La transposition des directives “marchés publics” a débuté

Le 11 février 2014, Bruxelles adoptait trois nouvelles directives relatives aux marchés publics et aux concessions. simplification, assouplissement, flexibilité et modernisation sont les objectifs de ce paquet européen de la commande publique. La France entend profiter de la transposition pour refonder son droit de la commande publique. Le décret du 26 septembre 2014 portant mesures de simplifications applicables aux marchés publics marque la première étape.

La transposition des directives “marchés publics” a débuté

Entré en vigueur le 1er octobre dernier, le décret n°2014-1097 du 26 septembre 2014 modifie le Code des marchés publics ainsi que les décrets d’application de l’ordonnance du 6 juin 2005, et transpose, de manière accélérée, quatre mesures de simplification favorables aux PME. Une nouvelle procédure est également introduite : le partenariat d’innovation. Le décret ne reprend cependant pas la mesure de simplification relative au Document unique de marché européen (DUME) dont la publication au niveau européen a pris du retard.

Le partenariat d’innovation, nouveau marché.

Des quatre modifications prévues par le décret, le partenariat d’innovation figure comme la mesure phare. Ce nouveau contrat a pour objet de favoriser “la recherche, le développement ainsi que l’acquisition de fournitures, services ou travaux innovants qui en sont le résultat”. Sont innovants les fournitures, services ou travaux nouveaux ou sensiblement améliorés, qui répondent à un besoin qui ne peut être satisfait par des fournitures, services ou travaux déjà disponibles sur le marché. La particularité de ce nouveau marché sera d’organiser deux phases successives d’exécution : une première consacrée au processus de recherche et de développement (R&D) et une seconde dédiée à l’acquisition des produits, services ou travaux qui en sont le résultat. Le partenariat d’innovation pallie ainsi les difficultés structurelles des actuels marchés de R&D. Désormais, les acheteurs publics peuvent mettre en place un partenariat de long terme couvrant à la fois la R&D et l’achat des produits services ou travaux innovants, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle mise en concurrence. La procédure utilisable est la procédure négociée avec publicité et mise en concurrence. Elle assure un dialogue entre le pouvoir adjudicateur et les candidats lors de la phase d’élaboration des offres, permettant ainsi d’ajuster celles-ci, en même temps que le besoin de l’acheteur public s’affinera et que les moyens de mise en œuvre se préciseront. A l’issue de chaque phase, et sur la base des résultats obtenus, le pouvoir adjudicateur peut soit poursuivre l’exécution du contrat, éventuellement après avoir précisé ou modifié, avec l’accord du partenaire, les objectifs de la phase suivante et les moyens à mettre en œuvre pour les atteindre, soit y mettre un terme, soit réduire le nombre de partenaires. L’introduction de ce nouveau type de marché public sera certainement très appréciée par les acteurs de la santé publique.

Les règles existantes de la commande publique sont également modifiées à trois égards. Une première innovation consiste à plafonner le chiffre d’affaires annuel exigible des candidats par les acheteurs publics. Actuellement, pour apprécier les capacités techniques, financières et professionnelles des candidats, les acheteurs publics peuvent uniquement exiger un chiffre d’affaires annuel minimal. Désormais, ils pourront demander, en fonction de l’objet de leur marché, à ce que le chiffre d’affaires soit inférieur au double de la valeur estimée du marché.

Les dossiers de candidatures simplifiés.

Le décret simplifie, ensuite, la constitution des dossiers de candidatures. Les entreprises sont dispensées de fournir des documents et renseignements que le pouvoir adjudicateur peut obtenir directement par le biais d’une base de données ou d’un espace de stockage numériques. Le décret pose également le principe du “Dites-le nous une seule fois”. Les candidats peuvent être dispensés de fournir des documents ou renseignements d’ores et déjà transmis au pouvoir adjudicateur dans une précédente consultation, si ceux-ci demeurent valables. Toutefois, cette faculté est laissée à la discrétion de l’acheteur public qui doit l’avoir autorisée dans l’avis d’appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation. Il faut ainsi espérer que ces derniers en fassent réellement usage. Le décret du 26 septembre 2014 entend donc faciliter l’accès des entreprises à la commande publique, notamment des TPE et des PME, et favoriser la recherche et l’innovation. Il représente la première étape de la transposition en droit français des directives “Marchés publics et concessions” qui devra être terminée en avril 2016. Dans un second temps, le gouvernement poursuivra cette transposition par voie d’ordonnances, afin de regrouper les dispositions, aujourd’hui disséminées entre le Code des marchés publics et l’ordonnance du 6 juin 2005, dans un seul et même texte législatif.

La France espère, à la fin, être dotée d’un véritable “Code de la commande publique”, regroupant toutes les règles de l’achat public (marchés publics, marchés soumis à l’ordonnance du 6 juin 2005, concessions, partenariats public/privé…).

Charlotte HERMARY,D.R.
avocate en droit public (charlotte.hermary@fidal.com)