L'agroalimentaire face aux enjeux du Brexit
Les nouvelles réglementations liées au Brexit touchent tous les exportateurs. L'agroalimentaire, soumis non seulement aux nouvelles réglementations douanières, mais aussi aux contraintes vétérinaires et phytosanitaires, est un secteur en première ligne...
L’agroalimentaire est l’un des premiers secteurs exportateurs en Hauts-de-France. En 2019, la région exportait 8,05 milliards d’euros de biens agricoles et agroalimentaires, et importait à hauteur de 8,19 milliards d’euros. Il s’agit du deuxième poste exportateur, derrière les produits chimiques, et le quatrième poste d’échanges extérieurs. Autant dire qu’il s’agit d’un enjeu stratégique pour le territoire. Toutefois, à la veille du Brexit, Vanessa Quéré, directrice internationale de l’Association nationale des industries alimentaires (Ania), se veut rassurante : «Le Service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire (Sivep) va probablement être problématique, mais le phénomène sera plus marqué à l’import.» D’autant plus que les exportations de la région se font en majorité vers des pays comme la Belgique. D’autre part, le Royaume-Uni reste dépendant de l’importation dans le secteur alimentaire. De quoi rassurer les exportateurs…
Une situation encore incertaine
Toutefois, ces bouleversements à l’export vers la Grande-Bretagne soulèvent des questions. Les négociations ne sont pas terminées, mais le secteur s’est déjà mis en ordre de marche. L’on sait que le Royaume-Uni sortira de l’Union européenne le 1er janvier prochain. Certains éléments sont déjà connus, mais la situation reste délicate. L’essentiel des nouvelles règles sanitaires entreront en vigueur à partir du mois d’avril. «Les droits de douane ont été publiés, tempère Vanessa Quéré. Malgré tout, les différentes entreprises du secteur sont encore dans l’attente d’informations précises.» Il faut bien comprendre qu’il existe des «centaines d’exceptions, tant et si bien qu’il n’existe pas réellement de règle universelle». D’où l’importance de consulter les services de douane pour les entreprises qui ont encore des questions : «Le pôle d’action locale de la douane a un rôle particulièrement important. Chaque entreprise exportatrice doit se saisir de ce dossier.» D’autant plus à l’heure du plan de relance, qui comporte un volet incitant les entreprises à tenter l’aventure de l’export.
D’importants changements de flux
Le secteur agroalimentaire souligne son inquiétude de voir certaines procédures allongées. «Pour les produits périssables, la mise en place de certifications sanitaires peut poser un problème. Nous ne connaissons pas le contenu du certificat, mais manifestement la procédure va être contraignante et forcément ralentir les expéditions, résume Vanessa Quéré. L’administration se donne 48 heures pour les contrôles. Ce sont des contraintes supplémentaires pour des produits frais, comme les yaourts par exemple. On peut perdre des marchés.» Certaines parties du secteur agroalimentaire fonctionnent effectivement en flux tendu. «Ces certifications sanitaires peuvent encore être négociées au niveau européen ou de façon bilatérale…»
La frontière intelligente pourrait accélérer les flux, selon les acteurs publics. L’idée : se saisir des démarches en amont afin de fluidifier au maximum le passage de la frontière. Cependant, «les transporteurs attirent notre attention sur le multi-chargement (le fait qu’un seul camion transporte plusieurs types de marchandises de différentes entreprises, ndlr), avertit Vanessa Quéré. S’il y a un contrôle et qu’une des marchandises n’est pas en règle, c’est tout le camion qui sera bloqué». Et, si certaines grandes entreprises ont leur propre flotte, la plupart ont recours au multi-chargement… et dépendent ainsi des marchandises de leurs voisines et des démarches qu’elles auront entreprises.