Le CDG 59 prépare l’archivage électronique

Engagé depuis 2006 dans l’accompagnement des collectivités locales en matière de dématérialisation des échanges et notamment des marchés publics, le Centre de gestion de la Fonction publique territoriale du Nord a très rapidement été sollicité sur la question de la conservation et de l’archivage des documents ainsi dématérialisés.

Le CDG 59 prépare l’archivage électronique
D.R.

Sylvain Defromont, responsable informatique et archivage au CDG59.

La Gazette. Quel est l’objet de l’archivage électronique ?

 Sylvain Defromont, responsable informatique et archivage au CDG 59. A l’instar de l’archivage papier, le document nativement électronique, c’est-à-dire signé électroniquement, ou exclusivement au format électronique, se doit d’être conservé au format électronique. Dès lors que se développe la e-administration, c’est-à-dire la dématérialisation des échanges entre administrations et entre l’administration et les particuliers, habitants, citoyens, entreprises…, les collectivités sont d’autant plus confrontées à cette obligation de conservation. 

 

Quelles en sont les règles et quel peut être l’apport du Centre de gestion ?

 Une bonne gestion des archives électroniques passe par un système garantissant leur intégrité, leur authenticité, leur confidentialité et leur pérennité. Sur ce dernier point, s’il est assez simple aujourd’hui de prendre connaissance d’un document papier qui a 20 ans ou 5 siècles, dès qu’on passe au document électronique se pose la difficulté des formats de conservation et de leur migration pour en garantir la lecture dans 5 ou 50 ans. Un système d’archivage électronique (SAE) doit prendre en charge ces différentes contraintes et assurer une totale traçabilité des opérations réalisées sur chaque document archivé.

Les spécifications techniques et organisationnelles pour l’archivage électronique sont aujourd’hui l’objet d’une normalisation par l’Afnor. Pour le papier, des mesures doivent être prises pour protéger les originaux en cas de sinistres (incendies, inondations…). De la même manière, la conservation d’archives électroniques doit se conformer à des exigences de sécurité adaptées au support. A titre d’exemple, dans la mesure où le support électronique le permet, les archives numériques doivent être stockées à deux endroits différents de manière à ce qu’en cas de sinistre sur un premier site, les documents soient encore accessibles sur le second site.

Du fait des coûts élevés induits par la mise en place de ce type de plate-forme, peu de collectivités ont la capacité financière et technique d’y parvenir. Or, le maire reste responsable de ses archives, qu’elles soient électroniques ou papier. Aujourd’hui, ce que souhaite faire le Centre de gestion, c’est mutualiser autour de l’archivage électronique et mettre en place une plate-forme d’archives électroniques à destination des collectivités du département qui souhaiteraient l’utiliser.

 

Comment procéder ?

 Cette mise en place ne peut se faire seul. Le Centre de gestion ne va pas s’autoproclamer tiers archiveur − c’est le terme consacré pour désigner celui qui se charge pour le compte de tiers d’assurer la conservation et l’intégrité de documents électroniques. S’il convient de monter un partenariat avec les Archives départementales, il faut aussi adopter une solution technique avec non seulement une infrastructure informatique, mais aussi des logiciels adaptés à la problématique.

A ce stade, le Centre de gestion a, dès 2008, été à l’origine d’un groupe de travail au sein de l’Association des développeurs et des utilisateurs de logiciels libres pour l’administration et les collectivités territoriales (Adullact). Ce groupe de travail a rapidement été rejoint par la Direction des archives de France, devenue depuis le Service interministériel des archives de France (Siaf). C’est ce service qui a pour compétence de donner aux tiers archiveurs l’agrément qui autorise à conserver les archives intermédiaires publiques.

Notre problématique, c’est de monter un projet cohérent qui soit adapté aussi bien aux petites qu’aux moyennes collectivités dans une logique de mutualisation autour de l’archivage électronique et qui vienne en complément des autres services que peut rendre le Centre de gestion en matière d’informatisation et de e-administration.

 

Que permettra d’archiver votre offre d’archivage électronique ?

