La situation économique se tend en Normandie
L'ordre des experts-comptables de Normandie a livré, ce 25 février, les chiffres de son baromètre "Image PME". Ils témoignent d'un recul global de l'activité en volumes.

Cette fois, on arrive au bout de l'inertie gagnée en période post-Covid. C'est ce qui ressort des chiffres 2024 présentés ce mardi 25 février par l'Ordre des experts-comptables de Normandie, à travers son baromètre économique des TPE/PME. La Normandie s'en sort plutôt bien en cette année 2024. Le chiffre d'affaires cumulé des entreprises suivies par les experts-comptables (98 % des entreprises normandes pour un tiers des emplois), termine l'année légèrement positif, à +0,5% par rapport à 2023. C'est mieux que la moyenne nationale qui affiche un recul de -0,4 %. Mais cette hausse cache une réalité plus sombre.
D'abord elle ne prend pas en compte l'inflation. "Si on intègre l'inflation - qui devrait être entre 1,6 à 1,8 - cela signifie qu'on a eu en 2024 une baisse en volume de l'activité de nos clients", traduit Franck Nibeaudo, président de l'Ordre des experts-comptables de Normandie. Cette baisse est, selon lui, surtout intervenue à partir du second semestre 2024, placé sous le sceau de l'incertitude politique et géopolitique. Le premier semestre 2024 aurait, quant à lui, profité de l'inertie des deux très bonnes années 2022 et 2023, permettant de tirer des bilans de fin d'année finalement relativement stables.
Bâtiment, habillement, hébergements
et restauration en difficulté
Derrière cette réalité régionale se cachent aussi des disparités importantes selon les activités. L'actualité l'avait déjà fréquemment souligné, l'immobilier et les activités liées à la construction sont en difficulté. La maçonnerie et les activités de gros œuvre par exemple, affichent un recul de chiffre d'affaires cumulé de 5,2%. De même que le commerce d'habillement (-2,1%). Plus surprenant en revanche, le recul marqué (-1,3 %) du chiffre d'affaires dans l'hébergement et la restauration, et ce, malgré l'attractivité touristique créée par les Jeux olympiques de Paris, et les 80 ans du D-Day. Selon Atout France et l'Ordre des experts-comptables, c'est encore l'inflation et son impact sur le portefeuille des ménages qui serait en cause.
A l'inverse de la boulangerie-pâtisserie (+1,6%), le commerce de boucherie souffre aussi (0 %) sous l'effet de la baisse de la consommation de viande. D'autres secteurs s'en tirent mieux, ayant probablement réussi à mieux compenser la hausse de leurs charges. Citons les garagistes (+4,3 % du chiffre d'affaires cumulé), les pharmacies (+3,8 %) ou les opticiens (+3,8 %).
Retrouver de la visibilité et relancer l'investissement
Pour autant, la situation n'est pas (encore) catastrophique. Pour preuve le nombre de défaillances enregistrées en 2024 reste raisonnable, surtout si l'on intègre l'effet de rattrapage post-Covid. "On compte 2 100 à 2 700 procédures collectives – redressements ou liquidations judiciaires, ndlr – par an, alors que l'on suit 150 à 180 000 entreprises en Normandie", insiste Franck Nibeaudo. Nouveauté en revanche, plus d'ETI et de PME sont concernées par ces procédures. Avec un impact direct sur l'emploi. Malgré la stabilité de l'emploi salarié, le taux de chômage grimpe et rejoint, avec 7,2 % de la population active, le taux national.
Cette situation d'incertitude ne peut toutefois pas durer. Il y a urgence à retrouver un peu de visibilité, car déjà le ralentissement des investissements est notable et pourrait grever le potentiel de reprise. "Il y a de gros enjeux de maîtrise de la productivité et de la compétitivité, insiste Franck Nibeaudo. Chacun doit balayer devant sa porte, y compris l'État, et aller chercher de la valeur pour financer le changement. Notre rôle, à nous experts-comptables, est renforcé dans cette période. Nous devons aider nos clients à surveiller leurs prix, leurs marges et leurs trésoreries."
Pour Aletheia Press, Benoit Delabre