cette carence d’offres sur les deux secteurs que sont Lille et Euralille nous empêche de démarcher les grosses sociétés qui auraient d’importants projets.
Yves Noblet, directeur de BNP Paribas Real Estate Région Nord : «l’exercice 2013 avait situé Lille au deuxième rang du marché des métropoles françaises derrière Lyon, avec un décrochage assez net avec Bordeaux, Toulouse, Marseille. Sur les six premiers mois de l’année 2014, Lille affiche une baisse de 17%, conséquence de la rareté de l’offre. Le marché lillois s’est fait doubler par Toulouse et Marseille qui ont enregistré pour la première deux importantes transactions, 25 000 m2 pour Safran et 11 000 m2 pour Akka, et pour la seconde 23 000 m2 pour Amadeus… Les prochains programmes importants supérieurs à 5 000 m2, sur Euralille, Grand Angle, Conex ou 101 République, ne seront livrés qu’en 2016. Le niveau du marché pour 2014 et 2015 ne devrait donc pas connaître de rebond avant cette date».
Quels autres constats pouvez-vous faire ?
Tout d’abord, la chute du nombre de transactions réalisées sur l’année, selon une tendance initiée il y a plusieurs années. Ainsi, 2014 devrait se situer à moins de 300 transactions, après 286 en 2013, 375 en 2012, 366 en 2011, 375 en 2010, 410 en 2009. Compte tenu de l’augmentation des volumes, ce sont donc essentiellement les PME qui ne se sont pas retrouvées en situation de développer leurs implantations tertiaires.
Autre point important, le nombre de transactions sur les produits neufs est en forte baisse avec seulement une vingtaine de transactions depuis le début de l’année pour 15 000 m2, comparativement aux 55 opérations réalisées sur la même période de 2013 pour 52 000 m2. A l’opposé, le nombre de transactions en seconde main a certes progressé, mais sans prendre le relais du neuf.
Aspect très positif, les loyers restent contenus et ne flambent pas, avec une valeur top à 220 €/m2, quand Lyon affiche 350 €/m2 en loyers faciaux avec des mesures d’accompagnement, de type franchise de loyer, ou Marseille qui affiche des loyers top à plus de 260 €.
Le secteur géographique qui maintient sa position en ce troisième trimestre est celui de Lille avec 9 000 m2, devant Villeneuve-d’Ascq (7 000 m2) et les Grands-Boulevards (4 000 m2). Faute d’offres, Euralille décroche à 1 400 m2, ce qui est insuffisant si on considère que c’est Euralille qui fait la renommée et la puissance de Lille au plan national.
La situation peut-elle s’améliorer ?
Historiquement, le 4e trimestre est toujours important en volume. Il devrait avoisiner les 40 000 m2 après 30 000 m2 en 2013, 41 000 m2 en 2012, 35 000 m2 en 2011. Les nombreux dossiers reportés aux 2e et au 3e trimestres devraient se concrétiser. Quelques belles transactions supérieures à 2 000 m2 se préparent sur Euralille, EuraTechnologies et Villeneuve-d’Ascq, principalement dans le neuf.
Le constat actuel, c’est moins de dossiers, des délais allongés, un plus haut degré d’abandon, des reports fréquents. Cette situation est le reflet de la conjoncture économique, assez délicate depuis plusieurs années, mais qui est désormais devenue la norme. Notre taille de marché est à 120/130 000 m2. Nos exigences progressent à 145/160 000 m2, mais cela relève encore de l’exceptionnel. C’est la réalité du marché lillois.