Le cap du million de transactions franchi
La barre symbolique du million de transactions immobilières a été dépassée en 2019, confirment les notaires dans leur bilan immobilier. Les Français continuent d’opter pour cet investissement jugé utile et rassurant. Avant un coup de frein institutionnel sur le crédit ?
Un cap symbolique a été franchi, «2019 est une année historique en nombre de transactions, puisqu’on est passé au-dessus du million de transactions», explique Frédéric Violeau, président de l’Institut notarial de droit immobilier, commentant les chiffres du bilan immobilier des notaires, dévoilé le 10 décembre dernier. Reste que si le chiffre est impressionnant, le nombre de transactions demeure proportionnel à la croissance du parc immobilier depuis une dizaine d’années, à rebours d’une vision d’un marché qui se serait emballé, précise le notaire. Fin septembre, 1 059 000 transactions ont donc été réalisées au cours des douze derniers mois en France (y compris les départements d’outre-mer, hors Mayotte). Et la progression aussi est spectaculaire : 100 000 transactions de plus qu’il y a un an, soit une hausse annuelle de 10,4 %. Si les Français continuent d’acheter, d’après Frédéric Violeau, c’est avant tout parce que cela correspond à un «besoin premier» et qu’il s’agit d’un marché «rassurant». Ces achats sont permis par les taux de crédit historiquement bas, qui compensent l’effet de l’augmentation des prix. Sur un an, les prix des appartements anciens ont augmenté de 4 %, en France. Dans le détail, ils ont crû de 0,9 % au troisième trimestre 2019, après + 1,2 % au second trimestre et + 1,2 % au premier. Et les premiers indices pour 2020 accréditent une hausse générale des prix de l’ordre de 5 % pour ces biens.
La géographie contrastée des prix
En 2019, le prix de vente médian en régions s’établit à 125 000 euros pour un appartement ancien et à 165 000 euros pour une maison ancienne. Ces chiffres globaux ont une valeur de «référence», note Frédéric Violeau, tant des différences sont grandes sur le territoire, traversé par plusieurs dynamiques. «Depuis au moins une dizaine d’années, on constate une tendance à la concentration de l’augmentation des prix de l’immobilier dans les métropoles et les grands sites urbains. Mais depuis trois ou quatre ans, une autre tendance s’affirme, avec le déplacement de l’augmentation des prix du Sud vers l’Ouest, avec des villes comme Bordeaux, dont le marché est toutefois en train d’atterrir, et aussi Nantes et Rennes, dont les prix affichent de fortes progressions», analyse Frédéric Violeau. Ces deux tendances se reflètent dans les évolutions des 18 principales villes analysées par les notaires. Comme Lyon et Nantes, en tête en termes d’augmentation de leur prix au mètre carré (supérieure à 10 %), avec, respectivement un prix médian de 4 320 euros et 3 150 euros, le m2. Après des années fastes, les prix bordelais n’ont connu en 2019 qu’une augmentation de 1,5 %, ce qui place la ville ex-æquo avec Lyon. Parmi les autres villes qui ont enregistré une forte progression de leurs prix figurent Rennes (+ 7,6 %) et Toulouse (5,7%) qui atteignent toutes les deux 2 750 euros le m2. Lille affiche une croissance de 1,2 % de ses prix immobiliers, soit 3 120 euros le m2. Seule Reims connaît une baisse de prix (- 2,7 %), et arrive à 2 000 euros. Quant au Havre, les prix sont restés quasiment stables (+ 0,5 %), à hauteur de 1 700 euros le m2, très loin devant la dernière ville du classement, Saint-Étienne, qui atteint les 930 euros (+ 7,7 %). Quant à la capitale, marché hors normes, son prix au m2 reste inégalé, avec 9 890 euros, soit deux fois plus que Bordeaux et Lyon, les métropoles qui la suivent, mais son taux de croissance n’est pas le plus élevé (+ 6,3 %).
Vers un coup de frein institutionnel ?13
Sur un an, le pouvoir d’achat immobilier des Français est resté globalement stable. La référence prise par les notaires : la surface finançable sur la base d’une mensualité de 800 euros pendant 20 ans, sans apport, pour un appartement ancien de 56 m2 (sur l’ensemble de la France). Toutefois, la stabilité de cette moyenne nationale demeure théorique, et recouvre des dynamiques très diverses. Ainsi, la surface finançable baisse dans les villes comme Nantes, Nice, Paris et Lyon. Là, par exemple, très en deçà de la moyenne nationale, on ne peut acheter que 37 m2, soit trois mètres carrés de moins que l’année précédente. À Paris, c’est 16 m2. Quant à savoir si les tendances 2019 du marché de l’immobilier ancien vont se confirmer en 2020, d’après les projections des notaires, le marché ne devrait pas connaître d’inflexion majeure. Les hausses de prix devraient se poursuivre, sur fond de taux d’intérêt qui ne devraient pas augmenter, en raison de la politique de la BCE, Banque centrale européenne. Toutefois, il reste à savoir si les banques vont continuer leur politique d’octroi de crédit immobilier, très facilitatrice. Ce paramètre pourrait évoluer. Le Haut conseil de stabilité financière, chargé de surveiller le système financier, soucieux d’éviter la surchauffe du marché du crédit immobilier, a recommandé aux banques de restreindre les conditions qu’elles accordent, notamment en termes de durée des prêts, qui ne cesse de s’allonger. Pour Maître Violeau, il est encore «trop tôt», pour évaluer les effets de ces déclarations, et les éventuelles mesures que pourrait prendre le gouvernement.
«Depuis au moins une dizaine d’années, on constate une tendance à la concentration de l’augmentation des prix de l’immobilier dans les métropoles et les grands sites urbains.» Frédéric Violeau, président de l’Institut notarial de droit immobilier.