 Aujourd’hui, en termes de documents nativement électroniques, on retrouve les marchés publics pour lesquels on a pu recevoir des offres dématérialisées signées électroniquement dont il faut assurer la conservation et qui, en l’absence de système d’archivage électronique, restent sur les plates-formes de dématérialisation. Mais cette solution n’est que temporaire. Le SAE accueillera aussi tous les échanges avec la sphère Etat : les accusés de réception de télétransmission d’actes, délibérations et arrêtés adressés au contrôle de légalité, les flux PES (protocoles d’échanges standard) pour les finances… Non seulement ces échanges vont se généraliser et devenir obligatoires, mais les ordonnateurs que sont les maires vont devoir signer électroniquement ces envois. Là aussi, il faudra en assurer la conservation…

Aujourd’hui, un des freins au développement de la dématérialisation, c’est justement l’absence de solution pour assurer la conservation des originaux électroniques. Ce qui explique notre difficulté à évaluer les volumétries concernées et le taux d’accroissement de cette production. Il faut se préparer à accueillir des documents de plus en plus nombreux tout en accompagnant les collectivités dans cette transition entre le papier et l’électronique. Cela dit, les archives existantes au format papier aujourd’hui resteront au format papier.

 

Quels sont les freins au développement de l’archivage électronique ?

 Si l’archivage électronique ne pose pas de difficultés techniques particulières, il n’empêche que c’est un projet complexe sur lequel le Centre de gestion souhaite avancer avec un maximum de partenaires. Même si les Archives départementales soutiennent notre projet, il nous faut maintenant concrétiser le partenariat avec le Département qui pourrait jouer le rôle d’archiveur public pour les archives définitives.

Il faut préciser qu’en matière d’archives, il y a trois âges. Le premier âge est celui des archives courantes quand les documents sont encore vivants, c’est-à-dire non clos, dans un service. Le deuxième âge, celui des archives intermédiaires, est celui des documents terminés mais pour lesquels il y a encore une durée d’utilité administrative (DUA) imposant une obligation de conservation à des fins probatoires. Enfin, c’est le temps des archives définitives qui ont une valeur patrimoniale.

Si les archives courantes ont leur place dans les services, la conservation des archives intermédiaires est assurée par la collectivité elle-même ou par appel à un tiers archiveur. En revanche,  la conservation des archives définitives ne peut être assurée que par la commune ou éventuellement la structure intercommunale à laquelle elle appartient ou les Archives départementales.

En se positionnant comme tiers archiveur, le Centre de gestion n’a pas le droit d’assurer la conservation des archives définitives. Un partenariat entre CDG et Département permettrait de réaliser le transfert des archives intermédiaires vers une autorité d’archivage compétente pour les archives définitives.

Notre souhait serait de pousser la mutualisation de l’archivage intermédiaire jusqu’à l’archivage définitif.

 

Concrètement, quand peut aboutir ce projet ?

 Le Centre de gestion expérimente le SAE as@lae développé par l’Adullact pour s’assurer qu’il répond aux besoins des collectivités, mais aussi que les applications proposées par ailleurs sont bien en capacité d’y verser les documents en appliquant le format d’échange standard des données d’archives (SEDA). Dans le même temps, le Centre de gestion réhabilite un bâtiment sur la zone du Hellu à Lille-Hellemmes où une salle informatique sera dédiée à l’archivage. Ce bâtiment doit être livré en 2013. Le Centre de gestion envisage donc, à partir de 2014, une expérimentation avec quelques structures avant de proposer une offre aboutie aux collectivités du département. Elles pourront alors être accompagnées par un service d’archives riche, certes, d’une plate-forme technique, mais aussi d’archivistes compétents dans une démarche globale. L’accompagnement est un élément essentiel à la réussite de tout projet, et particulièrement sur l’archivage.

Avec l’archivage électronique, le Centre de gestion aura conçu et réalisé une chaîne complète cohérente qui ira de la production, à travers toutes les applications que peut mettre à disposition Cre@tic, jusqu’à la conservation, l’archivage électronique. L’objectif, c’est une chaîne complète sans rupture.