La région invite ses habitants à redécouvrir le territoire
En 2019, il représentait 5% du PIB régional et 100 000 emplois directs et indirects dans la région. Le secteur du tourisme est en berne depuis la crise de la Covid-19. Ses acteurs se mobilisent pour remettre la machine en marche depuis début juin. Si le tourisme d'affaires reste visiblement en suspens, reste le tourisme d'agrément. Il ne faudra toutefois pas compter sur la fréquentation étrangère cet été.
Rassurer et promouvoir. Voilà le plan d’action de tous les acteurs touristiques de la région. Cet été, musées, restaurants, hôtels et parcs d’attractions devront faire des pieds et des mains pour relancer leur activité. Même si rattraper la perte de chiffre d’affaires engendrée par le confinement semble inenvisageable.
Des aides pour redémarrer
Fonds d’urgence de 93 M€ débloqué par la Banque des territoires, report des échéances de crédit allant jusqu’à 12 mois, annulation des loyers et des redevances d’occupation du domaine public, ou encore facilitation des octrois de prêts garantis par l’Etat : pléthore d’aides financières ont été mises en place pour soutenir le secteur du tourisme pendant son arrêt net d’activité.
Depuis la deuxième phase de déconfinement début juin, les principaux lieux de loisirs rouvrent de manière progressive. D’autres aides entrent alors en compte pour relancer la fréquentation du côté des consommateurs. Qu’il s’agisse du plafond journalier des tickets-restaurants augmenté à 38 euros même les soirs, week-ends et jours fériés, ou de l’allègement de la taxe de séjour des hébergements touristiques.
Attirer la clientèle locale
Plus localement, des offres promotionnelles ont aussi été inventées. La Métropole européenne de Lille (MEL) a par exemple consacré une enveloppe de 2,4 M€ au renforcement des actions de promotion de la filière tourisme, en plus des aides octroyées à ses acteurs (environ 2,5 M€).
Outre des campagnes publicitaires menées jusqu’en Belgique et Paris, l’agence d’attractivité lilloise Hello Lille lance l’opération «L’été dans les étoiles» du 1er juillet au 31 août. Trente hôtels du Club hôtelier (parmi lesquels Le Clarance, l’Hermitage Gantois, le Carlton ou le Grand Hotel Bellevue) s’engagent à appliquer des tarifs uniques pour les habitants des Hauts-de-France. Un forfait incluant le petit déjeuner donne droit à des prix inédits, allant de 30 euros la nuit dans un établissement une étoile, jusqu’à 99 euros maximum pour un cinq-étoiles.
Avec cette promotion, l’objectif est bel et bien d’inciter la population à redécouvrir son environnement local. En temps normal, 31% de la clientèle touristique dans la région est internationale, avec, en premier lieu, des visiteurs anglo-saxons. Toutefois, l’arrêt du trafic de l’Eurostar et la quatorzaine réglementaire en Grande-Bretagne ne permettront pas de maintenir ce chiffre cette année.
La solution du “city break”
Si l’ouverture des plages de la Côte d’Opale et les différents parcs naturels sont ouverts depuis la fin du confinement, les villes ont tout intérêt à promouvoir leur offre de «city break» : le shopping, une bonne adresse de restauration ou un grand hôtel sera le seul motif du déplacement.
C’est typiquement le cas du Royal Hainaut Spa & Resort Hotel à Valenciennes. L’ancien hospice a rouvert le 18 juin avec 70% de son effectif. Seul un de ses trois restaurants restera fermé, «comme prévu chaque été» précise André Grosperrin. Le directeur observe que la clientèle est au rendez-vous, mais uniquement le week-end. Celle-ci est locale, mais aussi parisienne. «En semaine, la clientèle d’affaires est malheureusement moins présente. Nos restaurants fonctionnent aussi moins bien le midi, parce que les déjeuners de travail n’ont plus lieu en raison du télétravail», déplore-t-il, en mentionnant qu’il ne remplit, fin juin, que 30% de ses chambres. A l’instar de l’opération «L’été dans les étoiles», il a lancé sa propre offre «2=3», jusqu’au 30 septembre. «Réduire le prix d’une nuit n’est pas bénéfique car le touriste n’a pas le temps de visiter les alentours. En allongeant la durée du séjour, le client prend son temps sur le territoire et fait vivre les acteurs économiques locaux», justifie-t-il.
