Laurent Proy, président de l’Union de la filière papetière : «Les hausses de prix sont inévitables»
Fortement impactée par la hausse des prix des matières premières et les tensions sur les approvisionnements, la filière papetière a interpellé ses clients, et en particulier, les acheteurs publics, afin qu'ils acceptent de tenir compte de leurs difficultés.
Que pèse la filière papetière en France et à quels défis est-elle confrontée aujourd’hui ?
La
filière papetière, que représente l'UFIPA, Union de la filière
papetière, est constituée d' une soixantaine d'entreprises qui
emploient quelque 25 000 salariés, pour un chiffre d'affaires de 4,8
milliards d'euros. Le secteur compte des fabricants, des
importateurs, des distributeurs... de papeterie et fournitures de
bureau. Et la filière commercialise ses produits auprès de
plusieurs types de clientèles : le grand public, les
professionnels et le secteur public, qu'il s'agisse de collectivités
locales ou d'entreprises comme la Poste, par exemple. Il est
difficile d'estimer la part que représente le secteur public pour
l'ensemble de la filière, mais pour certaines entreprises, il
constitue un débouché très important. Depuis plusieurs mois, comme
de nombreux autres secteurs, nous connaissons une situation inédite.
Elle est marquée par des augmentations de prix de grande amplitude.
Plus de 60% pour la pâte à papier, par exemple. Et aussi, par des
tensions, voire, des ruptures sur l'approvisionnement, des délais de
livraison qui s'allongent alors que la consommation repart...
En novembre dernier, vous avez interpellé les acheteurs publics sur votre situation. Avez-vous été entendus ?
Nous
avons déjà certains acheteurs publics qui se montrent constructifs,
qui s'efforcent de comprendre et prendre en compte nos difficultés.
A l'origine, nous les avons alertés car nos adhérents avaient du
mal à les sensibiliser au fait que, dans le contexte actuel, nos
entreprises étaient mises en difficulté par l'application stricte
des clauses concernant les hausses de prix, prévues par les
contrats. En effet, dans le cadre des engagements contractuels avec
le secteur public, la clause de révision annuelle des prix plafonne
la hausse possible en fonction d'indices inopérants face à la
flambée des prix que nous subissons, semaine après semaine. Autre
difficulté : les pénalités prévues par ces contrats en cas
de retard de livraison, dans cette période où nous connaissons des
ruptures de produit imprévisibles...
Vos clients du secteur privé sont-ils moins concernés ?
Nous travaillons à sensibiliser l'ensemble de nos clients. Toutefois, la situation est différente avec ceux du secteur privé. En effet, les échanges se faisant le plus souvent de gré à gré, le formalisme est plus souple qu'avec le secteur public. Lorsqu'un distributeur négocie avec une PME, il lui est possible de réviser le tarif de ses produits pour répercuter une hausse des prix, quitte à ce que le client ne l'accepte pas. Face à la grande distribution, les entreprises peuvent répercuter la hausse des prix immédiatement, ou différer une partie de cet effet, si leur trésorerie le leur permet. Mais dans tous les cas, elles n'ont d'autre choix que de le faire. Au final, il est indispensable que chacun, l'ensemble de la filière, et aussi les clients, s'adapte à ces hausses de prix. Elles ne sont ni un artifice, ni une recherche de marge. Elles sont inévitables. Face à cette situation, chacun doit assumer ses responsabilités.