Une étude commandée par l’observatoire du tourisme de la MEL, réalisée par l’institut GECE, met en lumière les intentions de visites et loisirs des habitants des Hauts-de-France, de la Belgique et d’Île-de-France. Elle indique que pour 60% du panel, des offres alléchantes seraient une motivation principale à leur venue sur le territoire cet été.
Au global, 2,3 millions de visiteurs sont attendu sur la MEL cette saison (41% de Franciliens, 35% de Belges, 64% d’habitants des Hauts-de-France hors MEL). Ces visiteurs sont catégorisés comme des jeunes, de 30 à 44 ans, CSP+, se déplaçant en voiture ou en train pour passer un «city break» en couple de 2,6 nuits.
Mesures sanitaires pour rassurer
Pour que ces chiffres soient confirmés, encore faut-il que la population soit rassurée. Bien que de moins en moins flagrante, la menace de la Covid-19 plane toujours. Chaque lieu public doit suivre un protocole sanitaire de base afin d’être autorisé à rouvrir. Celui-ci inclut au minimum masques, distribution de gel hydroalcoolique et respect des règles de distanciation.
Toujours sur la MEL, Hello Lille et l’Institut Pasteur de Lille ont travaillé en collaboration sur une charte qui indique dix engagements clés que les restaurateurs, hôteliers et commerçants assurent respecter à propos des gestes barrières contre le Coronavirus. Chaque membre de cette charte (soit plus de 200 acteurs touristiques et culturels) se voit remettre un logo qu’il affiche en vitrine pour rassurer le client.
Le professeur Camus, de l’Institut Pasteur de Lille, concède que l’initiative relève surtout de la communication : «Ces dix engagements sont à la portée de n’importe quelle entreprise en mesure de rouvrir.» Il la salue toutefois. «La tension est retombée, c’est très net et c’est tant mieux pour l’économie. Pour lutter contre le virus, les seules armes que nous avons sont les mesures de distanciation sociale. Aujourd’hui, on se rend compte qu’on peut les alléger. C’est plus vivable.»
Si vivable que les parcs d’attractions commencent, eux aussi, peu à peu à rouvrir. Véritable moteur de l’activité touristique dans l’Oise, le Parc Astérix a accueilli ses 3 000 premiers visiteurs le 15 juin dernier. Le coup d’envoi saisonnier était initialement prévu pour le 4 avril. La direction a alors déclaré une perte sèche de 80 000 euros par jour. Pour le moment, la capacité maximale sur ce parc de 34 hectares est limitée à 10 000 personnes par jour afin de respecter les mesures de distanciation, «un quota qui devrait augmenter au fil des semaines». Le port du masque reste obligatoire dans les attractions, dont les sièges sont désinfectés à chaque passage.
Contrairement à Nausicaà, autre attraction reconnue de la région, les points de restauration sont maintenus, avec quelques couverts en moins.
L’aquarium boulonnais, deuxième site touristique le plus fréquenté de la région après Astérix, a fait le choix de fermer ses espaces bars et restaurants. La structure a rouvert le 4 juin dernier avec un protocole plus strict que la moyenne : le sens unique est imposé, l’audioguide interdit et la prise de température obligatoire à l’entrée.
Le nombre de visiteurs simultanés est limité à 1 700 au lieu des 5 800 habituels. Parmi les visiteurs, Nausicaà compte recevoir un grand nombre de «héros». Jusqu’au 3 juillet, le site propose en effet un tarif préférentiel aux personnels soignants vivant dans une commune de la communauté d’agglomération du Boulonnais ou travaillant dans un établissement de santé situé dans la CAB.